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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Studs Terkell
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le soutien tactique des forces
aériennes qui facilitait leurs mouvements. Leur rôle était alors comparable à
celui d’une force d’artillerie à plus grande échelle. Les bombardements
stratégiques, eux, étaient destinés à détruire les industries ennemies et à
super le moral des populations, or aucun de ces buts n’avait été atteint.
    Est-il bien nécessaire d’ajouter que cette conclusion n’a
pas plu à tout le monde à l’époque ?
    Et en ce qui concerne les bombes incendiaires lâchées sur
Tokyo ?
    Nous avons conclu que dans l’ensemble l’industrie japonaise
n’avait pas la même capacité de reconstruction que l’industrie allemande. Quand
les usines d’armement japonaises étaient touchées, elles avaient très peu de
chances de reprendre la production. Il faut bien se souvenir que de 1941 à 1945
le Japon était un tout petit pays avec une industrie assez peu développée. Il
était sur la corde raide et son économie n’avait pas autant de ressort que l’économie
allemande.
    Cependant le bombardement des villes japonaises n’a pas été
un facteur décisif dans la guerre. En Asie c’est notre progression lente et
obstinée du sud vers le nord à travers le Pacifique qui nous a donné la
victoire.
    Toute guerre est cruelle et inutile, mais celle-ci l’a été
particulièrement du fait des bombardements. La destruction de Dresde est
impardonnable. Elle a eu lieu très tard dans la guerre, dans le cadre d’une
dynamique militaire devenue incontrôlable et sans rapport avec les nécessités
militaires du moment.
    Est-ce que les bombes A sur Hiroshima et sur Nagasaki n’ont
pas abrégé la guerre dans le Pacifique ?
    Ce n’est pas la bombe qui a mis fin à la guerre. Ce point a
été tout particulièrement bien étudié par le groupe chargé des enquêtes sur les
bombardements. Cette équipe a enquêté au Japon sous la responsabilité de Paul
Nitze, et on ne peut donc la soupçonner de parti pris. Comble de l’ironie, depuis
cette enquête Paul Nitze est fasciné par la culture de la destruction. Sa
monographie, Japan’s Struggle to End the War, a conclu qu’il n’y aurait
pas eu plus de deux ou trois semaines de différence. Les Japonais avaient déjà
décidé de ne plus poursuivre la guerre et d’entreprendre des négociations de
paix.
    À cette époque le gouvernement japonais était envahi par la
bureaucratie, et il a fallu un certain temps pour mettre cette décision en
application. En outre, le gouvernement craignait que certaines unités résistent
en se livrant à des actions kamikazes. Cette volonté de négociation n’était pas
connue de Washington. On ne peut donc pas dire que c’est la bombe atomique qui
a entraîné la fin de la guerre, mais on ne peut pas dire non plus que
Washington savait que la guerre touchait à sa fin quand ils ont donné l’ordre
de larguer ces deux bombes.
    Sans la bombe A, n’y aurait-il pas eu des millions de
victimes, chez les Américains comme chez les Japonais, si le débarquement au
Japon avait eu lieu comme prévu ?
    Absolument pas. De toute façon des négociations auraient
commencé, et la reddition du Japon était une affaire de quelques jours ou de
quelques semaines. Avant que les bombes A ne fussent lâchées le Japon était une
nation vaincue. C’était évident.
    Mon expérience en tant que membre de cette commission a eu
une énorme influence sur ma façon de penser. Il fallait voir ce qu’il restait
des villes allemandes en 1945, et découvrir ensuite l’horreur des villes
japonaises pour mesurer à quel point la guerre aérienne moderne est terrifiante.
La guerre terrestre n’a rien à lui envier : vingt mille hommes se sont
fait tuer le premier jour de la bataille de la Somme pendant la première guerre
mondiale. Mais ce n’était pas aussi choquant qu’à Berlin, Francfort, Cologne ou
Mayence. Et il fallait voir Tokyo entièrement rasée. Je n’oublierai jamais ces
images.
    Post-scriptum  :
J’étais un peu plus vulnérable que les autres. J’ai passé toute mon enfance au
Canada. Mon père était un homme influent dans la communauté où nous vivions, et
beaucoup se demandaient si la première guerre mondiale était justifiée. Les
clans écossais et les fermiers canadiens ne se sentaient pas vraiment concernés.
Personne n’a jamais eu l’idée de marquer son opposition. D’autre part mon père
s’était arrangé pour faire partie du bureau de mobilisation afin d’exempter
tous ceux qui ne

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