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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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puis chuchota :
    –  Vous souvenez-vous de ce qui s’est passé ?
    –  Tu étais dans la forêt avec Olivier et la Pendaille, commença son père.
    Philippus lui fit les gros yeux et le bedonnant tavernier se tut.
    –  Oui, j’étais dans la forêt, répéta la jouvencelle en fouillant sa mémoire. Je ramassais du thym quand… Oh ! mon Dieu ! des brigands. Des brigands nous ont encerclés. Olivier m’a dit de courir. La Pendaille m’a suivie. Je me suis enfoncée dans les taillis et puis j’ai perdu l’équilibre, je crois. Ensuite je ne me recorde pas.
    –  Cherchez bien. Encore.
    La jouvencelle fronça les sourcils sur ses souvenirs mais…
    –  Non, vraiment, je ne me souviens pas.
    Philippus poussa un soupir de soulagement. Ils l’avaient assommée d’abord, à moins qu’elle ne soit tombée sur l’arête d’un rocher. Elle n’aurait donc aucun traumatisme véritable.
    –  Et Olivier, murmura-t-elle. Leur a-t-il échappé ?
    –  Messire Olivier est mort, damoiselle, expliqua Philippus doucement. Et ce n’est pas tout. Ils ont profité de votre inconscience.
    –  Que voulez-vous dire ? Que veut-il dire, père ? demanda-t-elle, le visage blême.
    Pour seule réponse, le père s’avança et l’attira contre son poitrail rebondi. La jouvencelle éclata en sanglots. Philippus se força à mettre de la distance entre la situation et ses propres sentiments, mais il était furieux. Bien sûr, il savait que viol et massacre étaient monnaie courante dans les forêts d’Europe, mais il ne pouvait s’empêcher de rugir intérieurement chaque fois qu’une femme était tourmentée ainsi. Quelque chose en lui bouillait de haine à l’encontre de ces hommes sans foi ni loi. Il faut accepter ce qu’on ne peut empêcher… Combien de fois avait-il entendu cette phrase dans la bouche de femmes nourrissant leur bâtard avec le lait de leur haine. Il se demandait combien de temps il faudrait encore à l’homme pour cesser de se conduire comme un animal.
    Lorsqu’il quitta l’auberge du Songe du roi , la petite ville de Saint-Rémy-de-Provence s’endormait. Ameline, la jouvencelle, reposait paisiblement en sa demeure. Sur la demande du père, il l’avait estourdie d’une liqueur de pavot puis avait pansé la plaie à la tête. Ensuite il avait nettoyé le vagin souillé et placé dans l’utérus un petit caillou blanc qui tomberait de lui-même, entraîné par la fausse couche. Il n’y aurait pas d’enfant. Il avait appris cela d’une sorcière en Egypte. Au regard du monde, l’honneur de la damoiselle serait sauf. L’aubergiste avait tenu à acheter grassement son silence. Philippus avait refusé tout d’abord puis avait cédé.
    Le hasard n’existait pas. Il lui fallait accepter cette loi. Et les avantages que le destin lui offrait.
    C’est d’un pas vif qu’il regagna le logis de Michel, satisfait malgré lui d’entendre tinter les écus d’or contre sa poitrine.

6
     
     
     
    François de Chazeron était d’humeur sombre. Le frère Etienne avait souhaité l’examiner en arrivant au château avec Antoine de Colonges, mais François les avait congédiés sur l’heure en prétendant que le seul remède dont il avait besoin se trouvait dans la ripaille et qu’ils devraient attendre qu’il en ait terminé. De fait, il avait englouti ce qu’on lui avait préparé comme s’il était à jeun depuis des semaines.
    Averti par Clothilde qu’Antoinette était souffrante, l’abbé du Moutier avait délaissé sans remords le seigneur de Vollore pour s’enquérir de l’état de son épouse. Il le regrettait depuis. Non qu’il s’inquiétât plus de l’honneur de François que de ses états d’âme ! Ce qui le chagrinait dans cette histoire, c’était Albérie. Il la savait profondément attachée à Huc et ne pouvait s’empêcher de songer que sa réaction serait terrible si elle venait à découvrir la chose. Il soupira si bruyamment que François de Chazeron le tança d’un œil plus noir encore.
    Après avoir achevé un matinel hardiment composé d’une omelette de quinze œufs, de tranches épaisses de jambon, de quatre cailles et de trois entremets, le tout arrosé de vin, François avait exigé que soient réunis sur-le-champ l’abbé, Antoinette, Clothilde et Huc. Il ignorait, ou feignait d’ignorer, que Bertrandeau et Guillaumet avaient pris part à son sauvetage, et Huc s’abstint d’en rien dire.
    De fait, ils étaient là, dans cette pièce où

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