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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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avait aiguisé en elle le sens de la survie.
    Rose s’attacha donc à rebâtir sa vie. Pour cela, il fallait quitter Fontainebleau, qui finissait par ressembler à un couvent. À l’automne, elle laissa le marquis et Mme Renaudin à leurs soirées au coin du feu et regagna Paris et son hôtel de la rue Saint-Dominique.
    La première protection était l’argent, quand on vous en laissait en avoir. Les biens d’Alexandre de Beauharnais étaient sous séquestre, mais la rente de 5 000 livres pour elle et ses enfants était garantie par le marquis. C’était à peine assez pour vivre, à la condition de rester recluse à Fontainebleau. Et il fallait subvenir aux besoins d’Hortense, inscrite à l’Institution nationale Saint-Germain que tenait Mme Campan. Eugène, lui, avait été engagé par le général Hoche comme aide de camp ; il avait à peine quatorze ans, et c’était tôt, sans doute, pour la carrière des armes, mais le général avait assuré sa mère qu’il serait comme un père pour le fils de son ancien supérieur.
    Car Rose avait revu Hoche. Elle se sentait redevable à son égard : là-bas, aux Carmes, il l’avait aidée à garder sa raison et à porter un coeur trop lourd. Il était beau, tendre et altier à la fois. Et, en dépit de l’échec de son mariage, elle avait pris le goût d’une présence masculine dans son monde. Il avait donc passé quelques nuits discrètes rue Saint-Dominique, partant à l’aube pour rejoindre sa caserne. Mais il était de nouveau en campagne, là-bas à l’est. Et les chambres de la rue Saint-Dominique redevinrent bien désertes.
    Elle rouvrit son salon avec les relations et les amis qui demeuraient. Ce ne fut pas trop malaisé : le Paris thermidorien brûlait de retrouver une vie normale et d’oublier les sueurs de sang de la Terreur. Thérésa Cabarrus ouvrit les bras à son ancienne compagne de captivité ; ce fut un cadeau et il redonna à Rose le goût de vivre.
    Thérésa formait avec son protecteur Tallien le couple le plus célèbre du moment ; dès qu’ils apparaissaient ensemble, la foule les acclamait, comme cela advint un soir au théâtre de l’Odéon, où le public se leva et leur fit une ovation. Nul ne doutait plus, même pas elle-même, que, par son influence sur Tallien, elle avait sauvé la République et la France. On la surnomma « Notre-Dame de Thermidor ». Ils incarnaient la fin de l’horreur et le renouveau de l’espoir. La beauté de Thérésa rayonnait sur les révolutionnaires radoucis, sa féminité les ravissait, son excentricité les amusait. Elle y prospérait aussi : leurs nouvelles fonctions valaient à ces héros républicains des ressources également nouvelles, dont certains usaient parfois sans beaucoup de discrétion.
    Le 26 décembre 1794, au soir de son mariage avec son libérateur, Thérésa donna une fête mémorable dans sa nouvelle demeure. Celle-ci se trouvait dans l’allée des Veuves {4} , quartier de réputation douteuse, mais qu’importait, tout Paris y fut, Barras, Fréron, Sieyès, plus une vaste coterie de muscadins et de merveilleuses, qui arrivaient dans des voitures légères à deux roues, qu’on appelait des « bokays », de l’anglais boogie .
    Rose apparut aux côtés de Thérésa. Ou plus exactement, Paris eut alors la révélation de Rose. La gloire de l’une rejaillit sur l’autre.
    « La Chaumière », du nom que Thérésa avait donné à sa maison, devint la capitale de la capitale. On n’y parla d’abord que de fêtes et de mode. Mais les deux femmes allaient y changer le visage de la France.
    Ce fut ainsi que Rose retrouva un soupirant de renom, Gabriel Louis, marquis de Caulaincourt. Il fondit d’amour et la couvrit de cadeaux. Mais à cinquante-cinq ans, et podagre, il ne présentait pas exactement le visage de l’amour, d’ailleurs il était marié, père de cinq enfants. Il devint pressant, parla de plus en plus souvent de divorcer pour épouser Joséphine. Elle s’inquiéta ; un tel mariage, en effet, lui vaudrait cinq ennemis, les enfants, plus l’épouse qui serait abandonnée. Les risques étaient grands, elle mit donc fin à cette liaison. Elle portait déjà ses regards sur un galant moins dangereux : c’était un familier des Tallien, l’ancien régicide Barras, sans doute le plus représentatif des thermidoriens, cette nouvelle classe de notabilités qu’un esprit malveillant avait ainsi décrits : « mains rouges et visage poudré ».

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