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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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tombée. Les dizaines de fenêtres de la façade de ce bâtiment de
style classique étaient toutes illuminées et la vaste esplanade était noire de
monde. Plusieurs milliers de soldats et d’ouvriers avaient eu la même idée que
Grigori.
    Un homme muni d’un porte-voix
était en train de faire une annonce, qu’il répétait à plusieurs reprises.
Grigori se fraya un passage vers l’avant pour l’entendre.
    « Les membres du groupe des
ouvriers du comité de l’Industrie de guerre ont été libérés de la prison de
Kresti », criait-il.
    Grigori ne savait pas de qui il s’agissait,
mais leur nom lui plaisait.
    « Avec d’autres camarades,
ils ont formé le comité exécutif temporaire du soviet des députés ouvriers. »
    C’était une bonne idée, jugea
Grigori. Un soviet était un conseil de représentants. Il se souvenait qu’en
1905, à Saint-Pétersbourg, un soviet, élu par des ouvriers, avait organisé des
grèves. Il avait alors à sa tête un homme charismatique, Léon Trotski, qui
avait été exilé depuis.
    « Tout cela sera officiellement
annoncé dans une édition spéciale des Izvestia. Le comité exécutif a
nommé une commission chargée de l’approvisionnement alimentaire, qui veillera à
ce que les ouvriers et les soldats soient nourris. Il a également créé une
commission militaire pour défendre la révolution. »
    Il n’était pas question de la
douma. La foule salua ces initiatives avec joie, mais Grigori se demandait si
les soldats recevraient leurs ordres d’une commission militaire cooptée. Où
était la démocratie dans tout ça ?
    La dernière phrase de la
proclamation lui donna la réponse. « Le comité appelle les ouvriers et les
soldats à élire leurs représentants au soviet dans les plus brefs délais et à
les envoyer ici, au palais, pour qu’ils participent au nouveau gouvernement révolutionnaire ! »
    C’était exactement ce que Grigori
avait souhaité entendre : le nouveau gouvernement révolutionnaire serait
un soviet d’ouvriers et de soldats. Désormais, le changement se ferait sans
désordre. Débordant d’enthousiasme, il quitta l’esplanade et reprit le chemin
de la caserne. Tôt ou tard, les soldats regagneraient leurs lits. Il avait hâte
de leur annoncer la bonne nouvelle.
    Bientôt, pour la première fois de
leur vie, ses camarades et lui participeraient à des élections.
    4.
    Le lendemain matin, le 1 er  régiment
de mitrailleurs se rassembla dans la cour d’honneur pour élire son représentant
au soviet de Petrograd. Isaak proposa le sergent Grigori Pechkov.
    Il fut élu à l’unanimité.
    Grigori en fut ravi. Il
connaissait la vie des soldats aussi bien que celle des ouvriers. Il ferait
entrer l’odeur de la vie réelle dans les couloirs du pouvoir, l’odeur de la
graisse des machines. Il n’oublierait jamais ses racines, jamais on ne le
verrait en chapeau haut-de-forme. Il veillerait à ce que la révolte soit
synonyme de progrès et non une violence débridée. Désormais, il avait une vraie
chance de pouvoir rendre la vie plus douce à Katerina et Vladimir.
    D’un pas vif, il traversa le pont
Liteïni, seul cette fois, et se dirigea vers le palais de Tauride. La priorité
absolue était le pain. Katerina, Vladimir et les deux millions et demi d’habitants
de Petrograd devaient avoir de quoi manger ! Mais maintenant qu’il était
au pouvoir – dans son imagination, du moins –, il se sentait un peu
découragé. Il fallait que, dans les campagnes, fermiers et meuniers expédient
sur-le-champ davantage de farine aux boulangers de Petrograd – or ils ne
le feraient que s’ils étaient payés. Comment le soviet trouverait-il l’argent
nécessaire ? Il commençait à se demander si renverser le gouvernement n’avait
pas été la partie la plus facile au regard de ce qui les attendait.
    Le palais était constitué d’un
long corps de bâtiment flanqué de deux ailes. Grigori découvrit que la douma et
le soviet étaient l’un et l’autre en session, la douma dans l’aile droite,
chose pertinente pour ce vieux parlement des classes moyennes, le soviet dans l’aile
gauche, ce qui était tout aussi bien. Mais qui décidait ? Personne n’en
savait rien. Il fallait pourtant trancher avant de pouvoir aborder les problèmes
réels, pensa Grigori avec impatience.
    Sur les marches du palais, il
repéra Konstantin à sa silhouette dégingandée et à ses cheveux noirs
ébouriffés. Il se rendit compte alors,

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