Je suis né un jour bleu
petite zone fermée par des rideaux où je m’asseyais.
Elle remontait alors l’une de mes manches et me piquait le bras. J’avais eu de
nombreuses prises de sang, aussi je savais à quoi m’attendre. L’infirmière recommandait
aux patients de regarder ailleurs pendant qu’elle introduisait l’aiguille, mais
je gardais la tête immobile, fixant le tube transparent qui se remplissait d’un
sang rouge sombre. Quand c’était terminé, l’infirmière retirait l’aiguille et
posait un coton qu’elle faisait tenir avec une bande adhésive ornée d’un dessin
de visage souriant.
L’un des effets secondaires les plus
courants de ce traitement était une hypersensibilité à la lumière du soleil. De
sorte que je passais les mois d’été à l’intérieur, pendant que mon frère jouait
dans le jardin et au parc. Ça m’était égal, parce que même aujourd’hui, la lumière
du soleil me pique et me met mal à l’aise. Par beau temps, je m’aventure
rarement dehors pour de longues périodes. Peu après ma crise, mes parents voulurent
me surveiller encore plus étroitement, et je passais beaucoup de temps dans le
salon, où ma mère pouvait garder un œil sur moi pendant que je regardais la
télévision et jouais avec des pièces de monnaie que l’on m’avait données à compter.
Un autre effet secondaire de mon
traitement contre l’épilepsie était un sentiment de désorientation et de
somnolence. Chaque fois que je commençais à me sentir confus, je m’asseyais, croisais
mes jambes et attendais que la sensation passe. Parfois, mes parents étaient
gênés quand nous étions en train de marcher dans la rue et que je m’arrêtais soudain
pour m’asseoir au milieu du trottoir. Heureusement, l’accès de désorientation
ne durait que quelques secondes. Mais cette perte de contrôle de même que son
imprévisibilité me faisaient peur et j’étais souvent au bord des larmes.
Il existe une relation complexe entre le
sommeil et l’épilepsie. Beaucoup d’épileptiques souffrent de troubles du
sommeil. Les experts pensent que certains troubles du sommeil comme les
terreurs nocturnes ou la déambulation nocturne (ou somnambulisme) correspondent
à des moments de crise que vit le cerveau pendant le sommeil. Entre l’âge de 6
ans et le début de l’adolescence, j’ai eu de temps à autre des déambulations
nocturnes – certaines fois souvent, d’autres fois plus ponctuellement. La
déambulation nocturne intervient dans les trois premières heures de sommeil
quand les ondes du cerveau ont augmenté en amplitude et que le sommeil est
profond. En général, le somnambule ne réagit pas quand on lui parle et ne se
souvient pas de ses déambulations. Dans mon cas, j’escaladais mon lit et
faisais le tour de ma chambre suivant un itinéraire particulier. Parfois, je
tapais sur les murs et sur la porte de ma chambre, réveillant mes parents qui
me raccompagnaient gentiment jusqu’à mon lit. Bien qu’il soit en vérité sans
danger de réveiller un somnambule, cela peut être pour lui désorientant et
stressant.
Mes parents prirent une série de
précautions pour s’assurer de ma sécurité pendant la nuit. Tous les soirs, avant
d’aller se coucher, ils débarrassaient le sol de tous les jouets et laissaient
une lumière allumée dans le hall. Ils installèrent également une porte en haut
de l’escalier car apparemment, une nuit, j’étais descendu pour me rendre à l’arrière
de la maison, et l’on m’avait retrouvé avec la main sur la porte qui conduisait
au jardin.
De manière probablement peu surprenante, je
tombais de sommeil pendant la journée, comme si toute mon énergie avait été
pompée. Et tout ce que je voulais, c’était dormir. En classe, il était habituel
pour moi de poser ma tête sur mon bureau et de m’endormir. Les enseignants, parfaitement
informés par mes parents, ont toujours été sympathiques et tolérants. C’était
souvent désorientant de se réveiller après une période de dix ou vingt, voire
trente minutes, et de trouver la classe vide et les enfants en train de jouer
dans la cour, mais il y avait toujours un professeur pour me rassurer.
L’impact cumulé des différents effets
secondaires de mon traitement sur ma première année d’école fut considérable. J’avais
du mal à me concentrer en classe et à travailler harmonieusement. Je fus le
dernier enfant de ma classe à maîtriser l’ordre alphabétique. Ma maîtresse, Mrs.
Lemon,
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