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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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publique.
    — Pas au sens littéral du
terme, naturellement. Le président Wilson estime qu’un chef d’État doit tenir
compte de l’opinion publique de la même façon qu’un marin tient compte du vent :
en l’utilisant pour pousser son bateau dans une direction ou une autre, sans
jamais chercher à s’y opposer de front.
    — J’aurais tant aimé étudier
ces choses-là ! soupira-t-elle. Hélas, mon père n’a pas voulu que j’aille
à l’université.
    — Il devait redouter que
vous n’y appreniez à fumer et à boire du gin, dit Gus avec un sourire.
    — Ou pire, je n’en doute pas !»
Venant d’une jeune fille, la remarque était osée. L’étonnement dut se lire sur
le visage de Gus, car elle s’empressa d’ajouter : « Pardon, je vous
ai choqué.
    — Mais pas du tout !»
En réalité, il était sous le charme. À seule fin de prolonger la conversation,
il demanda : « Quelle matière choisiriez-vous d’étudier si vous
alliez à l’université ?
    — L’histoire, je pense.
    — J’aime beaucoup l’histoire.
Une période en particulier ?
    — Je voudrais comprendre mon
passé. Pourquoi mon père a-t-il été obligé de quitter la Russie ? Pourquoi
la vie est-elle plus facile en Amérique ? Il doit bien y avoir des
explications.
    — Bien sûr !» s’écria
Gus. L’idée qu’une aussi jolie fille puisse partager ses intérêts intellectuels
le faisait frémir de joie. Soudain, une vision lui traversa l’esprit. Il
imagina qu’ils étaient mariés et se retrouvaient un soir, après une réception,
dans son boudoir, à discuter des affaires du monde avant de se coucher ;
lui-même en pyjama, la regardant ôter ses bijoux et retirer sans hâte ses
vêtements… Quand il surprit son regard, il eut le sentiment qu’elle avait
deviné ses pensées. Embarrassé, il chercha en vain quelque chose à dire.
    Sur ces entrefaites, l’orateur
arriva et le silence se fit.
    La causerie lui plut davantage qu’il
ne s’y était attendu. Le conférencier avait apporté des autochromes en couleurs
de plusieurs œuvres du Titien et les projetait sur un grand écran blanc à l’aide
d’une lanterne magique.
    La conférence achevée, Gus voulut
reprendre sa conversation avec Olga. Il en fut empêché par Chuck Dixon, un
jeune homme qu’il connaissait depuis les bancs de l’école. Chuck possédait un
charme et une éloquence facile que Gus lui enviait. Ils avaient le même âge,
vingt-cinq ans, mais en sa présence, Gus se sentait gauche comme un adolescent.
« Olga, décréta le nouveau venu d’un ton jovial, il faut absolument que je
vous présente à mon cousin. Il n’a pas cessé de vous dévorer des yeux de l’autre
bout de la salle !… Désolé de te priver d’une compagnie aussi
enchanteresse, Dewar, ajouta-t-il avec un sourire affable, mais tu ne peux
quand même pas l’accaparer tout l’après-midi. » Passant un bras possessif
autour de la taille d’Olga, il l’entraîna à sa suite.
    Gus se sentit abandonné. Ils s’étaient
si bien entendus. D’habitude, il avait beaucoup de mal à engager la
conversation avec une jeune fille. Avec Olga, il avait devisé de tout et de
rien le plus facilement du monde. Jusqu’à ce que Chuck Dixon, qui avait
toujours été le dernier de la classe, l’embarque sans plus de façons que pour
prendre une coupe sur le plateau d’un serveur.
    Gus promenait les yeux sur l’assistance
à la recherche d’un visage connu, quand une jeune fille borgne l’accosta.
    Le soir où il avait fait la
connaissance de Rosa Hellman, à un dîner de bienfaisance en l’honneur de l’orchestre
symphonique de Buffalo où jouait son frère, il avait cru qu’elle lui faisait de
l’œil. En réalité, l’une de ses paupières restait constamment fermée. Son
infirmité se remarquait d’autant plus qu’elle avait de jolis traits. En outre,
par défi probablement, elle s’habillait avec une élégance provocante. Aujourd’hui,
elle portait un canotier coquettement incliné sur le côté qui lui donnait un petit
air déluré.
    Lors de leur dernière rencontre,
Rosa travaillait comme rédactrice au Buffalo Anarchist, un journal
radical à tirage limité. « Les anarchistes s’intéressent à l’art ?
demanda Gus.
    — Je suis maintenant à l’ Evening
Advertiser. »
    Gus s’étonna. « Le rédacteur
en chef est au courant de vos opinions politiques ?
    — J’ai mis un peu d’eau dans
mon vin, mais il connaît mon passé,

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