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La chambre maudite

La chambre maudite

Titel: La chambre maudite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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le plus sage. Il fit débarrasser une pièce qui servait de débarras, puis y transporta le malade, contre son gré. Albérie s’était consignée chez elle depuis leur entretien, se prétendant souffrante. Elle ne le laissait pas entrer, et seule la grosse Jeanne était autorisée à lui porter la mangeaille. Huc se sentait responsable. Il refusait l’idée d’avoir à choisir entre son amante et son épouse, et cependant il comprenait combien cette dernière avait raison.
    Antoinette était éprise de lui, sincèrement. Elle n’aurait aucune difficulté à écarter sa rivale. Lors, tout s’effondrerait. Non ! décida-t-il. La camarde n’aurait pas François de Chazeron. Le malheur avait suffisamment terni cette maison !
    Il éconduisit courtoisement Antoinette en lui rappelant les devoirs de sa charge auprès de son maître et, succédant à Philippus, il s’installa au chevet de François.
     
    Antoinette réfréna sa colère. Si les raisons lui en échappaient, elle avait désormais la certitude que son époux était victime de quelque magie noire ou pis encore. Or la plénitude que lui apportait son amant se satisfaisait fort bien de la mort de François. Que Huc dépense son énergie à l’empêcher lui apparaissait comme une trahison insupportable. Elle aussi s’enferma dans sa chambre. Une semaine passa donc sur Montguerlhe dans un silence morbide de tension et de rancœur.
    Plus que jamais dressée sur son éperon rocheux, encerclée par la neige et le froid, la forteresse tout entière semblait attendre sa délivrance.
     
    C’était comme un battement. Presque une succession de coups, tant c’était lancinant à l’intérieur de son crâne. Plusieurs fois il eut envie d’ouvrir les yeux, mais l’idée même de forcer ses paupières lui faisait mal. D’ailleurs son corps entier n’était que douleur, de sorte que le simple fait de respirer rendait insoutenable la moindre réflexion. Alors il se laissait emporter dans un sommeil pénible, persuadé qu’il n’en finissait pas de mourir.
    Peu à peu, cependant, la souffrance dans sa tête s’apaisa. Par moments, son corps le brûlait. A d’autres, un froid glacial le faisait claquer des dents. Au terme d’un temps qu’il aurait été bien incapable de mesurer, il vit défiler dans sa mémoire ce qui l’avait conduit à cet état.
    Il ouvrit les yeux.
    Une jeune femme était penchée au-dessus de son front et lui bassinait les tempes. Du moins c’est-ce qu’il en déduisit, car, rythmés par le mouvement des compresses, deux seins blancs et ronds se dressaient au-dessus de sa tête dans l’échancrure d’un mantel de peau de loup.
    Philippus sentit malgré lui son souffle s’accélérer. Il referma les yeux sur cette vision curieusement indécente, puis les rouvrit en sentant la caresse se retirer de son front. Les deux seins avaient fait place à deux prunelles d’un vert amande pailleté d’or qui le fixaient sans qu’il puisse seulement définir ce qu’elles éveillaient en lui. Et cependant il eut le sentiment qu’il venait de naître de ce regard-là.
    Ils se scrutèrent ainsi longuement, puis le visage s’agrandit au-dessus du sien, pour s’éloigner. Comme Philippus tournait la tête pour suivre la silhouette qui se dirigeait vers un coin de la grotte, il s’aperçut qu’ils n’étaient pas seuls, et encore moins au castel de Montguerlhe où il s’était imaginé de retour. Dans la lueur dansante des lanternes, son regard accrocha des dizaines de paires d’yeux qui brillaient. Son cœur s’accéléra lorsqu’une d’entre elles s’approcha de lui, se détachant de la pénombre en grognant. Il retint un cri de surprise et de frayeur. Le loup plaqua sa gueule contre son visage et le renifla. A cet instant, une voix émit un son bref et l’animal recula pour se coucher docilement à son chevet.
    Philippus se mit à trembler. Il était à la merci d’une meute de loups affamés par les rigueurs de l’hiver. La jeune femme s’approcha et lui releva la nuque d’une main ferme.
    –  Tu n’as rien à craindre d’eux ni de moi. Bois, ordonna-t-elle en positionnant devant ses lèvres un bol de terre.
    Philippus obéit sans rechigner, tant sa gorge lui semblait sèche soudain. A sa peur s’ajoutait un trouble grandissant. Le même que celui ressenti dans la chambre de François, avant qu’il s’élance dans le sillage de cette inconnue, car, bien qu’il s’en défendît, il ne parvenait à détacher ses

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