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Joséphine, l'obsession de Napoléon

Joséphine, l'obsession de Napoléon

Titel: Joséphine, l'obsession de Napoléon Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gérald Messadié
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notre affaire sera conclue, je ne veux pas le voir ce soir.
    Joséphine attendit, elle aussi, le retour de Bourrienne. Elle écouta son rapport derrière la porte entrebâillée :
    — … Il m’a regardé dans les yeux et m’a dit : « Je vois que Bonaparte s’est joué de moi. Il ne reviendra pas. C’est fini. Et pourtant il me doit tout. »
    Pour elle aussi, c’était la fin d’un chapitre.

 
    20
 
Un 18 brumaire qui fut un 19
    Dès le petit matin, la rue de la Victoire et le quartier résonnèrent de bruits de sabots, de bottes, de cliquetis d’éperons et de sabres. Des officiers de toute arme avaient investi les parages. Les généraux étaient en grande tenue. La plupart n’avaient d’autre raison d’être là que l’invitation de Bonaparte à venir le saluer. Ils devinèrent qu’un événement important se préparait, sans savoir lequel ni comment il se produirait, mais ils se doutaient bien que c’était le coup dont on parlait depuis tant de semaines. Exception bizarre dans une situation qui ne l’était pas moins, seul Bernadotte était en civil. Plusieurs se rendirent à l’hôtel des Bonaparte et furent reçus par le général ou Joséphine. Ils furent bientôt trop nombreux pour les salons et sortirent battre la semelle dans le jardin glacé.
    Roustam, le mamelouk que le général avait ramené d’Égypte et qui lui servait tantôt d’aide de camp et tantôt de valet à tout faire, servit le thé et le café.
    Tous ces militaires ignoraient que, sur l’ordre de Moreau et de Jourdan, les dragons du régiment de Sebastiani étaient sortis de leur caserne, à l’hôtel de Soubise, sous le motif évidemment fictif de se préparer pour une parade ; ils se rendirent non loin de la rue de la Victoire ; en réalité, ils étaient là pour protéger l’hôtel Bonaparte d’une attaque imprévue. De qui viendrait-elle ? Par exemple des grenadiers de la garde du Directoire, tous jacobins convaincus.
    À l’hôtel Bonaparte, on attendit Gohier. Quand il serait là, il servirait d’otage. Car, s’il se retrouvait au Luxembourg avec
    Barras et Moulin, il détiendrait la majorité contre Sieyès et Ducos ; se voyant évincés, les trois hommes pourraient entraver le déroulement du coup.
    À 8 heures, consternation : ce fut Mme Gohier qui se présenta. Sans son mari ; il avait eu le nez creux. Joséphine offrit le café et des biscuits à la visiteuse et tenta de la convaincre de retourner au Luxembourg et de ramener son mari. Quand elle fut partie, Bonaparte envoya un message à Talleyrand, le chargeant d’aller convaincre Barras de se démettre.
    À 9 heures, une voiture déposa devant l’allée qui menait à l’hôtel Bonaparte deux inspecteurs et un huissier. Bonaparte les reçut : ils lui remirent un décret du Conseil des Anciens le nommant général en chef de la place de Paris. Réuni en urgence et déjà favorable à Bonaparte, ce conseil, probablement à l’instigation de Lucien Bonaparte, avait en effet pris deux décisions ; la seconde était le transfert des deux assemblées à Saint-Cloud.
    Tenant le décret en main, Bonaparte s’adressa aux militaires : il leur demanda de l’aider à sauver la République. Une ovation monta, les épées tirées de leurs fourreaux se dardèrent vers le ciel. Sur quoi Bonaparte monta à cheval et prit la direction des Tuileries. Les troupes se mirent en ordre pour l’accompagner.
    Joséphine, de la maison, observa Bernadotte dans le jardin, décontenancé. Évidemment, il ne se joindrait pas aux autres.
    Quant à elle, il ne lui restait qu’à prier le ciel qu’il fût propice à son époux. Son monde ancien était foulé aux pieds par Bonaparte. Elle ne reverrait pas de sitôt Gohier, Barras ni les autres galants d’antan.
    Et elle attendit les informations.
    Elle ne pouvait imaginer le formidable raz-de-marée d’émotion qui se déclencha sur le passage de Bonaparte, de la rue de la Victoire aux Tuileries. Lorsqu’il apparut dans le matin froid de novembre, suivi par une mer de soldats en uniforme, quand les escadrons de cavalerie disposés par Murat se joignirent à ce cortège, les passants l’acclamèrent : le conquérant de l’Italie et de l’Égypte reprenait sa place de héros. Les vivats fusèrent. La foule lui emboîta le pas et s’amassa ainsi autour du Luxembourg.
    De l’intérieur du palais les Directeurs assiégés comprirent ce qui se passait ; ils n’avaient rien vu venir. Et pour cause :

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