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La confession impériale

La confession impériale

Titel: La confession impériale Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Peyramaure
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la croix et l’épée. Il pria la reine de veiller
à la bonne entente entre ses deux fils et au respect de leur serment. Nous nous
sommes agenouillés à son chevet pour recevoir sa bénédiction et lui baiser la
main.
    Une heure plus tard, alors que tombait la
nuit, il reçut les derniers sacrements et ses paupières se fermèrent à jamais.
    Au cours de la minute qui suivit, les grandes
salles de l’abbaye s’animèrent comme des ruches, abbé, moines, officiers du
palais évoluant avec des gestes pathétiques dans la rumeur du tocsin, les
lamentations des pleureuses et les De profundis des moines. Bouleversé
par ce tohu-bohu, partagé entre ma peine et les soucis de mes nouvelles
charges, c’est à mes cabanes dans les arbres que je songeais. Il s’agissait
d’un temps révolu et bien d’autres horizons allaient se proposer à mes
méditations. Désormais, ce n’est qu’en moi ou devant l’autel que je pourrais
trouver le recueillement, sans le chant des oiseaux, le murmure du vent dans
les ramures, les odeurs de terre et de feuilles pour témoins.
    Après les obsèques célébrées dans la basilique
de Saint-Denis, nous reçûmes de nouveau l’onction royale, pour moi en l’église
de Noyon, en Neustrie, et pour Carloman en celle de Soissons. Une frontière
nous séparait.
    Peu attiré que j’étais par les cérémonies, ma
couronne était légère à ma tête, mais lourde à la pensée des territoires dont j’avais
hérité. À l’abri de l’autorité paternelle, je n’avais perçu que par échos les
frissons d’indépendance qui les agitaient. J’allais devoir passer des mois à
m’informer auprès des missionnaires et à envoyer et recevoir des ambassades,
pour connaître la situation dans ces contrées lointaines.
    Adulte mais manquant d’expérience pour
l’administration et la guerre, je me gardai de prendre des initiatives
hasardeuses que mon père eût déplorées. J’écoutais les conseils de prudence de
mes proches, comtes et officiers palatins.
    J’entretins des rapports courtois avec un
vieil ami de mon père, le calife de Bagdad, al-Mansour, à qui allait m’unir une
haine réciproque, bien que pour des raisons différentes, à l’endroit de l’émir
de Cordoue, Abd al-Rahman, qui tenait nos marches d’Espagne en alerte
permanente. La querelle religieuse qui opposait Abbassides et Omeyyades me
laissait indifférent. Seule comptait pour la paix de mon royaume le
comportement hostile de l’émir de Cordoue. J’avais du souci à me faire :
ses incursions en Septimanie, cette bande de terre longeant les rivages de la
Méditerranée, autour de Narbonne, s’accompagnaient de pillages et de massacres.
Mon père s’en était quelque peu désintéressé ; je décidai de rester
vigilant.
    J’attendais de bons
rapports avec Carloman ; il me déçut.
    Nous avions l’Aquitaine en partage, si bien
que j’étais en droit d’attendre de lui un concours au cas où les mouvements
d’indépendance renaîtraient de leurs cendres, ce qui, après la mort du roi
Pépin, me semblait imminent.
    Dévasté par des conflits endémiques et
exsangue, ce duché avait vu ressurgir la bannière au lion dans les mains d’un
personnage qui portait le nom de Hunald, comme notre vieil ennemi. On le disait
fils du duc Waïfre et aussi ardent que lui à proclamer l’indépendance de son
territoire.
    Je décidai – ce qu’aurait fait mon père – de
lever une armée pour descendre en Aquitaine me mesurer à mon premier rival
déclaré.
    Cette contrée, fort heureusement, ne m’était
pas inconnue ; quelques années auparavant, je l’avais parcourue en
compagnie du roi. Quand j’invitai Carloman à m’assister, il refusa sèchement,
me laissant assumer seul le poids de cette expédition. Je tirai de ce refus
l’amère impression que je n’aurais rien à attendre de lui. C’était une
confirmation de la différence de nos natures et de la jalousie qu’il m’avait
toujours manifestée. S’estimait-il défavorisé par le partage du roi et m’en
tenait-il rigueur, alors que je n’avais inspiré en rien la décision
paternelle ? Il ne s’en est jamais ouvert à moi. Il était d’un naturel
taciturne, toujours dans les jupes de sa mère qui, elle, ne cachait guère sa
préférence pour lui et sa méfiance envers moi.
    Je me passai aisément de sa présence pour
cette campagne. Rassemblée à Angoulême, mon armée, en traversant l’Aquitaine,
ne rencontra que villages désertés,

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