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Jean sans peur

Jean sans peur

Titel: Jean sans peur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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s’oublièrent. Ils ne songèrent plus que, quelques minutes avant, ils étaient condamnés. Dans leurs yeux, ce ne fut pas la gratitude éperdue qui débordait de leurs cœurs ; ce fut l’admiration.
    En quelques instants, ils furent libérés. Ils grognèrent on ne sait quoi qui pouvait être un remerciement pour Passavant, ou aussi bien une insulte pour le sorcier. Saïtano n’avait pas fait un geste. Il était hébété. Si la pensée pouvait tuer, la reine, à ce moment, fût tombée foudroyée.
    Cependant, les trois délivrés se frottaient avec énergie pour rétablir la circulation du sang ; mais, cette fois, ils ne songeaient pas à fuir. Ils ne quittaient pas le chevalier des yeux ; ce qu’il ferait, ils le feraient, voilà tout.
    – Sire chevalier, dit la reine en s’avançant, voulez-vous m’escorter jusqu’à l’Hôtel Saint-Pol ?
    – La reine ! murmura Passavant, – et il s’inclina avec autant de grâce que s’il eût été dans la galerie des fêtes le soir où il avait éprouvé pour la beauté d’Isabeau cette capiteuse admiration qui l’avait enivré.
    Il souriait en se redressant. La reine attendait, calme, sérieuse, attentive.
    – Madame, dit Passavant, vous m’invitez à venir en votre palais…
    – C’est pour la deuxième fois que je vous fais cette prière, dit la reine.
    – Une prière ? fit Passavant dont le sourire devint féroce d’ironie. La reine ne prie pas… Elle donne des ordres.
    – Auxquels vous, chevalier, vous désobéissez ! Eh bien, l’ordre que je vous donnai dans la chambre de la demoiselle de Champdivers, je vous le répète ici. Obéirez-vous, cette fois ?
    Passavant salua.
    – Madame, dit-il, donnez-moi donc l’ordre de me tuer. Je verrai si je dois obéir…
    – Vous craignez d’être assassiné chez moi ?
    Passavant se redressa :
    – Oui, madame. Pardonnez-moi… J’ai si peu vécu que je tiens à vivre quelque temps encore, ne fût-ce que pour voir s’il n’y a au monde que perversion et méchanceté.
    Le regard d’Isabeau jeta un éclair. Elle s’avança, souriante, vers la table de marbre, et la toucha de la main. Alors, elle se tourna vers Passavant, et son attitude terriblement sérieuse le fit frissonner.
    – Vous étiez là ! dit-elle avec une majesté imposante et lugubre. Si j’eusse voulu vous tuer, je n’avais même pas à en donner l’ordre. Je n’avais qu’à laisser faire. Je n’avais qu’à me taire. Je viens de vous sauver la vie… Mais vous ne me devez rien, pas même un peu de cette politesse française qu’on m’avait tant vantée ; en effet, vous m’avez sauvée, vous, dans la forêt de Vincennes ; nous sommes donc quittes. Vous êtes un bon calculateur, monsieur, et vous avez le droit de refuser à une femme l’appui de votre épée. Adieu. Viens, Bois-Redon.
    Ces paroles produisirent sur le chevalier un terrible effet. Il devint très pâle.
    – C’est elle qui m’a sauvé, songea-t-il. C’est sûr. Impossible qu’il en soit autrement.
    – Madame, ajouta-t-il en s’avançant vers Isabeau, daignez me pardonner ce manque de courtoisie. Je suis à vous, et vous escorte jusqu’à l’Hôtel Saint-Pol. Sorcier, ouvre les portes !
    Il tendit la main à Isabeau qui y appuya la sienne.
    – J’eusse bien suffi… commença Bois-Redon en grondant comme un chien qui voit donner une caresse à un confrère nouveau venu.
    Mais la reine le foudroya du regard. Saïtano, chancelant, livide, s’avança et ouvrit successivement les portes. Derrière la reine et Passavant venait Bois-Redon. Derrière Bois-Redon, clopin-clopant et encore tout endoloris, plus ébaubis encore, venaient Bruscaille, Bragaille et Brancaillon. Le capitaine les désigna à la reine et dit :
    – Est-ce que ceux-ci font partie de l’escorte de Votre Majesté ?
    – Ceux-ci… fit la reine.
    – Ceux-ci sont mon escorte, dit le chevalier sans qu’on pût savoir s’il parlait sérieusement.
    Une minute plus tard, ils étaient dans les rues de la Cité. Saïtano, lentement, referma sa porte. Ses mains tremblaient. Ses dents claquaient. Quand il eut fini, il voulut se diriger vers l’escalier qui montait à sa chambre où nous avons vu Laurence d’Ambrun. Mais à mi-chemin, il vacilla tout à coup, et s’affaissa, évanoui. Gérande le souleva, l’assit dans un fauteuil. Elle ricanait :
    – Je vous l’avais bien dit, que vous aviez tort de relâcher le chevalier de Passavant !
    La reine se

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