La chute de l'Empire Romain
qu’il exerce sur ces Barbares.
De son palais, Galla Placidia voit les cavaliers huns s’éloigner.
Ceux-là ont découvert les chemins qui mènent à l’Italie, à Aquilée, à Ravenne, à Rome. Ils reviendront.
Galla Placidia, à cet instant, a l’intuition que le destin de l’empire d’Occident, donc celui de Valentinien III, dépend de ce peuple barbare sauvage, cruel, et de cet homme, Aetius, ambitieux, habile et courageux.
Galla Placidia se souvient qu’elle a pensé : « Aetius, allié ou ennemi, est le dernier Romain. »
20.
Galla Placidia, au cours des premières années de sa régence, alors que Valentinien III était un enfant d’à peine sept ans, n’avait pas imaginé qu’elle aurait ressenti le besoin d’avoir près d’elle un Romain de la trempe d’Aetius.
Alors que tous les généraux, les sénateurs, les fonctionnaires qui résidaient à Ravenne − et Galla Placidia elle-même − avaient craint que les Huns ne refusent de s’éloigner afin de piller Ravenne, les campagnes et villes environnantes, Aetius avait réussi à les convaincre de quitter l’Italie, avec pour prix de leur départ ces coffres remplis de pièces d’or et quelques otages comme garantie qu’ils ne seraient pas attaqués par l’armée romaine. Et Aetius, qui avait épousé une princesse barbare wisigothe, leur confie son propre fils.
Puis il part pour la Gaule, bat les tribus franques qui envahissent le nord de la province dont il est le préfet et, au lieu de les massacrer ou de les refouler, il leur accorde le droit de se fédérer dans la vallée de la Meuse.
Et les courriers qu’il fait parvenir à Galla Placidia réaffirment son attachement à l’empereur Valentinien et à la régente.
Le plus souvent, Galla ne répond pas.
Elle craint qu’Aetius ne veuille s’emparer du pouvoir, qu’au lieu de renforcer l’Empire il songe lui aussi, comme Théodoric et les Wisigoths en Aquitaine, Genséric le Vandale en Espagne et en Afrique, à se tailler un royaume.
Galla hésite, pleine de soupçons. Elle doute de la survie de l’empire d’Occident alors qu’elle le gouverne.
Lorsqu’elle se rend auprès de son fils empereur, elle regarde droit devant elle, le corps tendu, imaginant le pire : le meurtre ou l’enlèvement de Valentinien.
Car elle ne se sent pas maîtresse de Ravenne.
Les troupes d’Aspar occupent toujours la ville et sa région pour − prétend l’empereur d’Orient − protéger Valentinien III et sa mère d’un retour des Huns.
Prétexte ! Galla Placidia se méfie de tous !
Elle a nommé le général Félix Premier ministre, mais ce n’est qu’un ambitieux, obtenant de Valentinien − « mon fils, un enfant », dira Galla − le titre de patrice, qui en fait presque l’égal de l’empereur !
Félix se soucie lui aussi des menaces que les Huns font peser sur l’Italie, sur Ravenne, sur Rome. Il prend la décision de faire construire des forteresses, le long du limes , de manière à protéger Ravenne.
Galla Placidia l’observe, mesure ses ambitions, la manière dont il tente d’affaiblir l’autorité du préfet de la province d’Afrique, le comte Boniface, ou d’Aetius, préfet de Gaule.
Les nuits de Galla Placidia sont rongées par le doute. Comment l’empire d’Occident peut-il survivre alors que les rivalités opposent les uns aux autres les détenteurs du pouvoir ?
Où est la Virtus romaine ?
Où est la romanité ?
Galla Placidia apprend que le comte Boniface vient d’épouser une princesse vandale adepte de l’hérésie arienne. Boniface se convertit et leur fils est baptisé par un évêque arien !
Galla Placidia est accablée. C’est comme si sa politique était inversée.
Les Romains − Aetius, Boniface, tant d’autres et même l’empereur d’Orient, Théodose, qui a épousé Eudoxie, la fille d’un chef franc − épousent des Barbares, se convertissent à l’hérésie arienne. Ou bien demeurent païens.
Qui peut savoir ce qu’est la religion d’Aetius ?
Galla serre les poings, bras croisés sur sa poitrine. Elle ne cédera pas. Les Romains qui choisissent l’hérésie sont des ennemis qu’il faut combattre.
L’empire d’Occident sera catholique même s’il faut briser par les armes les hérétiques.
Elle décide d’envoyer une armée en Afrique pour écraser le comte Boniface.
Mais toutes les provinces de l’Empire sont menacées. Les Goths du roi Théodoric attaquent Arles, préfecture de la
Weitere Kostenlose Bücher