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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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tuez ! Reine, vous tuez l’homme qui allait trouver le secret de la vie éternelle !…
    Saïtano se prit à sangloter éperdument. Sombre, le regard funeste, l’attitude raidie, la reine Isabeau contemplait Passavant endormi. Avait-elle la volonté de le sauver ? Elle n’eût pu le dire elle-même. Elle éprouvait contre le chevalier une haine qui ne pardonnerait pas. Mais peut-être d’autres sentiments, sous cette haine, étaient-ils assez forts pour combattre les suggestions mortelles.
    Si le sorcier avait tué Passavant, sans doute elle n’eût pas fait un geste.
    Mais le sorcier croyait que ce geste serait fait !
    En lui-même, il grondait des insultes contre la reine.
    – Une femme ! rugissait-il dans son cœur. Maudite soit l’heure où j’ai pu lui confier le secret de mes espérances ! Insensé ! J’ai cru que celle-ci n’était pas comme les autres… C’est une ribaude, et pour le premier ribaud qui lui plaira, elle ferait avorter l’œuvre sublime… Que lui importe, à elle ?…
    Il s’était relevé. Avec une ardeur angoissée, il étudiait la marche du réveil chez Passavant. Les trois s’étaient tus. Ils grelottaient, voilà tout. Bois-Redon, dans un coin, cachait son visage dans ses deux mains pour ne pas voir.
    À ce moment, la reine poussa un long soupir et détourna ses yeux de Passavant.
    Elle le sacrifiait ! Elle l’abandonnait à Saïtano !
    – Eh bien ? rugit Saïtano.
    – Eh bien… faites…
    Saïtano, d’un bond, fut à l’armoire de fer, avec l’intention d’imbiber à nouveau son linge et donner au chevalier une nouvelle dose de sommeil pendant lequel il l’eût fait mourir de mort violente et sans effusion de sang.
    Un éclat de rire strident qu’il entendit derrière lui l’arrêta court.
    Il se retourna, et vit Passavant assis sur la table de marbre.

V – FORTUNE DE PASSAVANT
    Saïtano demeura sur place, pétrifié, comme si ce réveil eût été l’événement le plus imprévu, le plus monstrueux.
    – Laissez cela ! cria Passavant assis sur la table. Une fois, par surprise, je ne dis pas, mais maintenant…
    Cela, c’était le linge que le sorcier tenait à la main.
    – Laissez cela, vous dis-je ! répéta le chevalier.
    Machinalement, Saïtano obéit. Le linge tomba de ses mains.
    Passavant continuait à rire. C’était un rire clair, sonore, vraiment joyeux, sans nulle ironie. C’était d’abord la joie d’échapper à il ne savait quoi de mortel et surtout de hideux. Ensuite, il faut le dire, Passavant qui, en somme, n’avait pas l’esprit d’un mélancolique, voyait les choses et les gens par leur côté plaisant. La figure de Saïtano était effrayante : elle lui parut piteuse à l’excès.
    Bois-Redon regardait cela, tout émerveillé, car il se connaissait en bravoure.
    Isabeau s’était reculée de quelques pas, et, raidie en cette attitude mortellement sérieuse qu’elle prenait parfois, elle regardait le chevalier, et songeait…
    Tout à coup, il y eut dans la sombre salle de sorcellerie où ces personnages d’un drame effroyable étaient ainsi groupés comme par une macabre fantaisie de la fatalité, il y eut un deuxième éclat de rire qui se mit à rouler en tonnerre, puis un troisième, puis un quatrième. C’étaient Brancaillon, Bruscaille, Bragaille qui venaient de reconnaître le chevalier !
    Et il leur parut tout naturel qu’il fût là ! Ils l’attendaient ! Ils savaient qu’il devait venir comme jadis trancher les liens qui les attachaient aux trois escabeaux !…
    Et la preuve qu’ils ne se trompaient pas, c’est qu’il était là !
    Il riait. Ils se mirent à rire. Cela leur sembla faire partie du rite de cette scène. Une joie énorme les soulevait.
    – Croix-Dieu ! grogna Bois-Redon, voilà de joyeux drilles ! Ma foi, j’ai bonne envie de rire aussi, moi !
    Il éclata. Saïtano tremblait jusque dans l’âme. C’était la sorcellerie bafouée, la science insultée, la négation insolente de son pouvoir fait de la terreur qu’il inspirait. Saïtano souffrit. Ce fut une des plus affreuses minutes de sa vie… Passavant, à ce moment, se mit debout. Il ne riait plus. Le rire de Brancaillon s’arrêta ; puis celui de Bruscaille et de Bragaille ; puis celui de Bois-Redon.
    Le silence fut sinistre.
    Soudain, le chevalier se retourna vers les trois enchaînés et tira sa dague. Ils le virent venir, et il y eut dans leurs yeux une frénétique admiration. C’est sûr, ils

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