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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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doit se repentir, reprit miss Ophélia, et commencer sur l’heure.
    – Toujours pratique, toujours allant droit au but, dit Saint-Clair, un demi sourire éclairant son visage. Vous n’accordez jamais un quart d’heure aux réflexions générales. Sans cesse vous m’arrêtez court devant la minute actuelle ; vous avez une sorte d’éternel présent , toujours présent à l’esprit.
    – Le présent est le seul temps avec lequel j’aie rien à démêler, reprit miss Ophélia.
    – Chère petite Éva, pauvre enfant ! dit Saint-Clair ; elle m’avait trouvé, dans la simplicité de son âme, une grande œuvre à faire. »
    C’était la première fois, depuis la mort d’Éva, qu’il en parlait un peu longuement. Il s’efforça de se dominer, et poursuivit : « D’après mes vues sur le christianisme, je ne crois pas qu’un homme puisse se dire chrétien, et ne pas protester énergiquement contre le système monstrueux d’injustice qui fait la base de notre société, dût-il mourir à la peine. Moi, du moins, je ne pourrais être chrétien qu’à ce prix ; non que je n’aie rencontré bon nombre de gens, éclairés et pieux, qui ne songeaient à rien de semblable. Je le confesse, l’apathie des gens religieux sur ce point, leur aveuglement sur des atrocités qui me remplissent d’horreur, ont surtout contribué à me rendre sceptique.
    – Avec de tels sentiments, pourquoi ne rien faire ? dit miss Ophélia.
    – Oh ! parce que je n’avais que la bienveillance qui consiste à s’étendre sur un sofa, et à y maudire l’Église et le clergé de n’être pas une armée de martyrs et de confesseurs. Rien de plus simple, comme vous savez, que d’indiquer aux autres la voie du martyre.
    – Eh bien ! agirez-vous différemment désormais ? demanda miss Ophélia.
    – Dieu seul sait l’avenir, répliqua Saint-Clair. Je suis plus brave que je ne l’étais, parce que j’ai tout perdu ; et celui qui n’a rien à perdre peut tout risquer.
    – Qu’allez-vous faire ?
    – Mon devoir, j’espère, envers les pauvres et les humbles, à commencer par mes propres domestiques, pour lesquels je n’ai encore rien fait. Un jour peut-être, plus tard, on verra que je puis accomplir quelque chose pour la classe entière, quelque chose pour laver mon pays de la honte que lui inflige, aux yeux de toutes les nations civilisées, la fausse position qu’il a prise.
    – Croyez-vous possible que la nation en vienne à une émancipation volontaire ?
    – Je n’en sais rien. Le temps est aux grandes actions. L’héroïsme et le désintéressement apparaissent, çà et là, sur la terre. Les nobles hongrois, au détriment d’immenses fortunes, ont affranchi des millions de serfs. Il peut se trouver aussi parmi nous des âmes généreuses, qui n’escomptent pas l’honneur et la justice par dollars et deniers.
    – J’ose à peine y croire, dit miss Ophélia.
    – Supposons que, nous levant en masse demain, nous en venions à émanciper ; qui élèvera ces millions d’êtres ? qui leur apprendra à user de la liberté ? Ils n’arriveront jamais à se classer parmi nous. Le fait est que nous sommes nous-mêmes trop indolents, trop inhabiles, pour leur donner l’idée de l’énergie nécessaire à former des hommes. Il leur faudra émigrer dans le Nord, où le travail est à la mode, et passé dans les mœurs. Or, dites-moi, votre philanthropie chrétienne sera-t-elle assez robuste pour se charger de les élever, de les classer ? Vous envoyez des milliers de dollars aux missions étrangères, mais admettriez-vous des païens dans le sein de vos villes ? leur donneriez-vous votre temps, vos préoccupations, votre argent, pour en faire des chrétiens ? Voilà ce que je veux savoir. Si nous émancipons, élèverez-vous ? Combien se trouvera-t-il de familles dans votre village disposées à recevoir chacune un nègre et sa femme, à les instruire, à supporter leurs défauts, à s’efforcer de les rendre meilleurs ? Quels négociants me prendront Adolphe, si j’en veux faire un commis ? Quels ouvriers, si je désire qu’il apprenne un métier ? Combien y a-t-il d’écoles dans les États du Nord où Jane et Rosa fussent reçues ? et cependant elles sont aussi blanches que beaucoup de femmes du Nord ou du Sud. Vous le voyez, cousine, je veux que justice nous soit rendue. Notre position est mauvaise, en ce que nous sommes les oppresseurs avoués du nègre, mais le préjugé

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