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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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vous userez de votre influence pour qu’elles se terminent.
    – Je n’en ferai rien, en vérité, dit Marie avec aigreur. Tom est de tous les domestiques de l’habitation celui qui a le plus de valeur. On ne saurait faire un pareil sacrifice. D’ailleurs, qu’a-t-il besoin de liberté ? Il est infiniment mieux comme il est.
    – Mais il désire très-ardemment être libre, et son maître le lui a promis, insista miss Ophélia.
    – Je ne doute pas qu’il ne le désire, répliqua Marie : ils en sont tous là, précisément parce que c’est un ramas de mécontents qui veulent toujours avoir ce qu’ils n’ont pas. J’ai pour principe de n’émanciper en aucun cas. Tenez le nègre sous la férule du maître, et il se comportera à peu près bien ; mais si vous l’affranchissez, il ne voudra plus travailler ; il deviendra paresseux, ivrogne, et tout ce qu’il y a de pis. J’en ai vu des centaines d’exemples. Ce n’est point leur rendre service que de les affranchir.
    – Mais Tom est si sobre, si bon travailleur, si pieux !
    – Oh ! vous n’avez que faire d’insister ! j’en ai vu cent comme lui ; il marchera bien tant qu’on y aura l’œil, voilà tout.
    – Mais considérez, dit miss Ophélia, qu’en le mettant en vente vous l’exposez à tomber à un mauvais maître.
    – Ce sont là des balivernes ! reprit Marie ; il n’arrive pas une fois sur cent qu’un bon sujet tombe à un mauvais maître. La plupart des maîtres sont bons, quoi qu’on en dise. J’ai vécu, j’ai grandi dans le Sud, et je n’y ai jamais connu personne qui ne traitât bien ses esclaves, aussi bien du moins qu’ils le méritent. Je n’ai pas la moindre inquiétude là-dessus.
    – Eh bien ! dit miss Ophélia avec énergie, je sais qu’un des derniers vœux de votre mari était que Tom eût sa liberté ; c’est une des promesses qu’il a faites à la chère petite Éva mourante, et je n’imaginais pas que vous pussiez vous en croire dégagée. »
    À cet appel Marie se couvrit le visage de son mouchoir, et eut recours à son flacon de sels.
    « Tout le monde se tourne contre moi ! dit-elle ; personne n’a le moindre égard ! Je ne devais pas m’attendre à un pareil procédé ! Venir ainsi réveiller tous mes chagrins ! c’est d’une telle inattention ! mais on ne veut pas réfléchir à tout ce que mes épreuves, à moi, ont de particulier. Il est bien dur, quand je n’avais qu’une fille unique, de me la voir enlevée ! – Quand j’avais un mari qui me convenait si parfaitement, – et je suis si difficile, – il est dur de le perdre ! Il faut avoir bien peu de sentiment pour venir me rappeler tout cela avec tant d’insouciance, – lorsque vous savez à quel point je suis faible ! Je veux croire que vous avez de bonnes intentions ; mais c’est d’un manque d’égards inouï ! » Et Marie sanglota, respira convulsivement, cria à Mamie d’ouvrir la fenêtre, de lui apporter le camphre, de lui frotter la tête et de la délacer. Au milieu de la confusion générale qui s’en suivit, miss Ophélia s’esquiva, et rentra dans son appartement.
    Elle vit qu’elle ne gagnerait rien à dire un mot de plus, car Marie avait une capacité d’attaques de nerfs sans limites, et elle la mettait en jeu toutes les fois qu’on faisait allusion aux derniers désirs de son mari ou d’Éva en faveur des domestiques. Miss Ophélia fit donc ce qui lui restait de mieux à faire pour Tom ; elle écrivit pour lui une lettre à madame Shelby, lui exposant ses peines, et la pressant d’envoyer à son aide.
    Le lendemain, Tom, Adolphe et une demi-douzaine de leurs compagnons de servitude furent conduits à un dépôt d’esclaves, afin d’y attendre la convenance du marchand qui réunissait un lot pour la vente.

CHAPITRE XXXI

Un dépôt d’esclaves.

Un dépôt d’esclaves ! Ce mot évoque peut-être d’horribles visions chez quelques-uns de mes lecteurs. Ils se figurent un antre obscur, immonde, un affreux Tartare, informis, ingens, cui lumen ademptum . Mais non, innocent ami ! De nos jours l’art de faire le mal s’est perfectionné ; on y met de l’adresse, de la recherche ; on évite avec soin tout ce qui pourrait choquer les yeux, offenser les sens d’une société respectable. La propriété humaine est en hausse ; en conséquence, on la nourrit bien, on la nettoie, on l’étrille, on la soigne, afin qu’elle arrive au marché propre, forte, et luisante. Un

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