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La case de L'oncle Tom

La case de L'oncle Tom

Titel: La case de L'oncle Tom Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Harriet Beecher-Stowe
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démon me possède et me pousse ! » Elle lui siffla ces derniers mots à l’oreille.
    « Va-t’en ! sur mon âme, je crois que tu l’es, possédée ! Et Legris la repoussa loin de lui, et l’examina avec malaise.
    « Après tout, Cassy, reprit-il, pourquoi ne serions-nous pas bons amis, comme par le passé ?
    – Comme par le passé ! » répéta-t-elle avec amertume. Elle s’arrêta court, – un monde de sentiments surgit dans son cœur, l’étouffa, la rendit muette.
    Cassy avait toujours eu sur Legris l’espèce d’influence qu’une femme énergique et passionnée exerce sur l’homme le plus brutal ; mais depuis peu, elle était devenue de plus en plus irritable, de plus en plus impatiente du joug hideux de sa servitude, et son irritation allait parfois jusqu’au délire : ces accès en faisaient un objet de terreur pour Legris, qui avait des fous cet effroi superstitieux, fréquent chez les esprits grossiers et ignorants. Quand il avait amené Emmeline à l’habitation, tous les sentiments féminins, toutes les douleurs couvées longtemps sous les cendres, se ranimèrent dans le cœur usé de Cassy, et elle prit parti pour la jeune fille : il s’ensuivit une querelle farouche entre elle et Legris. Dans sa fureur, il jura que, si elle ne voulait se tenir en paix, il l’enverrait à la cueille du coton avec les esclaves. Cassy déclara, dans son orgueilleux dédain, qu’elle irait . Elle y alla et accomplit sa tâche, pour montrer le cas qu’elle faisait de la menace.
    Legris avait été secrètement mal à l’aise tout le jour, car il ne pouvait s’affranchir de l’empire de Cassy.
    Il avait espéré, lorsqu’elle apporta son panier au pesage, obtenir quelque concession, et il lui avait parlé d’un ton demi conciliant, demi impérieux : elle lui avait répondu avec le plus outrageant mépris.
    L’indigne traitement infligé au pauvre Tom l’avait encore exaspérée, et elle n’avait suivi Legris qu’afin de lui reprocher sa brutalité.
    « Je te conseille, Cassy, dit-il, de te conduire avec un peu plus de modération.
    – C’est vous qui parlez de modération, après ce que vous avez fait ! Vous qui n’avez pas même le bon sens de vous retenir, qui mettez hors de service un de vos meilleurs manœuvres, juste au plus fort de la besogne, et cela grâce à votre caractère diabolique !
    – J’ai été un sot, c’est le fait, de laisser s’allumer la poudre, dit Legris ; mais le drôle s’entêtait, il fallait bien le rompre.
    – Je vous avertis que vous ne le romprez pas.
    – Je ne le romprai pas ? s’écria Legris se levant en fureur. Je voudrais bien voir cela ! Il serait le premier nègre qui me tint tête. Je lui broyerai, s’il le faut, tous les os du corps, mais il pliera ! »
    À ce moment la porte s’ouvrit, et Sambo parut : il s’avança avec force saluts, et présenta quelque chose dans un papier.
    « Qu’est cela, chien ?
    – C’est une sorcellerie, maître.
    – Une quoi ?
    – Une chose que les sorciers donnent aux nèg’ ! Ça les empêche de sentir le fouet quand on les bat. Il avait ça pendu au cou avec un ruban noir.
    Legris, comme beaucoup d’hommes cruels et impies, était superstitieux. Il prit le papier et l’ouvrit avec répugnance.
    Il en sortit un dollar d’argent, et une longue et brillante mèche de beaux cheveux blonds et bouclés, – qui, comme choses vivantes, s’enroulèrent autour des doigts de Legris.
    « Damnation ! s’écria-t-il dans un soudain accès de colère, frappant du pied le plancher et arrachant de ses doigts les cheveux avec fureur, comme s’ils le brûlaient : d’où ça vient-il ? Otez-les ! – jetez-les au feu ! – au feu ! – au feu ! »
    Il criait, jurait, les tiraillait et les jeta enfin dans le brasier : « Pourquoi diable m’apporter ça ? »
    Sambo, abasourdi, demeurait immobile, la bouche béante, et Cassy, qui se disposait à laisser la salle, s’arrêta et le considéra tout étonnée.
    « Ne t’avise plus de m’apporter de tes diaboliques sortilèges ! » dit-il en menaçant du poing Sambo, qui battit vivement en retraite du côté de la porte ; et, prenant le dollar, Legris le lança dans l’obscurité à travers les vitres qui volèrent en éclats.
    Sambo s’esquiva au plus vite. Après son départ, Legris sembla honteux de son accès d’alarme. Il se rassit dans sa chaise d’un air hargneux, et se mit à déguster avec lenteur son bol de

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