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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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membre de la famille Buonaparte n’eût été invité à la cérémonie ? Joseph et Lucien, les frères de Napoléon, étaient à Paris ; c’était quand même étrange qu’ils fussent absents.
    Barras s’alarma et Tallien fit quand même déboucher une bouteille pour étancher la soif. Les autres s’interrogeaient, mais du regard, n’osant penser l’impensable : un marié qui fait faux  bond à ses noces, cela s’était déjà vu. Comme pour ajouter au désarroi, l’officier Leclercq déclara qu’il ne pouvait s’attarder davantage et que son adjoint Collin-Lacombe le remplacerait si le marié paraissait enfin. Il s’en alla donc.
    Les chandelles brûlaient jusqu’aux bobèches et plusieurs s’étaient d’ailleurs éteintes. Celle qui vacillait dans un chandelier d’étain sur le bureau semblait un symbole de l’espoir qui défaille.
    À 21 h 30, Joséphine, défaite, demanda faiblement s’il ne convenait pas de remettre la cérémonie. Barras conseilla de donner au général quelques moments de grâce de plus. Cependant, les aiguilles du cartel sur la cheminée poursuivaient leur course inexorable. Le doute de Joséphine se changeait en dépit.
    À 21 h 55, elle dit :
    — Bon, je crois que c’est partie remise.
    Le fracas d’un attelage dans la rue attira l’attention de Calmelet, puis un bruit de bottes dans l’escalier fit tourner les têtes. La porte s’ouvrit : Napoléon Buonaparte était arrivé. Quelques personnes présentes qui s’étaient assoupies dans des sièges, y compris le jeune Lemarois, se réveillèrent brusquement. Buonaparte bredouilla quelques excuses incompréhensibles et Collin-Lacombe prit place derrière le bureau.
    Buonaparte joignit les documents nécessaires le concernant à ceux qui étaient déjà sur le bureau et somma Collin-Lacombe de procéder rapidement au mariage.
    Celui-ci lut donc les documents à la hâte.
    On l’apprendrait plus tard, ils étaient tous faux. Buonaparte y était déclaré né le 5 février 1768 ; or la vraie date était le 15 août 1769, un an après le rattachement de la Corse à la France ; il s’était donc vieilli de quelque dix-huit mois et prétendait avoir vingt-huit ans, alors qu’il n’en comptait qu’un peu plus de vingt-six. De fait, il avait falsifié l’acte de naissance de son frère Joseph et, mensonge supplémentaire, prétendait être né à Paris, alors que c’était à Ajaccio. De surcroît, il était dit « sans domicile », alors qu’il demeurait au ci-devant hôtel Bertin, rue Neuve-des-Capucines. Mais il est vrai qu’il avait beaucoup changé de domicile ces derniers temps, louant dans des hôtels borgnes des chambres à 3 francs le mois, qu’il partageait parfois avec son camarade Andoche Junot. Barras leva les sourcils à l’énoncé de tous ces mensonges, mais les rabaissa rapidement.
    Arguant de la difficulté d’obtenir des documents de la Martinique, sous tutelle anglaise, Joséphine pour sa part avait fait aussi bien : elle avait donné la date de naissance de feu sa soeur cadette Manette, 1767, se rajeunissant par là de quatre ans, puisqu’elle était née en 1763. Elle n’avait pas pris garde au fait qu’elle aurait conçu Eugène à treize ans !
    Les mariés prétendaient donc avoir tous deux vingt-huit ans. Mieux : Collin-Lacombe, commissaire de la République, n’était pas habilité à célébrer les mariages et Lemarois, mineur, ne pouvait être un témoin légal.
    Qu’importait, la calèche emporta rapidement les nouveaux époux rue Chantereine. Les témoins suivirent et l’on soupa avec trois heures de retard.
    La lune de miel fut brève : deux jours plus tard, le 21 ventôse de l’an IV, Napoléon Buonaparte partit pour Nice, afin d’y prendre le commandement de l’armée d’Italie. Il avait, juste avant les adieux, exigé que son épouse lui remît une lettre pour sa mère, qui se trouvait à Marseille.
    Joséphine fut soulagée ; elle pouvait à la fois reprendre haleine et sa vie de plaisirs. Elle renouvela aussi le cercle de ses amis, à l’exception de Thérésa. Elle alla moins souvent chez Mme de Château-Renaud, par exemple, parce que Barras y était trop souvent et, quant à ce dernier, elle ne se rendit plus du tout à ses fêtes, par crainte du qu’en-dira-t-on.
    Elle avait compté sans le destin. La gloire militaire de son ardent époux allait rapidement forger autour d’elle les barreaux d’une cage dorée.
    Parvenu à Nice le 26 mars

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