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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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place sur une des belles chaises droites qui bordaient le
     petit salon. Elle était venue une seule fois auparavant dans cette pièce, se
     souvint-elle en regardant autour d’elle. Le décor était aussi majestueux et
     aussi intimidant que dans son souvenir. C’était un peu comme entrer dans l’antre
     d’une bête mystérieuse. Une bête à la robe noire, pleine de pouvoirs…
    « Cette petite semble mourir de peur » se dit le curé en jetant un coup d’œil à
     la jeune fille. Il avait toujours été mal à l’aise avec ses paroissiennes, comme
     si elles n’oubliaient jamais qu’il n’était en fait qu’un simple homme de chair
     et de sang… Souvent, il s’était buté à deux yeux féminins reflétant le doute sur
     sa capacité de compréhension face à leurs problèmes, le mépris devant les
     solutions qu’il apportait… Et en plus, jeunes ou vieilles, ces créatures
     semblaient éprouver un malin plaisir à essayer le pouvoir de leurs charmes sur
     lui. Comme s’il représentait un défi. Combien de fois avait-il été irrité par
     ces têtes penchées légèrement de côté, ces sourires sensuels, ces bustes
     projetés en avant… Ah provocation, ah tentation, démon de démon !
    Brusquement, le curé se détourna et, les mains jointes derrière le dos, alla se
     placer devant la fenêtre, le regard au loin. Joséphine ne savait plus quoi
     penser ! Le prêtre semblait fâché ! Que savait-il ? Qu’est-ce que Patrick lui
     avait confié en se réfugiant au presbytère ? S’était-il confessé ? Avait-il dit
     qu’ils… qu’ils ? Le curé savait-il qu’elle… Ah, du bruit dans le passage !
     Patrick, ce doit être Patrick ! Il l’attendait, il l’avait entendue arriver !
     Lui et monsieur le curé allaient tout arranger. « On va se marier, Patrick, j’me
     suis tant ennuyée de toé, mon cœur bat à l’idée de te revoir, chus amoureuse de
     toé, j’t’aime ! »
    — Le café, m’sieur le curé, annonça la servante en passant la tête par la porte
     restée entrouverte. J’me suis permis d’apporter des petits pains et de la
     confiture aussi. Vous avez même pas eu le temps de déjeuner à
     matin, le réprimanda-t-elle en lançant un regard mauvais à Joséphine.
    — Allons, laisse-nous maintenant, lui répondit sèchement le prêtre sans même se
     retourner.
    Offusquée, la servante déposa abruptement le plateau sur le guéridon et s’en
     retourna à la cuisine. Hum, il y avait quelque chose de louche dans ce
     tête-à-tête entre la fille Mailloux et le curé… Tout à coup, elle se souvint
     qu’il y avait un important époussetage à faire près du salon du curé. Elle
     devait se mettre à l’ouvrage tout de suite et si, par hasard, elle entendait des
     choses intéressantes, ce ne serait pas de sa faute ! Dieu ne l’avait pas privée
     de ses oreilles !
    « Patrick, où es-tu ? Que se passe-t-il ? » D’instinct, Joséphine sentait que
     quelque chose clochait, l’absence de son amoureux, le silence du prêtre… Un long
     frisson d’appréhension lui parcourut l’échine.
    — Une tasse de café ? offrit le curé en sortant enfin de son mutisme.
    Joséphine refusa poliment. Soulevant les épaules d’indifférence devant ce
     refus, le curé se décida finalement à regarder sa visiteuse.
    — Tu voulais me voir ? questionna-t-il. Je suppose que cela a rapport avec ce
     marin, enchaîna le prêtre d’un air supérieur.
    Joséphine répondit aux deux questions par un timide signe affirmatif de la
     tête.
    — Comment se fait-il que ton père ne soit pas avec toi ? reprit l’homme
     d’Église. C’est avec lui que je devrais régler cette histoire, décréta-t-il,
     méprisant.
    Il sentait la colère revenir en lui… Ah, que cette situation était
     déplaisante !
    — J’ai honte de toi ma fille ! explosa-t-il. Moi qui étais certain que tu
     saurais tenir ta place !
    Joséphine rougit violemment ! Il savait, le curé savait ! « Mon DieuSeigneur, pardonnez-moi… Mais je l’aime pis y m’aime ! Ah
     Patrick ! Pourquoi t’es pas icitte ? »
    — Tu aurais dû remettre cet étranger à sa place et t’arranger pour qu’il ne
     s’approche pas de toi. Je ne sais pas exactement ce qui s’est passé, mais si ton
     père a mis cet O’Connor dehors, c’est certainement pour une bonne raison. Un
     homme a des besoins naturels, ma fille, tu devrais savoir cela, non ? Si tu t’es
     mise à te

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