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la Bible au Féminin 03 Lilah

la Bible au Féminin 03 Lilah

Titel: la Bible au Féminin 03 Lilah Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Halter,Marek
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chamelle. La foule entière éclata de rire.
    Il faut imaginer cela, Antinoès, mon amour, un rire sorti de dix mille, quinze mille, vingt mille gorges ! Un immense rire de soulagement qui dut résonner jusqu’au Jourdain.
    Alors seulement, quand ce rire fut retombé, Ezra rétorqua :
    — Tu te trompes encore, Toviyyah. Depuis le jour où Nabuchodonosor est entré dans Jérusalem, ton père et le père de ton père se sont trompés et t’ont enseigné l’erreur. Or, si un homme peut se tromper, un fils d’Israël ne peut pas tromper Yhwh. Tu crois que la missive qui m’a fait venir ici est écrite par Artaxerxès. Que non ! C’est la volonté de Yhwh de rentrer dans Son Temple qui a dicté cette lettre. Tu te trompes encore quand tu crois que nous te craignons. Tu te trompes, car nous sommes sans nul autre besoin que l’aide et la force de Yhwh. Mais tu as bien fait de venir aujourd’hui. Tu le vois, nous avons déchiré nos tuniques et recouvert nos cheveux de cendre car aujourd’hui est le jour de la purification. Aujourd’hui, nous nous préparons à laver le sol de Judée de ses immondices. Et tu en es une.
    Blême, du haut de sa chamelle blanche, Toviyyah, avec l’aide de ses gardes, se retourna tant bien que mal sur sa selle. Revenu à l’endroit, il considéra une fois de plus l’immensité de notre foule. Et soudain, il rit. Il fouetta le cou de sa monture et disparut dans la ville en riant. Nous les vîmes un peu plus tard qui trottaient sur la route de Jéricho.
    Et nous qui nous étions moqués, nous le regardâmes s’éloigner, paré de ce rire qui nous parut plus menaçant que tous les mots qu’il avait pu cracher.
    Non sans raison.
    Cette nuit-là, peut-être la quatrième ou la cinquième depuis notre arrivée, la guerre commença.
    Les tentes les plus éloignées des murs de Jérusalem furent saccagées. Le sang coula à flots, les hurlements et les lamentations déchirèrent l’air. Les hommes, les femmes, les enfants qui les occupaient furent sans pitié tranchés par l’épée. Des chariots brûlèrent, éclairant la nuit comme en plein jour afin que nous puissions bien voir notre malheur qui commençait.
     
    *
    * *
     
    Il est étrange pour moi de décrire ces événements qui ne remontent qu’à une dizaine de mois, tant ils me semblent déjà lointains.
    C’est aussi que des corps tailladés, des femmes courant dans la nuit en serrant contre leur poitrine des enfants déjà morts ou hurlant de douleur, depuis, j’en ai vu tant et tant !
    Ce n’est pas que je me sois endurcie. Ne le crois pas, Antinoès, oh, ne le crois pas ! Mais arrive un moment où l’on devient soi-même comme une tombe trop remplie qui ne peut plus accueillir les souffrances de la mort.
    Et moi qui n’ai appris véritablement qu’un savoir, celui de donner naissance, j’en ai le vertige de soutenir celles qui écartent les cuisses pour que le sang de la vie coule une fois de plus, alors que notre mémoire est rouge du sang de la mort.
     
    *
    * *
     
    J’ai dû m’interrompre, on me réclamait.
    Parfois, la folie de ce que j’écris m’immobilise le poignet. Mon calame ne veut plus avancer sur le papyrus.
    Si seulement je pouvais être comme une outre ou une jarre qui déverse son contenu et enfin se vide ! Je te parle, Antinoès, mon époux, pourtant ce que je t’ai déjà raconté demeure en moi !
    Peut-être est-ce là l’une des vengeances de Yhwh ?
    Se souvenir. Sortir les mots de son esprit afin qu’il n’éclate pas de douleur. Et puis quand même, souffrir encore de se souvenir…
    Mais qui sait, peut-être liras-tu ces mots, mon époux lointain, et en toi feront-ils renaître de la tendresse pour Lilah ?
     
    *
    * *
     
    Ce premier désastre conféra du poids aux paroles de Yahezya. Il osa revenir devant Ezra et les prêtres pour défendre ses idées.
    Sans renoncer à son calme et à sa douceur, il expliqua que ceux qui nous avaient attaqués durant la nuit n’étaient pas les hommes de Toviyyah.
    — Quelles que soit sa haine et sa méchanceté, Toviyyah n’aurait pas le courage de porter la main sur nous. Il prétend ignorer Yhwh, mais il Le craint ! Hier, Toviyyah voulait obtenir votre soumission contre sa protection. Vous avez refusé l’une et l’autre. Il ne lui a pas fallu longtemps pour faire savoir ici et là que vos richesses étaient à prendre, tel un fruit mûr sur un arbre. Et qu’il ne vous défendrait pas.
    — Alors, qui nous a attaqués ?

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