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La chambre du diable

La chambre du diable

Titel: La chambre du diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul Harding
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feuilletait des manuscrits tout en parlant à voix basse à
un clerc installé à un pupitre à côté de lui. Il leva les yeux.
    Le dominicain ne savait si le régent était un ange ou
un démon. Il avait la prestance des Plantagenêts : moustache, barbe et
cheveux blonds, pommettes hautes et yeux bleu saphir qui pouvaient se plisser
de gaieté ou devenir froids comme glace. Il portait une chemise de lin froncée
à col ouvert et un collier d’argent frappé du double « S » des
Lancastre. Ses manches retroussées laissaient voir des manchettes dorées à
chaque poignet et les bagues qui chargeaient ses doigts captaient la lumière et
scintillaient telles des flammèches. Il renvoya le clerc et se leva.
    – Voilà donc notre brave John !
    Il serra la main du coroner et se tourna vers
Athelstan. Le dominicain perçut une lueur de dérision dans ses yeux.
    – Vous êtes donc toujours à St Erconwald, mon
père ?
    – Oui, monseigneur.
    Jean de Gand tendit la main et eut un sourire radieux.
    – Frère Athelstan, comme Sir John, je ne m’intéresse
guère aux prêtres mais vous êtes toujours le bienvenu céans.
    Il prit avec fermeté la main du dominicain.
    – Maltravers, fermez la porte.
    Il désigna à ses hôtes les deux chaires que le clerc
avait avancées avant de sortir en hâte.
    – Prenez place.
    Le vin blanc servi par Sir Maurice était un peu âpre
mais glacé. Athelstan en apprécia la saveur et ferma les yeux de plaisir. Puis,
se sentant coupable, il les rouvrit. Il en était toujours ainsi avec Gand ;
c’était comme progresser sur une toile d’araignée, soyeuse et douce, mais
pourtant fort dangereuse. Sir John, néanmoins, savourait la boisson. Il avait
déjà vidé son gobelet et le tendait à Sir Maurice pour qu’il le remplisse
derechef. Le jeune chevalier s’exécuta avec un sourire en coin. Gand, avachi
dans sa chaire, épiait le coroner de sous ses lourdes paupières.
    – Vous aimez bien le vin, n’est-ce pas, Sir John ?
    – Il réjouit le cœur, répondit avec esprit le
magistrat. C’est, du moins, ce que prétend le psalmiste et les apôtres
eux-mêmes buvaient volontiers.
    – Cela ne vous trouble-t-il point l’esprit ?
    – Non, monseigneur. Et vous ?
    Gand rit et agita la main.
    – Assez plaisanté !
    Il désigna Maltravers d’un petit geste.
    – Connaissez-vous Sir Maurice ?
    – Oui. De nom et de réputation.
    – C’est l’un de mes capitaines, reprit le régent.
Il a mené campagne sans merci contre les Français, sur terre et sur mer. Voilà
deux mois, devant Calais, il commandait une flottille qui a attaqué deux
bâtiments de guerre français, le St Sulpice et le St Denis. Le
dernier a sombré et le premier a été ramené victorieusement à Douvres. On a
rançonné soldats et marins français, treize à la douzaine. Mais on a capturé
cinq officiers, des hommes de qualité : Pierre Vamier, Jean Gresnay, Eudes
Maneil, Philippe Routier et Guillaum Serriem. Les us et coutumes de la guerre
les destinaient à payer rançon et ils furent donc conduits au manoir d’Hawkmere.
    – Un endroit lugubre, interrompit Sir John. Près
du prieuré de Clerkenwell.
    – Un lieu redoutable, c’est vrai, approuva Gand
en fouillant dans les manuscrits répandus sur sa table. J’ai nommé Sir Walter
Limbright leur gardien, hôte, maître de la place, comme il leur plaira. Lui et
sa fille Lucy ont la garde du manoir. Limbright est un vieux soldat. Il hait
les Français, qui ont brûlé son castel près de Winchelsea et tué son épouse et
ses deux fils. Il était à la guerre pendant que Lucy rendait visite à des
parents à Hyde. Avec lui, on pouvait être sûr que les Français étaient sous
bonne garde.
    – Et que s’est-il passé ? questionna
Athelstan.
    – L’émissaire français en Angleterre, continua
Gand sans tenir compte de l’interruption, est Lord Charles de Fontanel. Il
attend en bas.
    Le régent prit son gobet 6 qu’il fit rouler entre ses paumes.
    – J’espérais que le montant des rançons serait
levé et que ces hommes seraient relâchés mais, pour répondre sans détour à
votre question, mon père, hier soir Guillaum Serriem a été retrouvé empoisonné
dans sa chambre.
    – Hier soir ? s’étonna le dominicain.
    – Eh bien, pour être très précis, ce matin, mais
le corps était raide et glacé. Le mire, Osmund Aspinall, un physicien qui loge
au-dessus d’une apothicairie à Cripplegate, a admis que le captif devait

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