Jack Nicholson
Friedrich Durrenmatt, La Promesse (The Pledge), histoire d’un policier à la retraite jurant à une mère en deuil d’élucider le meurtre de sa fille. Nicholson, qui s’était au départ montré réticent, se laissa finalement convaincre par la fin dure et éloignée de toute idée de conclusion : le crime restait impuni, le gentil était un loser inutile.
L’acteur reçut, d’après le directeur de casting Don Phillips, « la somme qu’il valait vraiment, cette fois-ci », une somme qui consuma la plus grande partie du budget de la distribution ; le reste des acteurs accepta de jouer en échange d’un petit cachet mais aussi de la promesse que chacun aurait « une scène en tête à tête avec Nicholson ». Par ordre alphabétique, les autres respectables membres de ce casting étaient Patricia Clarkson (dans le rôle de la mère en deuil), Benicio Del Toro, Aaron Eckhart, Helen Mirren, Michael O’Keefe, l’épouse de Penn Robin Wright-Penn, Vanessa Redgrave, Mickey Rourke, Sam Shepard, et la doublure grisonnante de Jack, Harry Dean Stanton.
Penn réécrivit le script de Jerzy Kromolowski et Mary Olson-Kromolowski. L’histoire, située à Reno et dans les montagnes Rocheuses du Nevada, serait, pour des raisons de budget, filmée dans la région de Vancouver. La neige recouvrait le sol et le mercure était en dessous de zéro lorsque le tournage commença en février 2000. C’était un rôle dépourvu de séduction pour Nicholson, qui, le crâne dégarni, arborait une moustache ramasse-miettes et des vêtements de supermarchés. Il prit beaucoup de plaisir à parcourir les routes pour le tournage. « C’était effrayant, ces énormes camions de transport de bois qu’on peut voir dans le film – et la pluie, et la nuit, et les routes de montagne en lacet », déclara-t-il.
« Jack avait un planning de tournage violent, complètement dépourvu de continuité, expliqua Penn. Je l’envoyais faire des allers et retours dans sa caravane dix fois par jour pour qu’il se change. Il faisait un froid glacial. Mais quand il devait neiger dans le film, forcément, il ne neigeait pas. "Je vais infographier la neige plus tard, les gars, mais croyez-moi, là, il neige. Allez, on tourne." C’était dans ce style-là. Mais tu sais, c’était comme si je travaillais avec un gamin qui vient d’avoir son premier job, tellement il en voulait. Personne d’autre n’aurait pu faire ce que Jack a fait grâce à son attitude positive et ses compétences. On a vraiment l’impression d’être avec un champion du monde. »
« Dans son interprétation, Jack est vraiment capable de lancer une allumette dans une boîte de feux d’artifice, mais en même temps, il peut travailler de façon beaucoup plus subtile et vous donner des feux d’artifice qui reposent entièrement sur l’effet cumulatif. Pour The Pledge, il y avait toujours une question qui revenait : "Est-ce qu’on dramatise cette nuance du personnage maintenant ou plus tard ?" Et Jack avait un comportement très professionnel : il apportait des fiches avec des listes qui retraçaient toute sa prestation et les toutes petites choses qui doivent sortir à un moment ou à un autre. Et si cette fiche-là, il ne la sortait pas dans cette scène-là, alors quelque chose devait être transféré vers autre chose. Il était sans arrêt en train de relire son script, du début à la fin. »
Les réalisateurs âmes sœurs tels que Rafelson, Brooks ou Penn ne facilitaient pas la tâche de Nicholson ; paradoxalement, leur familiarité avec l’acteur leur permettait de le défier. Jack le play-boy disparaissait au profit du comédien col bleu qui sondait les profondeurs de son personnage, disposé à tout essayer. Il était enhardi. Alors qu’il travaillait sur The Pledge, en mai, Penn interrompit même le tournage pendant un mois et demi pour attendre le changement de saison, repoussant ainsi la réalisation de certaines scènes clés. Penn commença à monter le film avec le professionnel Jay Cassidy. Nicholson s’en alla et revint pour s’installer dans la maison de Penn pendant quelques jours : tandis que Penn marchait de long en large, Nicholson et le monteur visionnèrent le film et « critiquèrent beaucoup de choses », d’après Penn. « Jack a un excellent sens du montage ; ce n’est pas un type qui ne vient que pour se regarder lui-même ; il regarde l’ensemble de la narration, et il a un sens de la narration qui est aussi
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