La fabuleuse découverte de le tombe de Toutankhamon
représenter au travail. L’un d’eux s’était glissé dans la chambre. Puis, en hâte mais systématiquement, il avait pillé son contenu, vidé les boîtes, rejeté certains objets pêle-mêle et en avait passé d’autres à ses complices, restés dans l’antichambre, pour qu’ils puissent mieux les examiner. Il avait exécuté sa tâche aussi consciencieusement qu’un tremblement de terre. Le moment venu de débarrasser cette chambre, il sera extrêmement difficile de décider par où commencer. Pour l’instant, nous n’avons pas encore essayé d’y pénétrer ; nous nous sommes contentés d’en sortir quelques objets. Elle aussi contient des merveilles. Les pièces qu’elle renferme sont souvent plus petites que celles de l’antichambre, mais d’une facture aussi soignée. Écrivant ceci, j’en revois plusieurs – une boîte peinte, aussi jolie, semble-t-il, que celle de l’antichambre, une magnifique chaise en ivoire, or, bois et cuir, des vases d’albâtre et de faïence, et un jeu en ivoire sculpté…
La découverte de cette seconde chambre tempéra notre exaltation. Jusque-là, nous n’avions pas encore eu le temps de réfléchir. À présent, nous commencions à entrevoir l’immensité de la tâche qui nous attendait et les responsabilités qu’elle entraînait. Ce n’était pas là une découverte ordinaire que nous pourrions inventorier en une saison de travail. Il n’existait pas non plus de précédent pour nous indiquer la marche à suivre. Pour tout dire, l’entreprise nous semblait surhumaine.
Nous avions été pris par surprise et nous n’étions absolument pas préparés à classer cette multitude d’objets, dont beaucoup étaient endommagés et nécessitaient un traitement avant qu’on puisse les déplacer. Il y avait mille problèmes à régler avant même de vider les chambres. Il faudrait faire venir des produits de conservation et des emballages adéquats ; prendre l’avis d’experts sur les traitements à appliquer aux objets abîmés ; construire ou trouver un laboratoire, un lieu sûr où l’on pourrait traiter les objets, les cataloguer et les emballer. Il faudrait encore dresser un plan à l’échelle et prendre des photographies pendant que tout était encore en place ; disposer, enfin, d’une chambre noire pour le développement des photos.
Avant tout, nous devions veiller à la protection de la tombe. Cela fait, nous pourrions exécuter nos plans l’esprit tranquille. Nous comprîmes aussi que cela ne nous prendrait pas une saison mais deux, trois, quatre peut-être. La grille en bois que nous avions posée à l’entrée du couloir était loin de constituer une protection suffisante, et je pris les dimensions exactes de la porte pour faire construire une solide grille en fer. Pour cela, comme pour bien d’autres raisons, il était indispensable que je me rende au Caire. Il fallait donc remblayer la tombe une nouvelle fois.
La nouvelle de la découverte s’était propagée à toute allure, et les rapports les plus fantaisistes étaient expédiés à l’étranger. On racontait, par exemple, que trois avions avaient atterri dans la Vallée pour emporter les trésors vers une destination inconnue. Pour mettre fin à ces rumeurs, nous décidâmes, dans un premier temps, d’inviter lord Allenby et les différents chefs des départements concernés à visiter la sépulture. Après quoi, nous adresserions au Times un récit de la découverte.
Le 29, nous présentâmes officiellement la tombe à ceux qui avaient pu se déplacer. Étaient présents lady Allenby (lord Allenby avait été malheureusement retenu au Caire), Abd el-Aziz Bey Yehia, le gouverneur de la province, Mohamed Bey Fahmy, le Mamour du district, et un certain nombre de notables égyptiens. Le 30, M. Tottenham, conseiller du ministère des Travaux publics, et M. Pierre Lacau, directeur général du Service des Antiquités, qui n’avaient pu venir la veille, procédèrent à une inspection officielle. M. Merton, le correspondant du Times, assistait également à l’ouverture officielle, et c’est lui qui envoya la dépêche qui suscita tellement d’émotion en Angleterre.
Le 3 décembre, après avoir barricadé l’entrée avec de solides planches, nous remblayâmes la tombe. Lord Carnarvon et lady Evelyn partirent le lendemain pour l’Angleterre ; ils projetaient de revenir plus tard dans la saison. Le 6, laissant à Callender le soin de veiller sur la tombe, je me rendis au
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