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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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Directoire – car ce dernier, intimidé par la gloire et l’autorité croissante du « petit caporal », ne donnait plus d’ordres, mais se bornait à « conseiller » –, Bonaparte, donc, devait rassembler les armées du Rhin, commandées par Hoche, Moreau et Jourdan, et la sienne. Fin mars 1797, il se trouvait à quelque 150 kilomètres de Vienne : une petite semaine de marche. Hoche et Moreau avançaient le long du Danube : les deux armées arriveraient donc en même temps dans la capitale autrichienne.
    Hoche, l’un des amants de Joséphine et l’homme qu’il avait publiquement humilié, un soir à la Chaumière, partagerait donc la victoire avec lui.
    Non.
    Napoléon perça alors en Bonaparte : il dépêcha le général Leclerc aux chefs des armées du Rhin pour leur ordonner d’arrêter l’offensive. C’était une décision entièrement personnelle, prise sans aucune consultation du Directoire. Il venait de faire des ouvertures de paix à l’Autriche ; il signa les préliminaires d’armistice à Leoben, en Styrie : l’Autriche devrait renoncer aux deux provinces de Belgique et de Lombardie et, dans une clause secrète, la France lui concédait la République de Venise ; or cette « concession » n’avait aucun sens, Venise étant restée neutre jusque-là.
    Puis il se dirigea vers la Sérénissime.
    Le comportement de l’armée d’Italie y fut calamiteux : la ville fut mise à sac. Son valeureux général ne lui avait-il pas promis qu’elle pourrait s’enrichir dans les villes prospères qu’elle conquerrait ? Déjà, Bonaparte avait, par un acte d’autorité inique, démis le doge, qui n’avait pourtant aucun tort ; il fit saisir le Lion de Saint-Marc et les chevaux byzantins qui ornaient la façade de la basilique, il rafla les trésors de l’Arsenal et bien d’autres, et expédia le tout à Paris. Ses soldats, eux, emplissaient des convois entiers de leurs butins.
    À la vérité, ces rapines n’étaient pas nouvelles ; déjà en entrant à Parme, Bonaparte avait fait saisir vingt tableaux qui avaient été expédiés au Louvre. Il en avait fait autant dans les autres villes. Mais les destructions commises dans la Sérénissime et le sac qui s’ensuivit dépassaient les bornes ; ils entachaient l’honneur de la République. Bonaparte était-il devenu le chef d’une bande de brigands agissant à leur guise ? Paris se scandalisa.
    Informé que le Directoire et les deux assemblées s’indignaient de ses initiatives arbitraires et du fait qu’il ne prenait plus ses ordres à Paris, Bonaparte feignit une grande colère, ce qui devint l’un de ses stratagèmes ; il proposa sa démission. Qu’on nommât donc son successeur immédiatement ! Or il savait trop bien sa popularité à Paris ; elle était inégalée depuis Vercingétorix. Ses partisans clamaient qu’en se retenant d’attaquer l’Autriche, il n’avait voulu que la paix. N’avait-il pas servi la République ? Quant aux prétendus pillages, poursuivaient-ils, ils répondaient au droit de la guerre et Bonaparte avait tout envoyé au Directoire.
    Il était vrai qu’un soir, en plein dîner d’apparat, Barras avait vu des officiers lui apporter en grande pompe la Vierge noire de Notre-Dame de Lorette. Une fois passée la stupeur des convives, les directeurs avaient plaisanté, et Barras avait déclaré que Bonaparte avait bien envoyé la statue miraculeuse, mais qu’il en avait gardé les vêtements.
    L’évidence s’imposait : si les directeurs démettaient Bonaparte, ils déclencheraient des manifestations dangereuses. Pichegru les avait prévenus : s’ils croyaient que Bonaparte était leur homme lige, ils se trompaient ; il les mangerait.
    Ils ravalèrent donc leurs prétentions à l’autorité. Personnellement, ils avaient d’ailleurs peu de raisons de se plaindre, surtout financièrement : depuis la prise de Mantoue, place forte immensément riche, l’or de l’Italie coulait directement vers le palais du Luxembourg, et les finances de la France, qui étaient en piteux  état, n’auraient pu s’en trouver mieux. Les députés, qui ne se rebiffaient pas tous contre les abus de pouvoir du général, proposèrent de lui donner le surnom d’« Italique ».
    L’aigle déployait ses ailes.
    L’oiseau des îles, cependant, n’avait pas changé. Il croyait toujours chanter dans les bosquets fleuris des tropiques.

 
    13
 
Le trop long été d’Italie
    Bonaparte était-il devenu

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