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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Studs Terkell
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des canons derrière nous. Les Russes
étaient très très près. Alors ils nous ont tous parqués dans un grand champ, et
ils nous ont dit : « Maintenant, vous ne bougez pas d’ici. » Et
nous, on a répondu : « On ne risque pas de bouger ! » (Il
rit.) Ils ont échangé leurs uniformes contre des vêtements civils, ils ont
enfourché des vélos et se sont littéralement envolés à tire-d’aile vers les
Américains.
    Alors nous voilà au beau milieu de l’Allemagne. On était
bien deux, trois cents à ce moment-là. Et franchement j’étais vraiment désole pour
les paysans allemands. On était une véritable armée de fourmis. Quand les
fermiers voyaient cette horde de prisonniers franchir les collines, ils étaient
complètement désemparés, car on mangeait absolument tout ce qui nous tombait
sous la main. Tout le bétail y passait. On démolissait toutes les granges et
toutes les barrières pour faire nos feux. Des montagnes de plants de pommes de terre
qu’ils avaient mis de côté pour l’année suivante, adieu ! On mangeait ça
comme du pop-corn. (Il rit.) À cause de nous, la récolte de pommes de
terre de 1946 a dû être réduite à néant.
    J’était, on était enfin libres. Au bout de tout ce temps, j’avais
une grosse barbe rousse, complètement hirsute, dégueulasse bien sûr. On
ressemblait à des pirates. On ne savait ni quoi faire ni où aller. La plupart
des types ont disparu, ils ont fichu le camp les uns après les autres.
    J’étais toujours là avec mes deux copains quand les Russes
sont arrivés. Ils sont entrés en hurlant dans la ville, à cheval et à moto. Et
ils étaient tous complètement soûls. (Il rit.) Il n’y en avait pas un en
uniforme. C’étaient presque tous des Mongols qui ne se comprenaient même pas
entre eux. Ils ont réduit la ville en miettes, ils l’ont entièrement détruite.
    Comment vous ont-ils traités ?
    Génial. Ils nous ont donné des fusils et ils nous ont dit :
« D’abord, on va essayer de rattraper vos gardes. » Je pense qu’ils
en ont d’ailleurs rattrapé quelques-uns, les plus lents. Je leur ai répondu que
moi je n’étais pas très chaud et que le plus urgent c’était de manger. C’est
comme ça que je suis parti avec mes deux copains.
    Presque tous les autres ont essayé d’aller vers les lignes
américaines. Nous aussi, du reste, mais nous on a pris un peu de bon temps en
chemin. On marchait le long de la route, et quand on voyait un Allemand en
Volkswagen, par exemple, on l’arrêtait. Avec nos fusils pas de problème pour
lui piquer sa voiture, et on roulait jusqu’à ce qu’il n’y ait plus d’essence. Après
quoi, on foutait le feu à la voiture. (Il rit.)
    Quand on arrivait à une maison, on frappait à la porte. On
mettaittout le monde dehors, on s’installait, et on
mangeait tout ce qu’on trouvait. S’ils étaient sympas, on les laissait
tranquilles, sinon, on foutait le feu à la maison. On était vraiment de sales
individus.
    Le 7 mai, on était dans une grange quand une jolie petite
fille avec deux grandes nattes blondes est venue nous dire : «  Der
Krieg ist über ». La guerre est finie. Moi, je lui ai répondu :
« Fous-moi le camp, sale môme. » Je ne pouvais pas la croire. Et bien
entendu c’était vrai.
    On attendait dans une ville qu’on nous évacue en avion. Avec
mes deux copains on s’est trouvés un appartement pas trop abîmé. On a mis nos
sacs de couchage par terre. Moi j’avais toujours mon 32 automatique sur moi. On
était couchés quand d’un seul coup j’ai entendu la porte s’ouvrir. Je me suis
dit : « Attention », et j’ai sorti mon 32. J’allais tirer quand
j’ai vu une torche qui paraissait bien près du sol. J’ai dit : « Qui
est là ? » et c’était un petit gosse de six ans à peu près. Je lui ai
dit : «  Vas vants you ? » ou un truc dans ce goût-là,
je connaissais quelques mots d’allemand, et il m’a répondu : « Mein
teddy-bear » – mon nounours. C’était sa maison, et pour un peu je lui
faisais sauter la cervelle.
    On nous a évacués vers le camp Lucky Strike en France.
Ils avaient d’énormes camps pour rapatrier les ex-prisonniers. Ceux-ci se
comptaient par milliers et il fallait faire des queues interminables. Ils nous
ont dit que tous ceux qui voulaient prendre deux semaines de perme à Londres
avec une partie de leur arriéré de solde, il n’y avait pas de problème. Alors
avec mes deux potes c’est ce qu’on a

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