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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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plates. Il me répondit d’un air assuré que cela ne l’empêchait point de passer commande. Il était convaincu que lorsque le chevalier de Montfort aurait perçu son dû, il ne manquerait pas de nous bailler quelques monnaies sonnantes et trébuchantes.
    Non sans malice, le père d’Aigrefeuille proposa au chevalier de Montfort de commencer la visite par l’étude de quelques chefs-d’œuvre de l’architecture locale.
    Arnaud tenta bien d’inverser le sens de la visite ou à défaut, de pouvoir vaquer librement à ses occupations. Le chevalier de Montfort n’était pas dupe. Il lui rappela vertement qu’il était à son service et non au service des filles de cuisine du roi Hugues. Arnaud dut s’incliner.
     
    Pendant une quinzaine de jours durant, nous parcourûmes l’île en tous sens. Pour admirer de petites églises isolées, des sanctuaires comme la Pangia Phorbotissa avec ses superbes peintures, des églises, comme celle de la Panagia tou Arakou à Lagoudera, ou découvrir des monastères accrochés à flanc de montagne. Nous y fûmes toujours bien accueillis.
    Il est vrai que le chapeau de messager pontifical dont se coiffait le père d’Aigrefeuille ouvrait bien des portes. Il remit d’ailleurs à l’évêque de Nicosie une bulle de notre Saint-Père le pape Clément qui recommandait à la piété et à la générosité des fidèles la restauration de l’édifice qui avait été victime d’un violent tremblement de terre, dix-sept ans plus tôt, comme il s’en produisait fréquemment.
    Arnaud dépérissait à vue d’œil. Tel un maroufle qui tentait de se rebiquer, il se remochina, puis il se déclara chaffouré. Son nez était pris par un gros catarrhe. Il fit semblant de toussir. Il prétendit aussi avoir une rage de dents (ça ne l’empêchait pas de clabauder à tout va).
    Une fièvre de cheval le saisit qui lui faisait claquer les dents, tant elle était forte. Son corps était parcouru de frissons. Puis il se plaignit de fortes douleurs aux boyaux.
    Il eut des spasmes d’agonie. Arnaud était la proie d’une epydemie rare aux sinthomes contradictoires. Il était victime de tous les maux de la terre. Mais il était le seul.
    L’epydemie ne nous avait pas contaminés. Nous nous portions comme des charmes. Le père d’Aigrefeuille lui conseilla quelques décoctions à base de plantes, lui prescrivit des tisanes de thym et de romarin. Rien n’y fit. Arnaud était moribond. Il demanda les derniers sacrements.
    L’aumônier attendit qu’il le suppliât de les lui administrer, pour annoncer une visite dans les quartiers marchands de Nicosie. En un clin d’œil, Arnaud retrouva des couleurs, se redressa, sourit et cria au miracle.
    Le père d’Aigrefeuille le pria de ne point abuser de sa patience et d’éviter de blasphémer à l’avenir. Faute de quoi il se verrait contraint de prier le chevalier de Montfort de bien vouloir le consigner dans sa cellule. Plus exactement dans une cellule loquée à double tour. Arnaud comprit qu’il avait intérêt à s’accorder. Ce qu’il fit.
     
    Le quartier des artisans de Nicosie regorgeait d’échoppes et de boutiques de toute taille. Tous les métiers y étaient exercés : des herboristes sur les rayonnages desquels s’alignaient des bocaux de bois ou de céramique décorée, des mortiers avec pilons et palettes pour préparer de savants mélanges dosés avec une demi-coquille d’œuf, des tailleurs, des menuisiers, des savetiers, des ferblantiers.
    Ruelles et places s’enchevêtraient jusqu’au quartier qui offrait tous les trésors d’Orient dont rêvait Arnaud. La plupart des marchands envoûtaient leurs chalands par des parfums qu’ils brûlaient dans des cassolettes de terre cuite. Bourgeois, chevaliers, servantes et nobles dames se côtoyaient librement et échangeaient sourires et saluts.
    Arnaud se fit présenter moult pièces de soie, des tapis et des tentures d’Orient, plus moelleux les uns que les autres (que diable pensait-il en faire ?) Pour protéger notre chambrette des vents coulis, me dit-il en toute innocence.
     
    Chez l’un des orfèvres, j’admirai une petite boîte ciselée en argent. Le marchand me la tendit et me permit de l’examiner sous toutes ses coutures. Le travail d’orfèvrerie était d’une finesse remarquable.
    Les douze apôtres étaient sculptés dans le métal sur les quatre côtés. Les angles étaient renforcés par des coins en or, sans fioriture. Le couvercle ne comportait aucun

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