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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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d’un bon maître est-il long et profond pour les pauvres abandonnés qu’il laisse derrière lui.
    Saint-Clair avait à peine rendu le dernier soupir que la terreur et la consternation s’emparaient de tous. Il avait été foudroyé dans la force et la fleur de sa jeunesse : les salons, les galeries, la maison tout entière retentissaient de sanglots, de cris de désespoir.
    Marie, énervée par l’habitude constante de s’écouter, restait terrassée sous le choc, et s’évanouissait de minute en minute durant l’agonie de son mari : celui auquel l’unissait le lien mystérieux et sacré du mariage la quitta pour jamais sans un mot d’adieu.
    Miss Ophélia, douée d’une énergie et d’une force de volonté peu communes, resta jusqu’à la fin près de Saint-Clair, tout yeux, tout oreilles, tout attention, faisant le peu qui se pouvait faire, et se joignant de toute son âme aux tendres et ferventes prières du pauvre esclave pour l’âme de son maître mourant.
    Lorsqu’ils lui rendirent les derniers devoirs, ils trouvèrent sur son sein un petit médaillon à ressort. Il renfermait un portrait de femme, – un noble et beau visage, – et sur le revers, une mèche de cheveux noirs. Ils remirent sur la poitrine inerte, – cendres sur cendres, – ces tristes reliques d’un passé qui jadis avait fait battre si vite ce cœur immobile.
    L’âme de Tom était tout entière aux pensées de l’éternité ; et devant cette froide dépouille, il ne songea pas une seule fois que ce coup imprévu scellait à jamais son esclavage. Il était tranquille sur son maître ; car, à l’heure solennelle où il épanchait sa prière dans le sein du Père céleste, il avait senti descendre en lui une quiétude parfaite, et comme l’assurance qu’il était exaucé. La profondeur de ses affections lui faisait pressentir la plénitude de l’amour divin ; car un vieil oracle a écrit : « Celui qui habite dans l’amour habite en Dieu, et Dieu en lui. » Tom croyait, Tom espérait, et Tom était en paix.
    Le jour des funérailles arriva, avec son cortège obligé de crêpes funèbres, de prières, de figures graves ; puis les vagues fangeuses de la vie quotidienne roulèrent comme auparavant ; puis vint l’éternelle question : Qu’y a-t-il à faire encore ? Marie se la posa, tandis qu’enveloppée d’un peignoir du matin, entourée de visages inquiets, elle examinait, du fond de sa bergère, des échantillons d’étoffes de deuil. Miss Ophélia se l’était posée aussi : elle songeait à regagner le Nord et la maison paternelle. Mais la question se dressait surtout, pleine de muettes terreurs, dans l’esprit des domestiques, qui ne connaissaient que trop la tyrannique insensibilité de leur maîtresse. Tous savaient que les douceurs dont ils avaient joui leur venaient du maître seul, et que maintenant qu’il n’était plus, rien ne les pourrait garantir des caprices despotiques d’un caractère que les revers aigrissaient encore. Environ une quinzaine après l’enterrement, miss Ophélia, occupée dans sa chambre, entendit frapper doucement à la porte. Elle ouvrit : c’était Rosa, la jolie femme de chambre quarteronne, les cheveux en désordre et les yeux gonflés de pleurs.
    « Oh ! miss Phélie, dit-elle, tombant à genoux et saisissant le pan de la robe de miss Ophélia ; je vous en supplie, allez trouver maîtresse ! allez la prier pour moi ! elle veut m’envoyer là pour y être fouettée, – regardez. » Elle tendit un papier à miss Ophélia.
    C’était l’écriture élégante et fine de Marie ; un ordre au maître d’une maison de châtiment de donner au porteur quinze coups de fouet.
    « Qu’avez-vous donc fait ? demanda miss Ophélia.
    – Vous savez, miss Phélie, j’ai un si mauvais caractère ! c’est bien mal à moi. J’essayais une robe à maîtresse Marie ; elle m’a frappé au visage, et j’ai parlé sans y penser ; j’ai été insolente. Elle a dit qu’elle me réduirait, qu’elle m’apprendrait, une fois pour toutes, à ne plus faire la princesse comme par le passé. Elle a écrit ce billet, et m’a dit de le porter : mais j’aime mieux qu’elle me tue tout de suite. »
    Miss Ophélia tenait le papier, et réfléchissait. « Voyez-vous, miss Phélie, poursuivit Rosa ce n’est pas tant la peur des coups ; – je les endurerais bien de votre main ou de celle de miss Marie ; – mais être envoyée à un homme ! à un si horrible

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