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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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provocations manigancées par les agents français, le général Léonard Duphot avait été assassiné à Rome par des extrémistes italiens. Le pape Pie VI avait bien présenté des excuses officielles, mais Joseph, se déclarant menacé, avait quitté Rome. Et Berthier, nouveau chef de l’armée d’Italie, avait occupé la Ville éternelle ; la soldatesque s’en était alors donné à coeur joie, pillant et saccageant à l’envi le siège supposé de la superstition ultramontaine.
    La France éclairait le monde une fois de plus !
    À Paris, Bonaparte faisait l’objet d’une vénération frisant le culte. Pendant l’absence de Joséphine, il avait dû subir le siège des admirateurs, autant dire des importuns, y compris celui d’une femme d’influence, un bas-bleu sans tact, Germaine de Staël, la fille du ministre Necker. Celle-ci lui avait écrit en Italie une lettre exaltée autant que déplacée où elle lui déclarait que son âme de feu était prédestinée pour l’adorer et qu’il se raviserait bientôt de son union erronée avec « une beauté insignifiante ». À l’évidence, l’ambitieuse matrone espérait bientôt supplanter Joséphine dans le coeur du héros. Elle ne réussit qu’à s’attirer la hargne de celui-ci.
    Autre témoignage de la vénération publique : au soir du 8 nivôse de l’an VI, des maçons vinrent changer la plaque de la rue Chantereine, que le département de la Seine avait décidé de renommer rue de la Victoire, en l’honneur de son illustre habitant, sous le prétexte de « faire disparaître tous les signes de la royauté qui pouvaient se trouver dans son arrondissement, voulant ainsi consacrer le triomphe des armées françaises ». Pure manifestation d’ignorance : le nom de la rue n’avait rien dû à une reine quelconque, mais aux grenouilles des jardins environnants ; la chantereine était, en effet, un batracien, cousine de la reinette, laquelle ne règne que sur les étangs.
    Peu importait.
    Sa faveur publique fouetta en Bonaparte une impatience de tous les moments. Quoi qu’elle dût à la solitude sentimentale et à la possessivité conjugale, cette fièvre était surtout inspirée par les calculs de l’ambition : il avait besoin de Joséphine pour les réaliser ; elle était sa messagère la plus sûre auprès de son seul véritable protecteur, Barras. Outre quelques propos d’une étonnante muflerie qu’il tint plus tard à Sainte-Hélène (il prétendit qu’à Paris il s’était enquis d’une femme riche et que c’était la raison pour laquelle il avait choisi Joséphine, ce qui prouve au moins qu’il fut mal informé), Bonaparte reconnut aussi sa dette à l’égard de sa femme :
    — La circonstance de mon mariage avec Mme de Beauharnais m’a mis en point de contact avec tout un parti qui m’était nécessaire pour concourir à mon système de fusion, un des principes les plus grands de mon administration… Sans ma femme, je n’avais jamais pu avoir avec ce parti aucun rapport naturel.
    Cet amphigouri opaque dit bien qu’en plus d’une forte attraction sexuelle pour Joséphine, « une vraie femme », disait-il, Bonaparte se servait aussi d’elle pour sa conquête du pouvoir.
    L’adulation populaire était sans doute immense, il l’avait vérifié lors de la cérémonie organisée à son retour au palais du Luxembourg : tout Paris avait été là, et, quand il s’était présenté, dans un simple costume noir devant les cinq Directeurs dans leurs magnifiques tenues d’apparat, drapés de toges rouges, les vivats étaient montés jusqu’au ciel :
    — Vive la République ! Vive Bonaparte !
    Talleyrand l’avait célébré comme « fils et héros de la Révolution ». Mais les lauriers de ses victoires ne lui conféraient aucun pouvoir formel ; bientôt, ils se faneraient ou, pis, des revers militaires en arracheraient les feuilles.
    Il aspirait à être Directeur. Ou plus.
    C’était une idée folle : un Directeur devait avoir quarante ans au moins, et il n’en avait que vingt-huit. Il faudrait récrire la Constitution pour l’élever à ce rang. Mais, d’abord, il fallait y préparer les esprits. Et Joséphine était l’un de ses plus grands atouts dans son projet.
    Il le mesura au bal deux fois reporté par Talleyrand à l’hôtel de Gallifet, siège du ministère des Relations extérieures. Dès l’arrivée de Joséphine rue de la Victoire, un messager courut, sur l’ordre de Bonaparte,

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