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La couronne et la tiare

La couronne et la tiare

Titel: La couronne et la tiare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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crut savoir ce qu’elle allait dire.
    Qu’elle ne pouvait dormir parce qu’il faisait chaud. Qu’elle n’était pas la fille qu’il imaginait. Qu’elle refuserait de partager sa couche et découragerait tout geste, toute approche. Mais elle prenait plaisir à ne rien dire, à ne rien faire, sinon prendre la mesure d’un pouvoir qu’il trouvait dérisoire.
    – Cet homme, messire… Ce Foulques d’Archiac. Défiez-vous-en.
    – C’est ce que je fais.
    – Il veut reprendre son cheval.
    – C’est ce que je sais.
    – Je l’ai ouï parler à son écuyer… Il vous advient d’aller à Vincennes…
    – Oui… Comment l’ont-ils su ?
    – Par mon père.
    – Je lui ai fait quelques confidences.
    – Eh bien, ils vont se mettre à l’aguet… Ils ont tout leur temps. Un jour que vous vous rendrez à Vincennes…
    – Archiac me provoquera.
    – Oui… Il dit qu’il connaît un champ qui fera l’affaire.
    – Il n’a point de lance… J’en suis privé.
    – Il s’en procurera. Non, messire, bas les mains.
    C’était un refus dans un souffle exprimant sinon l’acceptation, du moins l’envie. Constance glissa des doigts qui l’avaient effleurée dans un envol de chair et d’étoffe assorti d’un petit gloussement.
    –  Ah ! Bon, soupira Tristan.
    Ce n’était qu’une mince défaite. Il avait touché à son fantôme, il s’était pénétré de sa réalité. Vierge, Constance ? Impatiente de l’église et du prêtre ? Certes, mais pour être plus libre, ensuite, de sa personne.
    –  Vous êtes bonne de m’avoir prévenu, mais vous pouviez le faire demain.
    – Il m’a semblé que ça ne pouvait attendre.
    –  Tendre, vous l’êtes, m’amie, dit-il en palpant une hanche qui ne se déroba point. Vous avez un beau nom, vous l’a-t-on déjà dit ? Il est fréquent dans mon pays mais nullement à Paris (212) .
    Il saisit la main que Constance lui offrait comme pour être rassurée, bien que l’obscurité parût incapable d’exercer la moindre anxiété sur la raison de cette audacieuse. Sa paume lisse et ses doigts fins avaient la tiédeur et la fermeté de tout un corps qui ne pouvait plus s’éloigner.
    – Lâchez-moi. Il me faut clore cette porte.
    Elle poussa doucement le verrou. Il vit s’élever dans l’air un brouillard presque impondérable : la chemise volait, l’atteignait au visage, chaude, moite, imprégnée d’une odeur qu’il avait oubliée : celle du safran dont les femmes usaient pour leur toilette et la teinture de leurs vêtements. Une brume odorante qui l’incitait, dans l’attente d’un mieux, à dominer une envie de félicité dont il s’était cru guéri pour de longues, très longues semaines.
    – Cet Archiac est un grand fumeux, dit Constance en s’asseyant et le touchant immédiatement de son bras tiède.
    Oppressé par la présence inespérée de la jouvencelle, confondu par une félonie dont les intentions lui étaient révélées au moment le moins opportun, Tristan garda le silence. Si Archiac le contraignait à l’affronter une fois encore, il s’y résoudrait sans plaisance mais sans crainte. Sa nature était ainsi faite qu’elle cédait plus volontiers à la violence qu’à la circonspection.
    « Ce félonneux prendra une leçon de plus. Et pour qu’il cesse enfin de titiller les gens, eh bien, je l’occirai ! »
    Était-ce parce qu’il avait un corps nu contre lui, doux et tangible, un corps de femme, qu’il revoyait cette armure au bassinet déclos contre laquelle il avait mésusé de ses forces ? Pourquoi essayait-il de recréer son contenu ? Un homme d’une tigrerie déraisonnable. Un hutin toujours prompt à l’agression parce qu’il aimait à s’enivrer d’estours 25 comme d’autres de boissons. Jamais il ne tolérerait qu’Archiac lui reprît Alcazar. La blanche robe de ce prodige avait le poli du marbre et l’éclat de la nacre. Jouissance que de monter un tel coursier. Présentement, il se devait d’enjamber Constance pour un galop qui lui restituerait sans doute le goût de ses amours perdues.
    Il se leva, désireux de marcher pour se donner de l’air. Aussitôt, la jouvencelle fut dans ses bras, le front renversé, haletante, se refusant aux lèvres qui cherchaient les siennes mais point à l’épieu qui, herbe et chair, en touchait d’autres.
    – Viens, dit-il en voulant la mener jusqu’au lit.
    Elle lui résista parce que s’allonger, c’eût été avouer une concupiscence dont

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