Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
Vom Netzwerk:
s’approchèrent
de lui. Un colonel demanda : « Que faites-vous ici, sergent ?»
    Grigori l’ignora et s’adressa à
un caporal. « Je voudrais parler au chef de votre comité de soldats,
camarade. »
    Le colonel intervint : « Il
n’y a pas de comité de soldats dans cette brigade, camarade. Remontez en
voiture et dégagez. »
    Le caporal prit alors la parole,
d’un ton provocant qui dissimulait mal sa nervosité : « J’étais le
chef du comité de ma section, sergent… avant l’interdiction des comités,
naturellement. »
    La colère assombrit le visage du
colonel.
    C’était la révolution en
miniature, se dit Grigori. Qui aurait le dernier mot, le caporal ou le colonel ?
    D’autres soldats se rapprochèrent
pour écouter.
    « Dans ce cas, pourquoi
combattez-vous la révolution ? demanda Grigori au caporal.
    — Mais non, répliqua le
caporal, nous sommes ici pour la défendre.
    — On a dû vous mentir. »
Grigori se tourna et éleva la voix pour s’adresser aux autres. « Le
Premier ministre, le camarade Kerenski, a révoqué le général Kornilov, mais
Kornilov refuse de partir. Voilà pourquoi il vous envoie attaquer Petrograd. »
    Un murmure indigné parcourut le groupe.
    Le colonel avait l’air mal à l’aise.
Il savait que Grigori disait vrai.
    « Assez de mensonges !
fulmina-t-il. Partez immédiatement, sergent, ou je vous abats sur place.
    — Ne touchez pas à votre
arme, colonel. Vos hommes ont le droit de savoir la vérité. » Il regarda
la foule de plus en plus nombreuse. « N’est-ce pas ?
    — Oui ! lancèrent
plusieurs voix.
    — Je ne suis pas d’accord
avec tout ce qu’a fait Kerenski, reprit Grigori. Il a rétabli la peine de mort
et les châtiments corporels. Mais il est le chef de notre révolution. Alors que
votre général Kornilov veut détruire la révolution.
    — Mensonges ! cria le
colonel, bouillant de colère. Vous ne comprenez pas ? Ce sergent est un
bolchevik. Tout le monde sait qu’ils sont à la solde de l’Allemagne !
    — Comment savoir qui nous
devons croire ? s’interrogea le caporal. Tu dis une chose, sergent, et le
colonel en dit une autre.
    — Rien ne vous oblige à nous
croire, ni l’un ni l’autre. Allez vous informer par vous-mêmes. » Grigori
haussa encore le ton pour être sûr d’être entendu de tous. « Pourquoi
rester terrés dans cette école ? Allez à l’usine la plus proche,
interrogez les ouvriers, discutez avec les soldats que vous croiserez dans la
rue : vous saurez vite la vérité. »
    Le caporal hocha la tête. « Bonne
idée.
    — Il n’en est pas question,
protesta le colonel. Je vous interdis à tous de sortir d’ici. »
    C’était une grossière erreur,
songea Grigori, qui enfonça le clou : « Votre colonel refuse que vous
vous informiez par vous-mêmes. N’est-ce pas la preuve qu’il vous trompe ?»
    Le colonel posa la main sur son
pistolet. « C’est de l’incitation à la mutinerie, sergent. »
    Les hommes regardaient
alternativement le colonel et Grigori. C’était l’instant critique. Grigori n’avait
jamais été aussi proche de la mort.
    Il se rendit soudain compte qu’il
était en position d’infériorité. Pris dans le feu de la discussion, il n’avait
pas prévu ce qu’il ferait ensuite. Il avait son fusil à l’épaule, mais il lui
faudrait plusieurs secondes pour le prendre en main, ôter le cran de sûreté et
placer l’arme en position de tir. Le colonel mettrait beaucoup moins de temps
pour dégainer son pistolet et tirer. La peur s’empara de lui et il dut se
raisonner pour ne pas détaler comme un lapin.
    « Mutinerie ? dit-il
pour gagner du temps, en s’efforçant d’affermir sa voix. Quand un général
révoqué marche sur la capitale mais que ses troupes refusent d’attaquer le
gouvernement légitime, qui sont les mutins ? Pour moi, c’est le général et
les officiers qui exécutent ses ordres de traître. »
    Le colonel sortit son pistolet de
son étui. « Partez , sergent. » Il se tourna vers ses hommes. « Vous,
rentrez dans l’école et regroupez-vous dans le vestibule. Rappelez-vous que la
désobéissance à l’armée est un crime et que la peine de mort a été rétablie. J’exécute
le premier qui refuse d’obtempérer. »
    Il pointa son arme sur le
caporal.
    Grigori comprit que les hommes
étaient sur le point d’obéir à l’officier autoritaire et armé. À son grand
désespoir, il ne voyait plus qu’une

Weitere Kostenlose Bücher