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Journal de Jules Renard de 1893-1898

Journal de Jules Renard de 1893-1898

Titel: Journal de Jules Renard de 1893-1898 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Renard
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savais qu'on allait protester, avoir trop flatté pour qu'on me flatte.
Je ne suis qu'un misérable, je le sais. Je n'en suis pas plus fier. Je le sais, et je continuerai
Au théâtre, trop remué la tête de droite et de gauche, comme un bouvreuil, pour faire déjà des agaceries à ma jeune gloire. Revenu toujours trop vite sur mes impressions. Trop lu les articles de Coppée pour me prouver que je suis plus malin que lui.
Et je me frappe la poitrine, et, à la fin, je me dis : « Entrez ! », et je me reçois très bien, déjà pardonné. Trop vanté les petites revues que je n'ouvre jamais, et trop méprisé les journaux dont je lis quatre ou cinq chaque jour. Trop parlé de ma génération, et trop caché l'âge que j'ai. Trop parlé de Barrès et pas assez « écrit » son nom.
Trop bu de chartreuse.
Trop dit : « le bien que je pense... » au lieu de : « le mal que je pense... ».
3 janvier.
- « Quand je serai grande », dit Baïe, « j'aurai pas de maman et je boirai de la goutte ».
    Le vieux naturaliste étudie les moeurs et le travail des fourmis dans ses jambes.
Capus, l'ex-boulevardier, le sceptique, etc. Tâche de gagner beaucoup d'argent pour le donner à son frère qui est sans place, marié, papa, et qui a une belle-mère. (Voir leur odyssée dans Années d'aventures.) Il est tout près d'avoir eu un article de Muhlfeld dans La Revue blanche.
- Voilà, dit-il, que je pénètre enfin dans le vrai milieu littéraire, celui de La Revue Blanche et du Mercure de France. J'avais commencé par le vrai public. Vous, vous faites l'inverse.
- Oui, dis-je, mais le grand public me laisse encore de côté.
Tout fier aussi d'être au Figaro et que M. de Rodays l'appelle cher maître.
Il m'emmène dans son cabinet de travail où il écrit en un quart d'heure son Graindorge qu'il envoie par son groom à L'Écho de Paris. Il écrit quelquefois de haut sur une planche qu'il a sous le nez, à cause de sa myopie. Parmi ses livres, je vois du Taine, de l'Herbert Spencer et les études de Brunetière sur Bossuet.
15 janvier.
Visite au Jardin d'acclimatation.
Des phoques se poussent gauchement des coudes, petites oreilles pincées, leur gueule rose plantée de chicots noirs.
    De toutes petites perruches comme les épingles de cravate qui chantent.
Les sorties de bal des hamadryas, leur manière d'éplucher des pommes de terre froides, et leur hurlement subit et prolongé à pleine gueule ouverte.
18 janvier.
Un bon mot vaut mieux qu'un mauvais livre.
19 janvier.
Le Désert. - Pierre Loti, comptez-moi parmi vos frères de rêve, de doute et d'angoisse. Me voilà : marchez devant moi, je vous suis.
Est-ce qu'on ne va pas bientôt s'asseoir ? Est-ce qu'on ne va pas bientôt arriver ? Tapez un peu sur le chameau.
Toi qui portes un vrai costume d'Arabe, je te suivrai dans ma robe de chambre.
Cheminé... Cheminé... Mais pourquoi n'avez-vous pas joint une carte à votre livre ? Il me faut garder sous les yeux mon petit atlas de poche.
Arrivés... Arrivés... enfin... enfin.
Arrêtons-nous, hommes de la tente. L'homme des maisons de pierre s'exaspère.
Comment se fait-il donc qu'on connaisse toutes les bonnes actions discrètes ?
On tira des coups de fusil dans sa fosse pour lui rendre les honneurs militaires.
    - Mais ils vont le tuer ! criait la mère.
21 janvier.
L'air où je vis est tout gris.
28 janvier.
Voyage à Bologne. - Tous ces petits villages sous la neige, comme enveloppés de fourrures blanches.
Il y avait quelques toilettes, la demoiselle du sous-préfet beaucoup de vides et, au parterre, quelques spectateurs qui changeaient à chaque instant de banquettes, en crachant.
On me disait : « Comment le trouvez-vous, notre petit théâtre ? »
- Oh ! très gentil. On n'en voit pas beaucoup comme ça en province. M. Repin avait un grand col aux cornes menaçantes, Gaillardon, un petit gilet de couleur et un chapeau de soie dorée. Henriette était plus grande que Marie, et la servante, décolletée, portait de gros sabots blancs avec de la paille qui sortait, qui sortait !...
Et toujours Docquois me répétait qu'il n'avait que ça, mais qu'il avait sûrement le sens du théâtre, que La Demande était très scénique, et que, Pour la Couronne, c'était d'un art qui avait déjà des cheveux blancs.
Or, il arriva que nos acteurs n'avaient pas mangé aux répétitions et, pour faire honneur aux auteurs parisiens, le jeune et intelligent directeur fit servir, le soir de la première, - la dernière - un repas

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