Jack Nicholson
bien la mettre en œuvre pour s’attirer la sympathie et faire rire.
Jack avait des choses à apprendre du vieux séducteur, à la ville comme à l’écran. « J’ai piqué à Warren un truc qu’il avait appris dans le théâtre anglais », admit-il au cours d’une interview. « Quand on sait qu’on va être sous les projecteurs, il faut mettre de la poudre noire, là (sur l’arête du nez), pour empêcher la lumière de gommer vos cheveux. »
Warren était un maître dans l’art de la séduction (le surnom que Jack lui avait donné ? « Pro »). Quand il se rendait à une fête, il repérait une proie, lui disait des mots doux, la raccompagnait chez elle, et finissait toujours par passer un très bon moment. Pas de sentiments. Alors que Jack était toujours perdu dans ses relations avec les femmes. Il tombait sans cesse amoureux, même de ses conquêtes d’un soir, et avait toujours l’air de se lamenter sur son sort.
Alors que Warren, même quand il avait les cheveux au vent, restait impeccablement beau et élégant, Nicholson était parfaitement conscient de ses imperfections physiques : son front qui commençait à se dégarnir, ses cicatrices d’acné sur le dos, sa petite taille. Les chaussures à talonnettes qu’il portait pour être au même niveau que ses partenaires féminines, il les gardait souvent une fois les caméras éteintes. Et il commença secrètement à se faire suivre par un spécialiste de la calvitie new-yorkais.
L’incident Michelle Phillips n’avait pas été oublié par Jack et Warren : il était également devenu un sujet de fierté partagée, comme un trophée de tennis en double (on peut peut-être voir une allusion à cette situation dans la scène de La Bonne Fortune où les deux ignobles personnages font tour à tour danser le tango à l’héritière, qui passe de l’un à l’autre comme un mannequin). Et puis il y avait tout de même Anjelica Huston, qui tenait compagnie à Jack. Elle était incontestablement un joyau à sa couronne, même si la romance de conte de fées n’était en réalité pas si idyllique qu’elle en avait l’air.
D’ailleurs, Jack avait accepté de loger Helena Kallianiotes dans la maison supplémentaire de sa résidence et montrait quelques réticences à inviter Anjelica à venir partager son sacro-saint espace vital. Anjelica était comme son père, complexe, difficile à définir ou à comprendre ; très différente de June ou Ethel May, ainsi que de toutes les autres précédentes petites amies de Jack. Elle fit de la cohabitation une condition à la poursuite de leur histoire. Jack dut donc céder, et Anjelica s’installa temporairement dans la grande dépendance.
Les deux amoureux devaient faire de perpétuelles concessions. L’attention que la star recevait à chaque fois qu’elle apparaissait en public énervait la fille de John Huston. Jack ne se donnait pas la peine de limiter le nombre de ses festivités nocturnes. Et à ces soirées entre stars et entre amis, Anjelica se sentait différente et mal à l’aise. « Je restais dans un coin comme une imbécile, à hocher la tête et à essayer d’avoir l’air joyeux quand ces étrangers daignaient jeter un coup d’œil sur moi. J’ai passé beaucoup de temps à me cacher dans des toilettes, généralement pour vomir de nervosité », déclara-t-elle au cours d’une interview.
Régulièrement, Anjelica jetait son tablier et quittait la maison de Jack, allait prendre l’air une semaine ou deux, puis rentrait.
Dès le début, elle semblait plus tenir à Jack que lui ne tenait à elle, et certainement plus prédisposée que lui à la fidélité. Jack, au sommet de sa gloire, entouré de fans et de belles femmes partout où il allait, rattrapait le temps perdu – « essayait de baiser avec tout ce qui avait deux bras et deux jambes », d’après l’une de ses connaissances. C’était plus que jamais une période de festivités pour lui, et il se souciait peu de prouver publiquement l’affection qu’il portait à Anjelica.
Avec Beatty, il formait un duo comique mais extrême de séducteurs, pas si différents des personnages qu’ils incarnaient dans La Bonne Fortune – entreprenant des voyages ensemble, écumant les soirées, fréquentant les grands matchs de boxe. Anjelica put lire dans le magazine Time qu’« on voyait souvent Nicholson au volant de sa voiture observant les rues à la recherche de filles », ou, dans le journal de
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