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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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qu’elle était à bout de souffle. Jamais elle n’aurait imaginé qu’un tel bâtiment pût exister. La cathédrale n’en finissait plus d’aligner ses vitraux et ses soubassements de pierre. Elle avait renoncé à les compter pour trottiner derrière Croquemitaine d’un pas qui, loin d’être le sien, la laissait en nage, malgré la fraîcheur de l’air.
    –  Te voilà rendue, Isa, déclara le nain en tapant trois coups de heurtoir contre le bois massif.
    Isabeau tressaillit !
    –  Comment sais-tu…, commença-t-elle, mais la porte s’ouvrait déjà et le nain partit en courant et en chantonnant.
    –  Isa est belle, c’est une Isabelle !
    Abasourdie, Isabeau le regarda tourner au coin d’une venelle qui s’ouvrait à l’angle de la bâtisse et disparaître aussitôt. Lorsqu’elle reporta son attention sur le lieu même où elle se trouvait, un prêtre sobrement vêtu d’une robe rapiécée la dévisageait d’un air affable, planté dans l’embrasure de la porte.
    –  Je suis…
    –  Je sais ; entrez, damoiselle, vous êtes la bienvenue ici. Je suis le père Boussart, enchaîna-t-il en s’effaçant pour lui livrer passage.
    Renonçant à comprendre plus avant, Isabeau suivit l’abbé qui paraissait à peine plus âgé qu’elle et qui déjà allongeait le pas dans le corridor éclairé de petits vitraux. Elle entendait dans le lointain les voix psalmodiantes des moines et se sentit gagner par une sérénité rassurante. Tandis que le père s’arrêtait devant une porte qui lui barrait le passage, pour l’ouvrir, elle se demanda si, à l’exemple de Croquemitaine, tout Paris ne savait pas déjà son nom…
     
    Antoinette affichait un air de triomphe lorsqu’elle se trouvait en compagnie d’Albérie dans une pièce et que le prévôt s’y annonçait. Cela le mettait mal à l’aise, même si son épouse ne paraissait en aucune façon incommodée par ces manières. On eût dit même qu’elle ne la voyait pas. Malgré cela, Huc ne parvenait à se sentir l’esprit badin comme cela aurait été de circonstance, car, il devait bien l’admettre malgré lui, quelque chose de plus fort que du désir battait en lui pour Antoinette. Mais il ignorait si c’était de l’amour ou de la crainte. Non pas qu’il eût peur d’Antoinette de Chazeron, non, c’était plutôt en lui qu’il pressentait un véritable danger. S’il se trahissait d’une manière ou d’une autre, il réduirait à néant ce qu’il protégeait depuis tant d’années. Et cette idée lui était insupportable.
    A son retour à Montguerlhe, il avait tenté de parler à son épouse pour mettre fin à ses doutes. Mais, alors qu’il l’avait attendue toute la nuit assis sur son lit, Albérie n’avait pas paru. Il comprit qu’elle avait dû rester auprès de sa nièce, dans la grotte. Lorsqu’il descendit aux communs le lendemain, après une nuit détestable, il la trouva en train de servir son matinel à une Antoinette rayonnante et hautaine, faisant récit de la bravoure et de la prévenance du prévôt durant les heures terribles qui avaient ébranlé Vollore. Nullement troublée, Albérie s’était avancée vers lui l’air avenant et lui avait proposé de prendre place à la table. Mais Huc s’était enfui en bougonnant qu’il était pressé et n’avait pas faim. En réalité, il n’aurait pu supporter de regarder Albérie les servir, lui et la châtelaine qui avait affiché à son entrée un plaisir ostensible.
     
    Le froid s’était fait vif. Les premiers flocons de neige ourlaient la forêt thiernoise d’un voile de silence immaculé. Huc avait tenu à vérifier que la plupart des sans-abri de l’après-tempête pouvaient regagner leurs habitations. Fort heureusement, cet hiver les réserves de bois ne manqueraient pas. François de Chazeron était parti pour Clermont-Ferrand depuis une semaine. Lui aussi voulait profiter des dernières clémences du temps pour obtenir des crédits auprès du duc de Bourbon dont il était le vassal. Antoinette avait renoncé à beaucoup de folies pour la rénovation du château, mais la facture était quand même lourde. Il fallait de l’argent, et François, somme toute, avait trouvé plaisant de s’échapper quelques jours de Montguerlhe, puisque le duc de Bourbon se trouvait en Auvergne.
    Dès lors, Huc n’avait pu empêcher Antoinette de le suivre dans son soutien aux miséreux. Nul n’aurait songé à y redire. Elle le faisait depuis longtemps. Au

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