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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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beau. Ses longues jambes aux
     cuisses fermes et dures, sa démarche assurée, son dos et ses épaules musclées
     auxquelles elle aimait se pendre en gémissant... « Allons, Julianna, reprends
     tes sens. » Sa proéminente poitrine serrée dans sa robe avait eu de l’effet sur
     son homme, elle avait perçu le regard posé sur ses seins... « Julianna, pour
     l’amour, pense à autre chose... Ah oui ! Marguerite est enceinte aussi. Il
     faudrait pas qu’elle le perde, celui-là. Je devrais l’aider. »
    — Si tu veux, tu peux m’envoyer les garçons chez nous pour un p’tit bout de
     temps, offrit-elle.
    Marguerite regarda ses fils au loin. Ils s’amusaient à escalader le haut tas de
     planches.
    — T’es ben fine, ma Julianna, mais c’est pas comme cet hiver. J’les vois pas, y
     passent leur temps dehors. Ça va bien, j’te dis.
    Rendu au sommet de la montagne de bois, Jean-Marie essaya, tel un funambule, de
     traverser en équilibre une longue planche.
    — Regarde papa ! cria l’enfant, tout fier de l’exploit. Chus même pas
     tombé !
    Ti-Georges eut à peine le temps de lever les yeux que le gamin perdit tout à
     coup pied et dégringola de son perchoir. Aussitôt Marguerite s’élança.
     Ti-Georges lâcha tout et, suivi de François-Xavier,alla
     rejoindre sa femme vers la forme de son aîné, par terre, à côté de la charrette,
     un madrier de travers sur les jambes.
    Julianna serra son bébé très fort contre elle et accourut sur la scène de
     l’accident. François-Xavier s’agenouilla près de Jean-Marie et lui
     demanda :
    — Ça va mon bonhomme ?
    Souffrant, le visage très pâle, l’enfant répondit :
    — J’ai mal à ma jambe…
    Ti-Georges retira le lourd morceau de bois et le rejeta de côté. Avec douceur,
     François-Xavier tâta le membre tordu. Jean-Marie ne put retenir un cri de
     douleur et perdit connaissance.
    Il reprit ses esprits bien longtemps après. Il fut étonné de ne pas reconnaître
     tout de suite l’endroit où il était. Le visage de sa tante Julianna se pencha
     sur lui et d’un doux sourire lui expliqua :
    — On t’a installé chez nous. On t’a fait un lit dans notre salon pour pas que
     tu aies trop chaud pis en plus, j’vas pouvoir prendre soin de toé. C’était plus
     commode que de te transporter à votre ferme. Surtout avec les trous d’eau.
    Jean-Marie releva un peu la tête et regarda sa jambe. Au bout de celle-ci, une
     lourde chaudière en métal était suspendue. Julianna répondit à sa question
     muette.
    — C’est le ramancheux du rang trois qui a dit de faire ça. Ta jambe est cassée
     pis si tu veux pas qu’a reste croche, y va falloir que t’endures ton cinq livres
     de roches.
    Marguerite arriva, le visage inquiet.
    — Jean-Marie, t’es réveillé !
    — Maman, ça fait mal, pleurnicha l’enfant.
    Marguerite s’adressa à Julianna.
    — Le médicament du ramancheux a pus l’air de faire effet…
    Ti-Georges entra lui aussi dans la pièce, suivi d’Elzéar et de
     François-Xavier.
    — Un grand garçon de sept ans, ça chiale pas comme un bébé,dit-il d’un ton tranchant. Marguerite caressa tendrement les cheveux de son
     fils en jetant un regard de reproche à son mari. Pourquoi celui-ci se
     montrait-il si dur à l’endroit de son plus vieux ? Il n’avait jamais su comment
     s’y prendre avec ses enfants… Ti-Georges était exigeant et voulait que tout soit
     parfait, à commencer par ses fils. Marguerite soupira. Jean-Marie avait fait la
     bêtise d’être maladroit. Georges ne lui pardonnerait pas, surtout s’il gardait
     des séquelles de l’accident. La blessure n’était pas belle et on lui laissait
     peu d’espoir de guérison complète… Elle reporta son attention sur son
     fils.
    — J’vas te préparer une autre potion, le consola-t-elle gentiment. Tu vas voir
     quand tu vas l’avoir bu, ça va te rendormir.
    — J’veux m’en aller chez nous, supplia le garçonnet.
    François-Xavier intervint.
    — Mon pauvre Jean-Marie, tu pourras pas bouger d’icitte avant au moins trois
     semaines !
    Elzéar qui n’avait pas osé dire un mot encore demanda :
    — Trois semaines, c’est-tu long un peu ou c’est-tu long beaucoup ?
    Julianna trouvait cet enfant de cinq ans adorable.
    — Viens, dit-elle, j’ai cru entendre pleurer ton cousin, y doit encore avoir
     faim.
    La jeune femme quitta le salon, entraînant l’enfant par la main. D’un geste
     discret,

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