Je n'aurai pas le temps

du Suroît. Pour compenser cet accroissement, un individu devrait prendre chaque jour le métro, plutôt que sa voiture, pendant mille cinq cents siècles.” Ce constat est celui de milliers de Québécois et tout particulièrement ceux qui tentent de faire leur part pour protéger la planète. Les petites améliorations que nous apportons chaque jour, en recyclant, en prenant le métro, en chauffant moins nos domiciles, se verraient annihilées par la détérioration infiniment plus massive qu’entraînerait cette construction décidée par des instances gouvernementales.
    Au danger écologique réel s’ajoute le risque de découragement et de démobilisation collective pour tout ce qui touche l’environnement. Pourquoi nous priver d’une voiture polluante, pourquoi limiter votre chauffage à vingt degrés, si ce que nous évitons à l’environnement reste aussi dérisoire à côté des émissions de cette centrale ? Certes, le gaz pollue moins que le charbon, le pétrole, le plutonium. Certes, le Québec détient une bonne performance relative par rapport à l’émission du CO 2 . Seulement, et c’est là un second message qui laisse perplexe, loin d’être revendiquée, loin de devenir un titre de fierté pour la province, cette bonne performance est érigée en justification pour devenir mauvais élève : nous avons été assez efficaces, nous avons gagné le droit de polluer. Laissons aux autres provinces et aux autres générations la tâche de nettoyer nos dégâts. Dans tout autre contexte, travail, éducation, santé, un tel argument serait inadmissible.
     
    Il y a quelques décennies, les centrales au gaz auraient été accueillies comme une bénédiction. Ce n’est plus le cas aujourd’hui, où la situation est devenue préoccupante, et où des alternatives crédibles se développent déjà depuis des années. Pourquoi vouloir faire moins bien, alors qu’on peut faire mieux ? Pourquoi faire “moins pire”, alors qu’on sait faire mieux ? Agir aujourd’hui, c’est insister pour que les sommes colossales englouties dans la construction de ce dinosaure écologique soient affectées à la construction de centrales éoliennes et aux recherches sur toutes les formes de l’énergie solaire. Là seulement se construira une stratégie énergétique à long terme, durable parce que délivrée des fluctuations des marchés et des risques de pénurie. L’expertise du Québec en la matière, jointe à des conditions géographiques et climatiques particulièrement favorables, nous donne cette chance unique de devenir chefs de file planétaires dans le domaine des énergies douces et perpétuellement disponibles. Ne vaut-il pas mieux éviter de provoquer ces crises que de tenter d’y survivre ? Croire que la science trouvera des solutions à tous les problèmes qui se présenteront, c’est se bercer d’illusions. Un projet comme la centrale du Suroît n’a plus sa place dans une politique environnementale responsable. Espérons que le gouvernement en place saura écouter les voix qui de toutes parts s’élèvent pour le condamner. »
     
    Le projet a été abandonné.
     
    Je tiens à reproduire ce plaidoyer, non seulement parce qu’il est signé de mon fils Nicolas Reeves, mais parce qu’il est la traduction fidèle des pensées de toujours davantage de nos contemporains. Avec eux, je pense qu’il n’est plus temps d’attendre. Il n’est plus temps de faire « moins pire », il est temps de faire mieux, et beaucoup mieux, de faire vite, et beaucoup plus vite.
    Le résultat est aussi la preuve que ça peut marcher…
     
    Dans l’ordre, il fallait :
    – identifier les sources fiables de renseignements dans tous les domaines concernés ;
    – obtenir les résultats des recherches les plus sérieuses, ainsi que les analyses qui en avaient été faites par les organismes compétents ;
    – en tirer des conclusions.
    Nous avons d’abord défini la succession des chapitres, chacun étant consacré à un thème particulier : le réchauffement de la planète, les sources d’énergie, les réserves alimentaires, la pollution de l’air et de l’eau par les industries civiles et militaires, les atteintes à la diversité des espèces, la disparité des richesses dans le monde… L’ouvrage se devait de présenter aux lecteurs non seulement les informations pédagogiques nécessaires pour comprendre chaque sujet, mais aussi les sources des renseignements sur lesquelles les