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Kenilworth

Kenilworth

Titel: Kenilworth Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Walter Scott
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l’aimable comtesse, quoique osant à peine s’exposer à entendre de nouveau une demande qu’il lui coûtait de refuser, mais que la conversation qu’il venait d’avoir avec son premier écuyer l’avait déterminé à ne pas accepter.
    Il la trouva revêtue d’une simarre de soie blanche doublée de fourrure, son petit pied introduit à la hâte dans d’élégantes pantoufles, sans s’être donné le temps de mettre ses bas, ses longs cheveux s’échappant de sa coiffe de nuit, et presque sans autre parure que ses charmes, que semblait rehausser encore le chagrin d’une séparation prochaine.
    – Adieu, Amy, adieu, mon amour, lui dit le comte pouvant à peine s’arracher à ses embrassemens, et revenant à elle à plusieurs reprises pour la serrer de nouveau dans ses bras. Le soleil se montre sur l’horizon ; je n’ose rester davantage. – Je devrais déjà être à dix milles d’ici.
    C’est par ces mots qu’il voulut enfin annoncer le moment des adieux.
    – Vous ne m’accorderez donc pas ma demande ? lui dit la comtesse en souriant. Ah ! chevalier déloyal, quel chevalier courtois a jamais refusé d’octroyer à sa dame le don qu’elle lui demande, les pieds nus dans ses pantoufles ?
    – Demandez-moi tout ce que vous voudrez, Amy, et je vous l’accorderai. Je n’en excepte que ce qui pourrait nous perdre tous deux.
    – Eh bien, je ne vous demande plus de me reconnaître sur-le-champ pour ce qui me rendrait l’envie de toute l’Angleterre, pour l’épouse du plus noble, du plus brave, du plus tendrement chéri des barons anglais ; mais permettez-moi de partager ce secret avec mon père, et de mettre fin à la douleur que je lui ai causée. On dit qu’il est dangereusement malade.
    –  On dit  ? répéta vivement le comte : qui vous a dit cela ? Varney n’a-t-il pas fait dire à votre père tout ce dont nous pouvons l’instruire en ce moment, c’est-à-dire que vous êtes heureuse et bien portante ? Ne vous a-t-il pas dit qu’on avait trouvé le bon vieillard se livrant avec gaieté à son exercice favori ? Qui a osé faire naître d’autres idées dans votre esprit ?
    – Personne, milord, personne, répondit la comtesse alarmée du ton dont il faisait cette question. Cependant, milord, je désirerais beaucoup m’assurer par mes propres yeux que mon père est en bonne santé.
    – Cela est impossible, Amy. Vous ne pouvez avoir en ce moment aucune communication avec votre père ni avec sa maison. Ce serait un beau trait de politique que de prendre pour confidens d’un pareil secret plus de personnes qu’il n’est indispensable d’en avoir ! D’ailleurs cet homme de Cornouailles, ce Trevaillon, Tressilian, n’importe son nom, n’est-il pas sans cesse chez votre père, et ne doit-il pas savoir tout ce qu’on y fait ?
    – Mon père, milord, est connu depuis long-temps pour un homme prudent et respectable ; et quant à Tressilian, je gagerais la couronne de comtesse que je dois porter un jour publiquement, que, si nous pouvons nous pardonner le mal que nous lui avons fait, il est incapable de rendre le mal pour le mal.
    – Je ne m’y fierai pourtant point, Amy : je ne me fierai point à lui. J’aimerais mieux que le diable se mêlât de nos affaires que ce Tressilian.
    – Et pourquoi, milord ? lui demanda la comtesse, quoiqu’elle tremblât intérieurement du ton déterminé avec lequel il s’exprimait ; pourquoi avez-vous de Tressilian une opinion si défavorable ?
    – Madame, répondit le comte, ma volonté doit être pour vous une raison suffisante. Mais si vous désirez en savoir davantage, considérez avec qui ce Tressilian est ligué : il est l’ami, le protégé de ce Ratcliffe, de ce Sussex, contre lequel ce n’est pas sans peine que je maintiens mon terrain dans les bonnes grâces d’une maîtresse soupçonneuse. S’il obtenait sur moi l’avantage d’être instruit de notre mariage avant qu’Élisabeth fût convenablement disposée à l’apprendre, je serais à jamais disgracié ; peut-être même deviendrais-je victime de son ressentiment, car elle a quelque chose du caractère de son père Henry.
    – Mais pourquoi, milord, avez-vous conçu une opinion si injurieuse d’un homme que vous connaissez si peu ? Vous ne connaissez Tressilian que par moi, et c’est moi qui vous assure que pour rien au monde il ne trahirait notre secret. Si je l’ai offensé par amour pour vous, je n’en dois que plus désirer de vous

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