Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
Vom Netzwerk:
ahuris, incrédules, hagards.
    Dans l’après-midi, à la fenêtre d’une maison qui faisait face à la prison, une femme se livra à une étrange pantomime. Elle agitait sa robe. Était-elle folle ?
    — Robe ? Robe ? lui cria-t-on.
    Elle hocha énergiquement la tête et jeta une pierre dans son jupon.
    — Pierre ?
    Elle hocha la tête derechef. Et elle se passa la tranche de la main sur le cou en sautant de joie.
    Robe ? Pierre ? Robespierre ! Ç’avait bien été lui ! Le chien enragé vomi par les Enfers avait donc été décapité.
    Des visiteurs confirmèrent la nouvelle à des prisonniers : Maximilien de Robespierre avait été guillotiné avant midi, en compagnie de son frère, de Couthon, de Saint-Just et de dix-neuf autres bêtes sauvages de sa horde.
    Cette nuit-là, Rose dormit à même le sol. Le lendemain, on lui rapporta son lit. Elle n’y dormit pas longtemps, car elle était brisée, mais elle y dormit quand même plus paisiblement.
    Le 12 thermidor au matin, un bruit de foule alerta les prisonniers. Ils s’inquiétèrent. Un geôlier vint ouvrir la porte du cachot de Thérésa Cabarrus. Mais cette foule ?… Aurait-on dressé un échafaud devant les Carmes ? Point, des vivats retentirent, des cris de joie fusèrent. Quelques prisonniers virent la belle Thérésa portée en triomphe sur les épaules des manifestants.
    — Et moi ? se demanda Rose.
    Hoche lui assura qu’ils seraient tous libérés avant peu. Le 18 thermidor au matin, leurs levées d’écrou leur furent signifiées. Ils échangèrent un baiser rapide et fébrile. Elle serra son ballot, sortit des voûtes sinistres et froides de sa prison, et les larmes jaillirent de ses yeux à la vue du grand ciel bleu. Elle ne fut pas portée sur les épaules d’une foule, non, elle courut à pied à l’hôtel de Salm, où ses enfants étaient aux soins de leur gouvernante, Mlle Lannoy ; elle emprunta à Calmelet de quoi payer une chaise de poste et les emmena à Fontainebleau.
    Elle craignit d’avoir laissé aux Carmes une partie de sa raison. Le retour à la réalité était brutal.

 
    6
 
« Trois jeunes soldats… »
    La tuerie avait cessé. Écoeurée par les bains de sang qui duraient depuis des mois, la Convention avait repris la main, banni les robespierristes et rendu le pouvoir à l’Assemblée. En quelques heures, Rose l’apprit dans les jours qui suivirent, le chef de la rue, Robespierre, avait perdu et le pouvoir et la tête. Les nouveaux prisonniers furent ses partisans. Quelques charrettes roulèrent après la sienne vers l’échafaud, place de la Révolution.
    Paris et la France respiraient enfin. Comment ce retournement s’était-il opéré ?
    Ce n’étaient pas des héros qui avaient sonné l’heure de la réaction, non, d’anciens partisans, Billaud-Varenne, Collot d’Herbois, Tallien, maître de l’échafaud bordelais, des gens qui avaient fidèlement voté la réélection de l’infâme au Comité de salut public. La Terreur avait fini par terroriser les terroristes eux-mêmes. À la violence, ils n’avaient alors eu d’autre recours que d’opposer la violence, illustrant la phrase de l’Évangile, comme le rappelait doctement le marquis de Beauharnais :
    « Celui qui vainc par l’épée périra par l’épée. »
    S’ajoutaient des imprécations interminables contre l’infamie de la plèbe et l’ignominie apocalyptique de Robespierre.
    — Que n’a-t-il émigré, lui aussi ! se lamentait-il sans fin, songeant à Alexandre.
    Informés que la vicomtesse avait échappé à la prison des Carmes, les rescapés accoururent à Fontainebleau, chacun avec sa hotte d’anecdotes et de révélations. Larmes, embrassades, exclamations emplirent des soirées entières. Le marquis fut ainsi distrait provisoirement du chagrin causé par l’exécution de son cadet.
    Rose apprit à cette occasion que, à la libération des prisonniers des Carmes et d’autres prisons, avait succédé une rafle de robespierristes et de jacobins sous la conduite des gardes nationaux. Elle n’avait été libérée que six jours après Thérésa Cabarrus ; pourquoi ? Deux ou trois regards entendus le lui expliquèrent : le citoyen Jean-Lambert Tallien portait un intérêt particulier à la jeune femme. Voire, la prison des Carmes n’avait été ouverte que pour libérer Thérésa.
    L’enfer, le vrai, est sans issue. Celui que Rose avait traversé lui laissait une leçon, celle de la folie humaine. Et il

Weitere Kostenlose Bücher