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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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l’encolure
de l’animal qui se tourna et donna de petits coups de tête contre sa joue non
rasée. Sir John s’empressa de narrer ce qui s’était passé.
    – Je ne peux le garder ! gémit-il. Lady
Maude abomine les boucs.
    Son air implorant n’échappa pas à Athelstan.
    – Comment s’appelle-t-il ?
    – Le bouc à quatre pattes, Judas. Celui à deux
pattes, Godbless.
    – Pourquoi Godbless ?
    – C’est un coupe-bourse. Il assiste à la messe
juste avant la communion, quand on échange le baiser de paix. Il vous serre la
main, vous embrasse sur la joue et, tout en chuchotant « Dieu vous bénisse »,
essaye de vous dérober votre escarcelle.
    Le prêtre s’accroupit près du mendiant.
    – Es-tu un vrai larron, Godbless ?
    – Pas très habile, mon père.
    Athelstan caressa doucement le bouc.
    – Et voilà donc Judas ?
    – Je l’aime bien, dit Godbless, et il m’aime. Je
n’ai point de foyer, mon père.
    – Les frères sont censés aimer les animaux, insinua
Sir John.
    – Tous les hommes sont censés les aimer, Sir John,
et ce bouc est fort beau. Toi aussi, Godbless, commenta Athelstan en se
relevant. Godbless, je ne peux te proposer une place dans ma maison : c’est
à peine assez grand pour moi.
    Il pensa au cimetière envahi de mauvaises herbes et à
ses constantes prières auprès de Watkin et de Pike pour qu’ils le nettoient.
    – Mais tu peux t’installer dans le dépositoire. Quand
on y laissera un corps pour la nuit, tu pourras dormir chez moi. Je rédigerai
un message pour Benedicta, la veuve. Elle préparera un lit, et, peut-être, une
sellette 5 .
L’endroit est propre, récuré et ne sent point mauvais.
    Un large sourire fendit le visage du mendiant.
    – En échange, tu t’occuperas du bouc. Il peut
paître dans le cimetière. Tu pourras aussi surveiller ce qui se passe là-bas.
    Athelstan éprouva un élan de triomphe. Il se méfiait
toujours de ce que patricotaient ses paroissiens dans le cimetière, qu’il s’agisse
de Pike et Watkin quand ils étaient ivres ou des amours de Cecily la ribaude. Fouillant
dans son escarcelle, il en tira une piécette.
    – Emmène le bouc. Tu trouveras de la corde au
dépositoire. Laisse-le brouter mais assure-toi que la longe est assez longue et
attache-la à un des anneaux du mur.
    Godbless acquiesça et examina la pièce.
    – Puis va donc chez le vendeur de tourtes. Au
coin de la rue. Demande à Merrylegs une de ses tourtes les plus fraîches et
dis-lui que dorénavant tu fais partie de notre paroisse.
    Godbless bondit mais le prêtre l’attrapa par le bras.
    – Nous ne pouvons pas continuer à l’appeler Judas,
n’est-ce pas ? Il y avait un autre apôtre, qui, lui, n’a pas trahi le
Christ. Il avait un nom qui ressemble à Judas. Ah, c’est ça ! Jude ou
Thaddée !
    Athelstan plongea les doigts dans le bénitier et
aspergea l’homme et l’animal.
    – Je te rebaptise Thaddée, bouc de cette paroisse !
    Un peu plus tard, Sir John et son secrétaire
débarquaient du bachot de Moleskin sur le quai près du palais de Savoy. Ils
furent accueillis par des domestiques portant la livrée de Jean de Gand et, après
avoir franchi un cordon de sentinelles, suivirent l’allée pavée qui menait aux
grilles du Savoy. D’autres soldats montaient la garde. Sous le porche voûté qui
donnait accès aux jardins, chevaliers et archers arborant les armes royales
prirent le ceinturon du magistrat et les précédèrent dans les jardins et la fraîcheur
odorante du palais.
    Athelstan, émerveillé, examinait les lieux. Murs, sols
et plafonds étaient d’une pierre blanche qu’il prit pour du marbre. De chaque
côté des galeries étaient appendues d’exquises tapisseries du Hainaut et des
Flandres aux couleurs vives et lumineuses qui dépeignaient des scènes tirées de
la Bible et de la mythologie. Plus ils avançaient, plus l’opulence était
ostensible. Les planchers, d’un bois poli qui sentait bon la cire, étaient
presque en entier recouverts de grands tapis épais de teintes différentes. Il y
avait des statues dans des niches et, sur les murs, de petits portraits des
anciens rois et princes dans de solides cadres en bois noir ouvragé. Les hommes
d’armes, omniprésents, qui surveillaient escaliers et antichambres, les
entourèrent alors qu’ils attendaient d’être introduits dans la première galerie
où logeait le régent.
    Athelstan se remémora le monologue de Sir John durant
leur trajet dans la

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