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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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incroyablement sereine, assise, nue malgré la fraîcheur, à ses côtés. Philippus se résigna en soupirant. Oui, il voulait savoir et, plus encore, il voulait comprendre. Non seulement le secret de cette femme mais ce qui lui arrivait à lui, Philippus von Hohenheim, à se sentir malgré les circonstances plus heureux et léger qu’il ne l’avait jamais été.
    Alors elle raconta : Isabeau, Benoît, François de Chazeron, Huc de la Faye, l’abbé du Moutier, Albérie. Tout ce qu’elle savait ou supposait jusqu’à cette fameuse nuit où elle l’avait vu pour la première fois, endormi par les soins de sa tante dans le lourd fauteuil. Elle n’avait pu s’expliquer pourquoi alors sa haine s’était enfuie.
    Les nuits suivantes, elle n’avait pas eu l’audace de retourner dans la chambre. Elle n’avait cessé de penser à lui et cette obsession l’effrayait. Puis Albérie était venue, furieuse parce que François allait mieux. Elle n’avait pas osé lui révéler que ce n’était pas par crainte d’être découverte qu’elle n’avait pas accompli sa tâche, mais parce que brusquement elle lui semblait sans objet.
    Elle avait promis à sa tante d’en finir. L’évocation de Benoît et d’Isabeau avait suffi. Jusque-là, elle n’avait souhaité que venger la mort de sa mère. A cause de Philip-pus elle mesurait ce que le seigneur de Vollore avait détruit. Pour la première fois, elle mit un nom sur ses propres sentiments. Elle était tombée amoureuse de Phi-lippus. Elle ignorait comment cela était possible, mais elle ne pouvait douter de ce qui fouaillait son ventre et son cœur en pensant à lui. Albérie avait administré le somnifère. En s’apercevant qu’il feignait de dormir, elle avait délibérément laissé le passage déverrouillé dans l’espoir qu’il la rejoindrait.
    Elle avait attendu le restant de la nuit et jusqu’au mitan du jour suivant. Elle avait fini par se dire qu’elle s’était trompée. Et puis Albérie avait surgi, défaite et tremblante, les yeux rougis d’avoir trop pleuré. Elle lui avait raconté que Philippus avait disparu, qu’il l’avait probablement suivie, que la maisonnée était en émoi et que tout était compromis.
    –  Je n’ai vu ni entendu personne sur mes traces, ma tante, je puis l’affirmer.
    –  Alors il se sera égaré par les souterrains. Peu importe. Tu dois le trouver, Loraline, avant qu’il ne découvre et trahisse notre secret. Accompagne-toi des loups et débarrasse-nous de lui.
    –  Mais je ne peux pas tuer cet homme ! s’était-elle indignée.
    Alors sa tante avait haussé le ton en l’empoignant par le bras sans ménagement :
    –  Je crois que tu ne comprends pas, ma nièce. C’est lui ou toi désormais. J’ai écarté les soupçons de mon époux, mais il va fouiller la chambre de François. Si Philippus a pu forcer le passage, c’est qu’il n’était pas correctement fermé. Retournes-y et barre l’accès avant que lui aussi ne vienne jusqu’à toi…
    –  Quelle importance qu’il vienne ! Il sait bien que j’existe.
    –  Tu ne comprends donc rien, sotte que tu es. Je l’ai aiguillé sur une autre piste. Il doit nous croire innocentes, Loraline, pour pouvoir reporter ses soupçons sur Antoinette de Chazeron, pour qu’elle paie avec son époux tout le mal qu’ils nous ont fait. Il faut me croire et obéir, quoi qu’il t’en coûte, ou nous serons perdues l’une et l’autre.
    Loraline avait fini par se soumettre une fois de plus, tandis qu’Albérie ajoutait :
    –  Ne t’approche plus de François de Chazeron pour l’instant. C’est trop dangereux. Débarrasse-nous de ce médecin. Les loups ont faim. Il te suffira de les lâcher sur ses traces.
    Elle n’avait pas osé lui avouer ses sentiments pour Philippus. Ils étaient si confus. Elle savait qu’Albérie avait raison, et pourtant elle ne pouvait s’empêcher de penser que Philippus aurait pu facilement l’arrêter, appeler la garde et la perdre. Son instinct se raccrochait à cette évidence. Il aurait pu. Il aurait dû. Mais il ne l’avait pas fait.
    Elle était retournée dans le souterrain et l’avait trouvé. Il gisait sans connaissance, la jambe à demi avalée par la crevasse, le front couvert de sang. Elle avait eu l’impression que tout s’effondrait autour d’elle. Puis elle l’avait examiné, s’était rassurée d’entendre son pouls. Elle avait envoyé Cythar chercher les autres loups tandis qu’elle courait

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