La Chute Des Géants: Le Siècle
lendemain soir à sept
heures et demie, mais elle était déjà prise par le club de théâtre amateur d’Aberowen
qui répétait Henry IV, Première partie. Aussi décida-t-il que les
mineurs se retrouveraient au temple Bethesda. Billy et Da, ainsi que Len et
Tommy Griffiths et quelques autres syndicalistes militants firent le tour de la
ville pour prévenir tout le monde et apposer des affiches manuscrites dans les
pubs et les lieux de culte.
À sept heures et quart, le
lendemain soir, le temple était comble. Les veuves étaient assises au premier
rang, et tous les autres étaient debout. Billy se tenait sur le côté, tout
devant, pour mieux voir les visages des hommes. Tommy Griffiths était avec lui.
Billy était fier de l’audace et
de l’intelligence de Da, fier aussi qu’il ait remis sa casquette avant de
sortir du bureau de Morgan. Mais il regrettait tout de même qu’il n’ait pas été
plus agressif. Il aurait dû parler à Morgan sur le même ton qu’aux fidèles de Bethesda,
lorsqu’il menaçait du feu et du soufre de l’enfer ceux qui refusaient de voir
la vérité.
À sept heures trente précises, Da
réclama le silence. De sa voix impérieuse de prédicateur, il lut la lettre que
Perceval Jones avait adressée à Mrs Dai Cheval. « Le même message a
été envoyé aux huit veuves d’hommes tués dans l’explosion de la mine il y a six
semaines. »
Plusieurs voix s’élevèrent pour
crier : « C’est honteux !
— Notre règle veut que
personne ne prenne la parole sans que le président de la réunion ne l’y ait
invité, afin que chacun puisse se faire entendre à son tour. Je vous
remercierai d’observer cette règle, même en un jour comme aujourd’hui, où les
esprits sont évidemment échauffés.
— C’est quand même une
foutue honte ! hurla quelqu’un.
— Allons, allons, Griff
Pritchard, pas de jurons. Nous sommes dans un temple, et puis il y a des dames. »
Deux ou trois hommes s’exclamèrent :
« Bravo, bravo. »
Griff Pritchard, qui avait passé
tout son temps aux Deux Couronnes depuis la fin du poste dans l’après-midi,
murmura : « Pardon, monsieur Williams.
— Je suis allé voir hier le
directeur des houillères et je lui ai demandé formellement de retirer les avis
d’expulsion, mais il a refusé. Il m’a laissé entendre qu’il s’agissait d’une
décision du conseil d’administration et qu’il n’avait pas le pouvoir de la
modifier, ni même de la contester. Quand j’ai insisté pour que nous essayions
de trouver une solution, il m’a répondu que la compagnie avait le droit d’administrer
ses affaires sans ingérence extérieure. Je n’ai pas d’autres informations à
vous communiquer. » C’était un peu faible, regretta Billy. Pourquoi Da n’appelait-il
pas à la révolution ? Da désignait un homme qui avait levé la main. « John
Jones l’Épicerie.
— J’ai habité toute ma vie
au 23, Gordon Terrace, dit Jones. C’est là que je suis né et j’y suis toujours.
Mon père est mort quand j’avais onze ans. Ça a été vraiment dur pour ma mère,
mais elle a eu le droit de rester. Quand j’ai eu treize ans, je suis descendu à
la mine et, maintenant, c’est moi qui paye le loyer. Ça s’est toujours passé
comme ça. Il n’a jamais été question de nous flanquer dehors.
— Merci, John Jones. As-tu
une motion à soumettre ?
— Non, c’était juste pour
dire.
— J’ai une motion, moi,
lança quelqu’un. La grève ! »
Un chœur d’approbations salua
cette intervention.
Le père de Billy annonça : « Dai
Ouin-ouin.
— Voilà comment je vois les
choses, dit le capitaine de l’équipe de rugby de la ville. On ne peut pas
laisser la compagnie s’en tirer comme ça. Si on les laisse expulser les veuves,
comment être tranquilles pour nos familles ? Un homme pourra trimer toute
sa vie pour Celtic Minerais et mourir au turbin, et deux semaines plus tard, sa
famille se retrouvera à la rue ? Dai Syndicat a été au bureau, il a essayé
de mettre un peu de plomb dans la cervelle de Morgan-parti-pour-Merthyr, mais
ça n’a servi à rien, alors on n’a pas d’autre solution que la grève.
— Merci, Dai, dit Da.
Dois-je y voir une motion formelle en faveur d’une action de grève ?
— Oui. »
Bill s’étonna que Da l’ait
acceptée aussi vite. Il savait que son père voulait éviter qu’on en arrive là.
« Un vote ! » cria
quelqu’un.
Da reprit : « Avant
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