Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

La Cour des miracles

Titel: La Cour des miracles Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
révéler en quel pays tu es né et comment s’appelle ton père. J’ai hésité avant de m’y décider, parce que j’avais juré sur Aldebaran, la grande étoile de ma destinée, de ne jamais te parler de cela.
    Mais que veux-tu ? Peut-être bien que ma croyance à Aldebaran est morte dans mon cœur, comme y sont mortes bien d’autres croyances. Enfin, peut-être t’aurais-je révélé depuis longtemps ta naissance, – car je m’étais attachée à toi, et je te portais une sorte d’affection, – mais je craignais quelque chose que je n’ai pas besoin de t’expliquer.
    Aujourd’hui cette crainte n’a plus raison d’être.
    Aussi, lis-moi bien attentivement, car tu ne me reverras plus jamais, et les explications que je te donne ici contiennent des détails qui seront utiles pour te faire reconnaître de tes parents.
    Voici donc, Manfred :
    Il y aura bientôt vingt-deux ans, je traversais l’Italie du sud au nord avec une partie de ma tribu. Nous venions des lointains pays de l’Asie, de contrées dont je ne me souviens plus, et où habitaient les plus vieux de notre peuple. Et nous avions traversé l’Arabie, puis l’Egypte où nous avons longtemps séjourné, et où je me suis instruite en diverses sciences.
    Toute notre tribu s’était embarquée à Alexandrie ; mais tandis qu’une partie montait sur un vaisseau qui se dirigeait vers l’Hellespont pour aller au pays des Turcs, l’autre, dont je faisais partie, voguait vers la Sicile.
    De la Sicile, nous passâmes en Italie, et là, notre tribu se partagea en divers groupes qui prirent chacun une route différente.
    Avec l’homme que j’avais choisi pour époux et mon fils, je remontai l’Italie dans toute sa longueur. Nous allâmes à Naples, de Naples à Rome, puis à Florence et à Mantoue. Je disais la bonne aventure. Mon homme tressait des ouvrages d’osier qu’il vendait bien. Moi-même, je gagnais beaucoup ; j’aimais mon fils jusqu’à l’adoration ; j’étais heureuse… oui, heureuse !
    Je te raconte tout cela, Manfred, parce qu’en ce moment j’éprouve un triste plaisir à me reporter à cette époque où vivait mon fils.
    Ce fils, Manfred, avait alors environ seize ans.
    Il était fier et beau comme tu peux l’être toi-même.
    Nous étions alors à Mantoue, comme je te l’ai dit. Nous y étions depuis un mois, et nous nous disposions à pousser plus loin notre destinée vagabonde, lorsque je fus frappée par un terrible malheur.
    Mon fils, insulté, raillé dans la rue par un jeune seigneur, avait souffleté son insulteur. Aussitôt on l’avait arrêté. C’était, pour ce crime, au moins la prison perpétuelle, sinon la mort.
    Affolée, je m’informai.
    – Qui règne à Mantoue ? demandai-je.
    On me répondit en riant :
    – Le duc règne sur Mantoue, mais la signora Lucrèce Borgia règne sur le duc !
    Je courus au palais ducal.
    Ce ne fut qu’au bout de deux jours que je parvins à y entrer et à me faire conduire en présence de Lucrèce Borgia, cette célèbre femme dont tu as sans doute entendu parler.
    Je me jetai aux pieds de la signora Lucrèce, et lui racontai ce qui venait d’arriver à mon fils. Je lui dis que si mon fils ne m’était pas rendu, je mourrais de chagrin ; enfin, je pleurai et suppliai à genoux pendant longtemps.
    La signora Lucrèce m’avait d’abord écouté avec une indifférence hautaine.
    Puis, peu à peu, elle avait paru s’intéresser à mon récit et à ma douleur. Elle m’avait examinée attentivement.
    Elle renvoya les femmes qui l’entouraient, et mon cœur battit d’espoir.
    – Tu aimes donc bien ton fils ?… me demanda-t-elle.
    – C’est toute ma vie ! m’écriai-je en sanglotant.
    – Tu sais qu’il sera sans doute condamné à mort ; un misérable bohémien qui se permet de souffleter un fils de noblesse… Oui, c’est la mort… mais si tu veux… tu peux le sauver.
    J’écoutais, haletante d’angoisse.
    – Si tu aimes ton fils, reprit-elle d’un air sombre, tu dois être disposée à tout pour le sauver ?
    – A tout ! à tout ! signora…
    Elle garda quelque temps le silence, m’étudiant avec attention, et sans doute elle reconnut ma sincérité et la passion maternelle qui me transportait, car elle finit par me dire :
    – Eh bien, peut-être pourrons-nous nous entendre… Ecoute-moi…
    – J’écoute, signora, m’écriai-je, suspendue à ses lèvres.
    La signora Lucrèce Borgia reprit :
    – Connais-tu la ville de

Weitere Kostenlose Bücher