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La Cabale des Muses

La Cabale des Muses

Titel: La Cabale des Muses Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gerard Hubert-Richou
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et tremblante de peur.
    En quelques minutes, ils arrivèrent sans encombre à Eudreville. Une longue allée rectiligne sous une charmille en voûte menait à une bâtisse de briques rouges, assise sur une solide structure en pierres blanches. Elle était jalonnée d’orangers en demi-sphère, plantés dans des vasques montées sur des piédestaux en granit. Le corps de logis principal à la façade symétrique, flanqué de deux ailes en retour sous une toiture d’ardoise, formait une galerie sur l’arrière et une sorte de salon d’été. Cinq fenêtres donnaient sur la pièce d’eau d’un immense parc.
    Au vu de ce patrimoine, l’enlèvement se justifiait davantage. Lebayle confia sa jument à un palefrenier manchot qui s’était précipité à leur approche et se plaça à la portière afin d’aider la marquise à descendre de sa voiture. Malgré l’ombre du castel, il remarqua qu’en effet la dame ne manquait pas de charme. Il excusait mieux – dans ce décor harmonieux – les sentiments enflammés du jeune des Préaux.
    — Oh, mon Dieu ! monsieur mon valeureux sauveur, vous êtes blessé !
    — Une estafilade, madame, minimisa-t-il. Ce n’est rien.
    — Vous êtes brave, cependant votre bel habit, tout rougi jusqu’aux genoux, en est gâté.
    Géraud découvrit alors les conséquences de l’entaille qu’il avait crue bénigne.
    — Chevalier, je ne peux pas vous laisser repartir dans cet état. Je vais envoyer quérir le médecin de…
    — N’en faites rien, je vous en prie, l’épanchement est spectaculaire mais sans gravité.
    — C’est ce qu’on dit. Il serait imprudent de chevaucher ainsi. Entrons, nous aviserons. Pouvez-vous marcher ?
    — Jusqu’au bout du monde, madame, répliqua-t-il démonstratif, réprimant une grimace de bon aloi.
    — Votre courage égale votre galanterie. Louisette, remettez-vous mon enfant. Faites chauffer de l’eau, apportez des linges propres et mes onguents. Prestement !
    La soubrette s’inclina et s’éclipsa du côté des communs. Madame de Villars entraîna le chevalier de la Calandre vers un petit salon tapissé de rose et de gris où Géraud n’osa s’asseoir par crainte de tacher les fauteuils.
    — Vous avez raison, admit la jeune veuve, dénouant son chapeau, passons dans mon cabinet. Les sièges y sont moins confortables, mais, de bois ciré, ils ne craignent pas les souillures.
    Il se laissa guider.
    — Ôtez votre pourpoint, qu’il ne soit sali à son tour, ordonna-t-elle.
    Lebayle s’exécuta tandis que la camériste, sans un regard dans sa direction, disposait le nécessaire demandé et qu’une autre servante apportait un broc d’eau fumante et une bassine. La marquise retira son écharpe de crapaudaille rayée à la siamoise, son court manteau de voyage, dégageant un avenant décolleté rond. Les deux petites se retirèrent.
    — Madame, je vous remercie, dit le blessé un peu embarrassé de la présence de madame de Villars qui ne manifestait aucune volonté de quitter les lieux, je n’en aurai pas pour longtemps à panser ce…
    — Chevalier, le coupa-t-elle, battant des paupières, vous m’avez épargné de terribles misères, sinon sauvé la vie, n’en déplaise à votre modestie ; il n’est pas question que je vous abandonne dans cet état. Il m’est arrivé bien souvent de m’occuper de blessures de chasse. Je vous prie de ne voir en moi qu’une infirmière et je vous demande de m’accorder votre confiance.
    C’était proposé avec une affable régence qui laissa Géraud sans voix. D’ailleurs, il n’eut pas le temps de répliquer qu’elle l’aidait d’autorité, et avec dextérité, à se libérer de son haut-de-chausses dégoulinant.
    — Vous appelez cela une estafilade, vaillant guerrier. C’est le coup de boutoir d’un sanglier ou je ne m’y connais pas. Asseyez-vous sur cette escabelle.
    Elle exagérait. La chair était juste fendue à l’horizontale sur trois pouces de longueur. Il est vrai que le sang lui ruisselait à présent sur la cuisse et autour du genou. Un peu éberlué par la situation, il se laissa recueillir par le siège providentiel.
    La marquise se pencha, examina la sérieuse plaie, évasant ainsi son décolleté sur deux coquettes rotondités qui détournèrent l’attention de Géraud et estompèrent les douleurs qui s’étaient réveillées.
    — Sans être grave, cette blessure n’est pas anodine et mérite qu’on en prenne grand soin si l’on veut éviter

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