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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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étrange. J’ai dû me cacher dans les bois pour que Loraline ne puisse voir la transformation, ainsi que je l’avais promis à ma sœur. C’était la première fois que ce fut aussi douloureux, mais à présent tout va bien pour ma nièce comme pour moi. Je ne veux pas que tu t’inquiètes, Huc de la Faye.
    –  Pourquoi ne m’as-tu rien dit lorsque tu es revenue de la grotte avant-hier ?
    –  J’avais besoin de réfléchir et toi de te remettre, comme chaque fois que tu me sais… différente, termina-t-elle en cherchant le mot qui les blesserait le moins tous deux.
    Elle savait bien ce qu’il ressentait. Elle-même se faisait horreur en songeant au monstre qui cohabitait avec ce corps de femme à l’intérieur d’elle. Huc se forçait à l’approcher, à la toucher, à l’embrasser chaque lendemain de pleine lune pour qu’elle ne sente pas combien il détestait cette partie d’elle, mais elle était convaincue qu’elle lui répugnait en ces instants autant qu’elle-même se haïssait.
    –  Je t’ai acceptée telle que tu es, Albérie. Telle que tu es maintenant et à chaque pleine lune. Je voudrais que tu puisses t’en convaincre. Je le voudrais vraiment, murmura Huc en soutenant le regard bleu jusqu’à ce qu’elle le dévie.
    Il semblait si sincère, comme chaque fois, qu’elle eut un instant envie de le croire, mais comment pouvait-il l’aimer autant quand elle ne s’aimerait jamais ?
    –  Pardonne-moi, ne sut-elle que répondre.
    Huc s’emporta malgré lui. Il se redressa et marcha à grandes enjambées pour apaiser ses sentiments blessés, jusqu’au feu qu’il aiguillonna.
    –  C’est-ce que tu dis chaque fois, Albérie. Chaque fois ! Je n’ai ni peur ni peine de ce que tu es et je t’aime ainsi. T’ai je jamais montré de l’aversion ou de la haine ou même de l’indifférence ? N’ai-je pas mérité ta confiance, au contraire ? Je ne t’ai jamais rien demandé ! Je n’ai jamais rien exigé ! Par mon acceptation, je t’appartiens plus que nul autre à son aimée. Alors que dois-je faire ? Que dois-je faire, dis-moi, pour que tu cesses de me demander pardon d’exister ?
    Dans le silence qui retomba sur son éclat, Huc s’attarda au pied des flammes, appuyant ses mains larges sur le manteau de la cheminée. Puis il s’avisa qu’Albérie pleurait, silencieusement, pour ne pas le déranger. Alors il oublia ce qu’il venait de dire, parce que Isabeau était morte et qu’Albérie avait besoin de lui. Il traversa la pièce sans réfléchir et, la soulevant dans ses bras, l’emporta devant la fenêtre qu’il ouvrit d’une main vive tandis que son épouse se cachait au creux de son pourpoint de cuir. Il la laissa pleurer, en aspirant violemment le vent glacé qui entrait à pleines volées dans la pièce, devant les flammes revigorées par cet appel d’air, serrant contre la chaleur de son ventre ce corps fragile. Puis il pensa qu’elle allait prendre froid malgré son sang à lui qui bouillonnait. Il repoussa la croisée et s’en alla choir dans un fauteuil, tenant toujours la jeune femme contre lui, telle une enfant. Il la berça doucement et posa les questions qui lui brûlaient le cœur :
    –  Comment est-ce arrivé ? Qu’attends-tu de moi ?
    Albérie ne répondit pas tout de suite. Il était si doux avec elle, si prévenant. Que n’aurait-elle donné pour être humaine ! Humaine seulement. Elle chercha à nouveau ses mots pour ne pas trop en révéler. Elle ne voulait pas le mêler à ce qui allait advenir. Elle devait le protéger comme il l’avait protégée jusqu’à aujourd’hui. Il y avait tant de choses qu’il ignorait encore. Elle se mordit les lèvres amèrement. Si seulement François de Chazeron avait laissé les siens en paix ! Elle ne serait pas obligée de mentir, de tricher avec le seul homme qu’elle aimerait jamais. Elle assura sa voix :
    –  Une mauvaise chute en revenant vers la grotte. De nombreux arbres se sont agglutinés près de l’accès, emmêlant des pierres et des branches lorsque la tempête les a couchés. Je lui avais recommandé d’être prudente, mais, avec la pluie et le gel, l’endroit était devenu extrêmement dangereux. Elle a agonisé quelques jours avant de s’éteindre. Je n’aurais pas pu la sauver, Huc, même si je m’étais précipitée. Et je ne le pouvais ces jours derniers avec le seigneur de Vollore dans nos murs.
    Huc secoua sa belle tête en silence. Quel gâchis, songea-t-il,

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