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La chapelle du Diable

La chapelle du Diable

Titel: La chapelle du Diable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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de l’eau un petit bilboquet de bois
     dégoulinant.
    Il ne reconnaissait pas le jouet.
    — C’est à toé ?
    — Papa Henry.
    François-Xavier en perdit la voix. D’un coup sec, il sortit du bain, s’essuya
     rapidement et enfila une combinaison propre qu’il avait pris la peine de déposer
     sur le dos d’une chaise.
    Ses pieds laissaient de grandes empreintes mouillées sur les lattes de bois et
     il était facile de suivre la piste jusqu’à la chambre où Julianna, les larmes
     aux yeux, se désespérait de ces retrouvailles manquées. Près d’elle, dans son
     berceau, Yvette dormait, repue de la dernière tétée.
    François-Xavier referma rageusement la porte au nez de son fils
     qui l’avait suivi.
    — Henry Vissers ! Y est venu icitte cet hiver ?
    — François-Xavier, de quoi tu parles ? Henry, y est venu faire son jour de l’An
     pis donner un cadeau à petit Pierre. Y est même pas resté à manger, il avait un
     souper officiel à l’hôtel. D’ailleurs, il te fait dire tous ses bons vœux.
    — Pis pourquoi le p’tit l’appelle papa ?
    — Pierre appelle Henry papa ?
    François-Xavier montra la preuve, le jouet de bois, en guise
     d’explication.
    — Il m’a lancé ça en disant : « papa Henry ».
    Julianna éclata de rire, oubliant toute animosité envers son mari.
    — Pauvre François-Xavier, si tu te voyais la tête !
    Après son accès d’hilarité, elle expliqua :
    — Pierre commence à dire quelques mots pis pour lui tous les messieurs sont des
     papas. Il appelle le curé à l’église papa.
    — Le curé, papa ?
    — Oui ! dit Julianna en pouffant à nouveau.
    D’un air piteux, François-Xavier alla s’asseoir près de sa femme. Gêné par son
     accès de jalousie, il l’enlaça tendrement.
    — Ma princesse... J’me suis ben ennuyé de toé.
    — Moé aussi, mon beau roux, moé aussi.
    Ils s’embrassèrent, chassant ces longs mois de séparation.
    La présence de sa femme, son corps, sa voix, tout ce qui était sa Julianna lui
     avait tellement manqué.
    — Cet hiver a été un vrai enfer, murmura-t-il. Pis mon fils me reconnaît même
     pus...
    — C’est rien qu’un bébé encore. Je lui montrais tout le temps notre photo de
     mariage en disant papa. Regarde ta fille astheure, notre p’tite Yvette.
    François-Xavier se pencha sur le berceau et admira sa première fille.
    — A l’a pas de cheveux rouges, elle.
    — Quand le soleil entre par la fenêtre, elle a des reflets. Viens, embrasse-moé
     encore.
    François-Xavier ne se fit pas prier et, malgré lui, ses mains cherchèrent à
     retrouver le corps de sa femme. Gentiment, elle le repoussa.
    — Tu pourras pas me toucher avant mon quarante jours. Tu le sais ben que c’est
     de même après les accouchements, dit Julianna.
    François-Xavier puisa dans tout son courage et, respirant un bon coup,
     demanda :
    — Pis quel jour elle est née ?
    — Le 27 mars.
    — Bon, attends que j’calcule le temps qui reste… Mars, avril, mai...
    Julianna le consola d’une caresse sur la joue.
    — On trouvera ben le moyen de tricher un peu...
    Tout à coup, derrière la porte close de la chambre, le couple entendit Pierre
     appeler pour qu’on le laisse entrer.
    — Maman ? Maman ?
    François-Xavier délaissa à regret le corps chaud de sa femme et alla ouvrir à
     son petit garçon.
    Celui-ci le regarda un moment puis, avec un grand sourire, se jeta dans ses
     bras en disant :
    — Papa !

    — À la santé de notre retour ! fit Ti-Georges en entrechoquant son verre contre
     celui de François-Xavier.
    — Pis à la naissance d’Yvette !
    Attablés, les hommes trinquaient. Ils venaient de terminer de souper et ils
     avaient fait honneur à la tarte au sucre deux fois plutôt qu’une.
    Ti-Georges avait également pris son bain et les deux hommes sentaient bon le
     savon. Tous les enfants dormaient. Ils avaient racontéleurs
     dures journées passées dans le bois, les conditions difficiles et quelques
     anecdotes sur d’autres bûcherons. Ils étaient fiers de la paie qu’ils
     ramenaient. Il leur faudrait songer à leur avenir et s’informer des derniers
     développements du comité de défense, mais pour le moment, l’heure était aux
     retrouvailles.
    Ti-Georges s’étira un peu et regarda son épouse avec des yeux brillants.
    — Bon ben Marguerite, moé chus ben fatigué... Ça fait qu’on va aller se coucher
     tout de suite.
    Marguerite rougit devant

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