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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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occupation anglaise, il était presque impossible de faire rapatrier de l’argent directement en France. Mme Tascher de La Pagerie était-elle encore en vie ? Rose lui avait écrit trois lettres affectueuses, l’engageant à la rejoindre à Paris ; elles étaient restées sans réponse. À la fin, un commerçant de Dunkerque, M. Emmery, qui avait des affaires avec l’île, s’entremit. Il l’assura que sa mère était en bonne santé et que le moyen le plus sûr de faire venir de l’argent de là-bas serait d’acheminer les fonds à Hambourg. Cela prendrait de nombreuses semaines.
    Entre-temps, un épisode apparemment négligeable était survenu. Barras avait, à l’une de ses soirées, en mai 1795, présenté à Rose trois jeunes militaires, Andoche Junot, Auguste Marmont et Napoleone Buonaparte. Un regard suffisait pour s’aviser qu’ils n’en menaient pas large : leurs uniformes étaient râpés, ils étaient maigres et, à l’exception de Junot, qui était de surcroît joli garçon, ne payaient franchement pas de mine. D’ailleurs, ils étaient sans poste.
    Le plus petit et le plus maigre, grosse tête aux cheveux gras, jambes grêles et bréchet creux, la peau gâtée par une gale récente, le Corse Buonaparte, la mangeait des yeux.
    Faute de mieux, il fit honneur au repas.

 
    7
 
« Tout vous conduit à lui… »
    La République a été ingrate à son égard. Ce garçon vaut « bien mieux que son sort. »
    Lors d’une conversation au matin, autour d’une tasse de café et de petits pains au lait, Barras avait tracé des portraits rapides des trois militaires qu’il avait invités la veille et d’abord du jeune Corse.
    — Il a gagné son grade de général au siège de Toulon et il a été remarquable tacticien pendant la campagne d’Italie.
    Car Buonaparte était donc général, mais seulement de brigade. Il est vrai que les armées de la République en comptaient cent soixante-douze.
    — Mais pourquoi la République est-elle donc ingrate ?
    — Parce qu’il a trop brillé au moment de la Révolution, répondit Barras avec un fin sourire. Il a même été incarcéré au fort Carré, à Antibes. C’est moi qui l’en ai fait sortir.
    L’explication était moins paradoxale qu’il y paraissait : lors du siège de Toulon, le Corse s’était lié au frère cadet de Robespierre, Augustin, personnage influent à qui il devait sa promotion au grade de général. Les muscadins, comme on nommait aussi les thermidoriens, lui reprochaient donc une amitié désormais suspecte, puisque la tête d’Augustin avait roulé dans un panier de son quelques minutes après celle de son frère.
    — Certains lui tiennent aussi rigueur d’avoir bénéficié des largesses de la Convention, ajouta Barras.
    — Il ne semble pas rouler sur l’or, pourtant ?
    — Non, il est vrai. Mais quand lui et sa famille ont dû quitter la Corse à cause de ses opinions par trop jacobines, il a demandé une compensation. Et nous lui avons accordé 600 000 livres.
    — 600 000 livres ! Mais il est maigre comme une rame à pois !
    Barras sourit.
    — Il a une grande famille. Cet argent n’est pas perdu pour tout le monde.
    Elle n’y pensa plus. Il y avait tant de fêtes…
    Elle ne pouvait manquer cependant de noter que l’humeur de la capitale, qui avait été joyeuse des débuts de la réaction thermidorienne, avait cédé le pas à une véhémence alarmante dans les propos.
    — Ils veulent restaurer la royauté, lui déclara Thérésa.
    — Ils ? De qui veux-tu parler ?
    — Les muscadins.
    L’idée parut à Rose aussi folle que l’avait été l’abolition de la royauté.
    — Mais ils déclencheraient une guerre civile !
    — C’est bien ce que craint Jean-Lambert.
    Au retour de l’une des visites de Rose à Fontainebleau, début fructidor 1795, le cocher fut contraint de faire un détour pour éviter un cortège de manifestants se dirigeant vers les Tuileries ; or c’était dans ce palais que siégeait la Convention. Un coup d’oeil par la portière révéla à la passagère que les mécontents étaient principalement des muscadins ; ces derniers s’en prenaient-ils donc au pouvoir ? Elle ordonna au cocher de passer d’abord par la Chaumière de Thérésa. Elle apprit de celle-ci qu’avant de se dissoudre la Convention avait décrété que les deux conseils du nouveau gouvernement, celui du Directoire, devraient être constitués aux deux tiers d’anciens

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