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La colère du lac

La colère du lac

Titel: La colère du lac Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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comme une pelure d’oignon. Faudrait qu’y fasse froid
     en coton pour que tu gèles ! Allons, mets ton manteau, pis on y va, si on veut
     revenir avant la nuitte ! répondit Ernest en entraînant François-Xavier dehors,
     après s’être assuré que tout était en ordre pour leur absence de la
     journée.
    — Qui c’est qui va prendre soin de la vache à soir, papa ?
    — T’inquiètes donc pas, les filles à madame Gagné vont venir s’en occuper,
     déclara Ernest en installant son fils dans le traîneau.
    — Ti-Georges va être là aussi ?
    — Ah ben ça, j’peux pas te dire ! s’impatienta Ernest en montant à son tour sur
     le banc. Allez, hue, la jument hue ! dit-il en donnant le signal de
     départ.
    Le gros traîneau rouge se secoua. Encore endormi, il grinça de mécontentement
     de se faire déranger si tôt le matin, mais avec sa bonhomie habituelle, il ne
     fut pas long à faire entendre ses grelots, signe certain de sa bonne humeur
     retrouvée, et entama sa glissade vers le lac.
    François-Xavier se mit à rire sous les cahots violents de la descente et se
     retint à deux mains aux rebords de bois pour ne pas tomber de côté.
    — Doucement, doucement, intima Ernest à son attelage qui peinait et s’enfonçait
     dans la neige épaisse.
    Une fois le lac atteint, ce serait plus facile. Il faudrait contourner les
     falaises que le vent avait formées, telles des vagues géantes, glacées en plein
     mouvement, mais après, l’équipage ne serait plus qu’un petit point rouge filant
     dans un désert blanc. Il n’aurait qu’à suivre les balises de sapins qu’on
     installait chaque hiver pour délimiter le chemin de glace.
    C’était fantastique, grisant, cette impression que le lac entier nous
     appartenait ! Mais François-Xavier dut admettre que la courte halte qu’ils
     s’accordèrent à la petite cabane de bois où l’on pouvait s’abriter au milieu de
     la traversée fut la bienvenue. Il avait une de ces envies de pipi ! Pendant plus
     d’une demi-heure, il avait supplié son père de s’arrêter, mais celui-ci
     remettait toujours cela à plus loin.
    — Tantôt mon gars, tantôt, répétait-il sans même ralentir le moindrement.
    Ernest ne voulait vraiment pas traîner. Si jusqu’ici le trajet se déroulait
     sans incident, le retour risquait d’être plus problématique.Pendant que son garçon se soulageait, Ernest entra dans la cabane. Le temps
     était trop doux, ça sentait la tempête de neige à plein nez, prédit Ernest en
     regardant l’horizon. Le jour s’était levé depuis une bonne heure et pourtant,
     tout était sombre encore. Dès que son garçon se serait soulagé, ils
     repartiraient. En attendant, Ernest prit une lanterne sur une tablette de bois,
     l’alluma et la cala solidement sur le rebord de la fenêtre à l’intérieur de la
     cabane… Comme il prévoyait le retour l’après-midi même, ce petit phare le
     guiderait au cas où… Cependant, il ne prit pas le temps de se préparer la bonne
     pipée dont il avait tellement envie.
    — Allez ! On repart !
    Ernest s’assura de bien refermer la porte de l’abri et remonta dans le traîneau
     avec son fils. Ils venaient à peine de reprendre la route quand François-Xavier
     lui demanda le plus sérieusement du monde comment les petits sapins, qu’ils
     rencontraient régulièrement depuis leur départ, avaient fait pour pousser si
     vite. Ernest n’en revenait pas, être si petit, si naïf, si touchant… cet enfant
     l’émerveillait !
    Aux dernières nouvelles, sa Rose-Élise allait de plus en plus mal. La vie
     n’était pas toujours réjouissante, mais grâce à Dieu, il avait François-Xavier
     pour le consoler par son innocence et sa candeur. Là, seuls au milieu du lac
     Saint-Jean gelé, tout petits dans cette immensité blanche, Ernest Rousseau se
     rendit compte à quel point son fils adoptif était devenu important pour lui et
     il réalisa qu’il l’aimait comme son propre enfant. François-Xavier commençait à
     se demander s’il n’avait pas dit une bêtise.
    — Mon gars, dit Ernest, chus vraiment content d’être ton père… même si tu poses
     des questions idiotes en baptême, ajouta-t-il en riant, avant de donner un coup
     sec à la bride. Allez, Roberval nous voici !

    — Voyez-vous quelque chose, mademoiselle Coulombe ?
    Ernest était obligé de crier pour se faire entendre. Ce qu’il avait craint
     s’était produit. Il n’avait même

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