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Je n'aurai pas le temps

Je n'aurai pas le temps

Titel: Je n'aurai pas le temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hubert Reeves
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1930-1940). Il supposait qu’à cause de leur portée microscopique (elles ne s’exercent qu’au niveau des atomes et des molécules), elles ne jouaient aucun rôle à l’échelle du cosmos.
    Je lui rappelle la contribution fondamentale que Gamow a apportée à cette question. Il est parti de l’idée que, si la théorie de l’expansion était valable, le cosmos des premières minutes devait avoir été excessivement chaud et lumineux. Il en avait déduit que deux fossiles devaient encore subsister de cette période. D’une part une faible lumière résiduelle, et d’autre part quelques atomes d’hélium engendrés par les réactions nucléaires induites par ces températures extrêmes. Les « cendres » du brasier initial en quelque sorte. Comme, par analogie, celles des foyers éteints que les archéologues retrouvent dans les lieux habités par les hommes préhistoriques. Le chanoine me dit sa grande estime pour Gamow et ses regrets de ne pas avoir suivi cette voie apparemment si prometteuse. Se passionnant pour d’autres problèmes, ilavait en effet abandonné la cosmologie pour s’adonner aux mathématiques.
    Il est vrai qu’à cette époque il ne pouvait guère soupçonner que l’une des preuves les plus convaincantes de la théorie du Big Bang viendrait de l’intuition qu’avait eue Gamow de la nucléosynthèse primordiale, c’est-à-dire de la formation, dans les tout premiers instants de l’Univers, des atomes légers, vestiges de ces temps torrides, et dont nous reparlerons bientôt.
    Mettant fin à cette intéressante discussion, il me demande si j’aime la musique. Devant ma réponse positive, il me propose de jouer des études de Chopin. Je l’écoute longtemps, ému par la sensibilité de son interprétation, malgré le manque de souplesse de ses doigts.
    Le rayonnement fossile fut découvert environ un an plus tard. Il eut ainsi, quelques jours seulement avant sa mort, la confirmation par l’observation de la valeur de la théorie qu’il avait développée trente ans plus tôt. Il en éprouva une grande satisfaction.
    1 .
    « Comme à Ostende ». Paroles de Jean-Roger Caussimon et
    musique de Léo Ferré, © J.-R. Caussimon, L. Ferré et les éditions
    Méridian.

Chapitre 13
    En route pour l’URSS
    D ans le cadre d’un programme d’échanges établi entre le Canada et l’URSS au début des années 1960, on m’a proposé un séjour en Union soviétique pour rencontrer des chercheurs et donner des conférences sur l’astrophysique nucléaire. En 1964, j’ai accepté avec enthousiasme, non seulement parce que s’offrait à moi l’occasion de visiter cet immense territoire (Moscou, Leningrad, Kiev et, plus exotiques encore, Tachkent, Samarcande, Erevan, Vladivostok), mais également la possibilité de poursuivre ma recherche sur l’origine des éléments légers. Arriverais-je à convaincre quelques laboratoires soviétiques de l’importance de ces expériences et à les persuader de les inclure dans leurs projets ?
    Une autre chose aussi m’intriguait depuis longtemps : comment les Russes avaient-ils réussi à lancer des satellites dans l’espace et des sondes sur la Lune, avant les Américains ? Ces prouesses me paraissaient bien difficiles à concevoir au vu du délabrement dans lequel la Seconde Guerre mondiale avait laissé ce pays. Ses centres de recherche et ses universités avaient été entièrement détruits par les bombardements. Aux États-Unis, à l’inverse, ces institutions avaient profité de la guerre pour améliorer le haut niveau de leurs performances. Je me promettais de profiter de mon voyage pour aller y voir de plus près…
    L’invitation formelle, provenant de l’Académie des sciences (Akademia Naouki) soviétique, m’arriva un matind’hiver, à Bruxelles. Une enveloppe épaisse, couverte de tampons variés, avec, à gauche, un timbre à demi décollé, dont le coin détaché s’enroulait un peu sur lui-même. Mon nom était écrit à la fois en caractères latins et cyrilliques, avec une encre grasse qui s’était étalée. Résultat, sans doute, de l’utilisation d’une machine à écrire d’un modèle ancien, fatiguée et passablement déréglée.
    J’étais invité à me rendre le plus tôt possible au consulat d’URSS en Belgique pour y retirer un visa d’un mois. Il était précisé que les bureaux ouvraient de 9 à 17 heures. Les billets d’avion Bruxelles-Moscou étaient joints, accompagnés de la réservation

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