Je n'aurai pas le temps
persiste dans mon attitude. Ils se doutent que je ne suis pas dupe, et la fin du repas est rapidement expédiée. Cet épisode me conforte dans l’idée que mes compagnons sont d’une grande naïveté.
Un peu plus tard le même jour, m’accompagnant à l’aéroport, Svetlana me dira : « La soirée d’hier continue à nous créer des problèmes. Quant à toi, tu n’auras plus autant de facilités pour rencontrer les gens. »
Chapitre 20
À l’observatoire de Simpheropol en Crimée
É tape suivante : l’observatoire de Simpheropol en Crimée. Le directeur, l’académicien Severny, est un grand spécialiste de la constitution du Soleil. J’ai une kyrielle de questions à lui poser.
À l’aéroport, je suis attendu par un astronome américain, Don York, qui y effectue un stage d’un an. Il doit résoudre un problème délicat : les résultats des observations effectuées à Simpheropol ne coïncident pas avec ceux de son observatoire à Kitt Peak, Arizona. Il est ici avec sa femme et deux petits enfants.
Le télescope de l’observatoire est un Zeiss allemand récupéré et envoyé ici à la fin de la guerre à titre de compensation. C’est un instrument de première qualité dont les performances excellentes n’aident pas à résoudre le mystère. La réponse viendra un peu plus tard quand Don York visitera les chambres noires de l’observatoire, « dans un état de saleté invraisemblable », me dit-il. En analysant une plaque photographique, il y observe une quantité de formes bizarres inconnues jusque-là dans le ciel. Des astres nouveaux ? Non, simplement des marques de doigt d’un laborantin inexpérimenté ! Tout s’explique ! Mais je vois encore s’éloigner la réponse à mon interrogation lunaire.
Un jour, Don me confie son désir d’aller à Sébastopol. Jusque-là ses demandes sont restées vaines. « Peut-êtrepourrions-nous faire une nouvelle tentative ensemble ? » me propose-t-il.
Après mon premier séminaire, le professeur Severny me remercie avec emphase. S’assurant que je suis reçu convenablement et que je n’ai besoin de rien, il ajoute :
« Nous avons prévu pour vous plusieurs excursions en montagne. Il y a des monastères qui sont creusés dans les falaises, comme les habitations troglodytiques des moines tartares médiévaux. » Je saisis la balle au bond : « J’aimerais beaucoup visiter Sébastopol, si célèbre grâce à la littérature et au cuirassé Potemkine . Je souhaiterais y aller en compagnie de mes amis York. Pensez-vous que cela soit possible ?
– Pas de problème ! »
Quelques coups de téléphone plus tard, on m’indique qu’une voiture de l’observatoire nous attendra le lendemain matin à 8 heures pour nous conduire à Sébastopol, à Yalta et dans quelques autres stations balnéaires, « où nous serons à même de constater que tout est fait pour le confort des ouvriers communistes pendant leurs vacances ».
« Tu es un magicien, me dit Dan York. La lettre d’invitation de l’Académie des sciences t’ouvre toutes les portes. » Hélas, pas toutes ! Un minibus noir nous attend dans la grisaille du petit matin. Le nom de l’observatoire est inscrit en lettres cyrilliques sur le véhicule. Nous sommes huit à bord, la famille York et moi à l’arrière, le chauffeur, un interprète et deux autres hommes à l’avant. Qui sont-ils ? Pourquoi sont-ils là ? Sans doute des agents de l’Intourist pour veiller sur notre bien-être. Pas de chômage en URSS !
Nous roulons sur l’autoroute depuis une heure quand une barrière de feux clignotants nous oblige à l’arrêt. « C’est un contrôle de police, préparez vos papiers ! » Après vérification, les policiers s’excusent poliment de nous avoir retardés et nous souhaitent bon voyage. Un peu plus loin, nouveau barrage. Plus loin encore, même scénario ! DonYork se lève et, se dirigeant vers l’avant du bus, demande : « Pourquoi tous ces barrages ? »
Le devant de l’autobus s’active longuement. Finalement, l’interprète nous parle : « Nous sommes à proximité de la Turquie, qui est alliée avec les Américains. Beaucoup d’espions capitalistes arrivent clandestinement par cette côte de la mer Noire que nous longeons depuis un moment. Elle est sous surveillance constante. »
Nous quittons à présent l’autoroute pour emprunter une petite route tortueuse qui épouse les sinuosités de la côte. Après un certain temps,
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