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La danse du loup

La danse du loup

Titel: La danse du loup Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hugues De Queyssac
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chevreuil, au mépris du gibet.
    Tous ces gens, et bien d’autres encore dépendaient de notre baronnie. La plupart étaient des hommes libres, d’anciens serfs affranchis par les seigneurs des lieux lors des ordonnances promulguées par notre saint roi Louis le neuvième, et confirmées par son petit-fils Philippe le Bel.
    S’ils nous saluaient au passage d’un geste de la main à hauteur du chapeau, nous le leur rendions en inclinant nos lances sur lesquelles flottait un fanion aux armes des Beynac.
    Nous étions parvenus au gué. La rivière s’étalait là sur une grande largeur et nous caressions l’idée de pouvoir la franchir à cheval, sans trop de difficultés en cette époque de l’année.
    Effectivement, le courant nous parut faible et l’eau suffisamment claire pour en évaluer la profondeur avant de nous y engager. Nous quittâmes la rive à dextre pour pénétrer prudemment dans le lit de la rivière.
    Avec le poids de notre armure et la chaude houssure aux armes des Beynac qui recouvrait nos destriers de l’encolure à la croupe, il n’était pas question qu’ils pénètrent dans l’eau plus haut que les genoux.
    Nous avançâmes prudemment, scrutant la profondeur devant nous. Leurs sabots glissèrent d’abord sur les galets que recouvrait, par endroits, une fine couche d’herbes gluantes, mais ils s’y habituèrent rapidement et ils prirent de l’assurance lorsqu’ils sentirent que la hauteur de l’eau était raisonnable. Ils avaient compris que nous ne les engagions pas dans le gouffre de Padirac.
    Je fredonnai quelques vers. Étais-je à la hauteur d’un de mes lointains ancêtres, Bertran de Born, poète et guerrier à la vie tumultueuse ? J’en doutais, bien que je fusse bercé par les légendes des lieux et les mélodies des nombreux troubadours de passage à qui l’entrée du château restait toujours ouverte.
     
    Si par hasard, je pense à toi,
    Mon corps est parcouru de frissons,
    Car dans ton cœur, braises et tisons
    S’enflamment dans l’attente d’un roi.
     
    Où que tu sois,
    Où que j’aille,
    Rien qui vaille
    D’être vécu
    Si loin de toi.
    Mais le sais-tu   ?
     
    Par soir de lune claire,
    Ta lumière m’éclaire
    Dans la peine et la joie
    Si tu restes près de moi.
    Car il n’est plus douce soie
    Que le velours de ta voix.
     
    Une fois la rivière franchie, nous nous dirigeâmes au pas vers le château de Castelnaud, où nous devions porter au seigneur les salutations du baron de Beynac qui entretenait avec lui des relations distantes mais courtoises. Arnaud de Lautrec, le précédent sire des lieux, avait en effet renoncé à ses sympathies anglaises pour faire hommage, trois ans plus tôt, au comte de Pierregord allié au roi de France, pour le château de Castelnaud et la châtellenie qui en relevait depuis un trois quarts de siècle.
    L’esprit toujours pris dans mes chimères, j’avais l’intention de sauter sur l’occasion pour interroger le seigneur de Castelnaud au sujet des armoiries d’Isabeau de Guirande. Je m’étais laissé dire qu’il était aussi savant en matière de blasons qu’un certain seigneur du Mont-de-Domme dont j’avais vaguement entendu parler, sans connaître ni son rang ni sa science.
    l’avais bien l’intention d’entreprendre quelques recherches par là-bas, après le dîner, pendant qu’Arnaud se livrerait à un déduit en muguetant avec sa mie avant de tenter certainement moult chatteries. Avant que nous ne nous rendions ensemble aux Mirandes.
    Peut-être ne serait-ce qu’un coup d’épée dans l’eau, puisque, pour l’instant, je ne savais pas en fait à qui m’adresser précisément. À cette seule idée, mon esprit s’assombrit. Je me confortai en me disant que je devais poursuivre mon enquête pas à pas et sans relâche.
     
    Au cours des deux mois qui avaient suivi ce rêve qui obsédait mes pensées, j’avais compris que la vague description d’une silhouette ne me permettrait jamais d’identifier la petite fée aux alumelles : je devais procéder avec méthode. Si l’amour de mon cœur existait vraiment ici-bas, je devais le retrouver. Mon amour était vertueux, mais le cercle était vicieux.
    Plus que jamais, et je ne savais pas expliquer pourquoi, je la voyais vivante de jour comme de nuit, en chair et en os. Une obsession envoûtante. Mais je devais, à mon corps défendant, procéder calmement et avec méthode : identifier en premier lieu, le blason armorié à ses armes que le baron

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