La Femme Celte
l’éducation sexuelle d’Adam.
Le Zohar (Section Béreshit) va même jusqu’à
dire : « Voici que Jéhovah créera une chose nouvelle sur la
terre : une femme enveloppera un homme. » Et les rabbins modernes interprètent
cette phrase ainsi : au temps de l’avènement du Messie, la femme recherchera
l’homme, au lieu que maintenant l’homme recherche la femme. C’est donc montrer
que la Femme peut un jour reprendre sa personnalité entière, devenir celle qui
choisit, qui prend, qui décide, au même titre que l’homme. Les données du
problème sont donc parfaitement visibles : tant que la femme n’aura pas
recouvré intégralement sa personnalité, tant
qu’elle sera aliénée, nous assisterons à la lutte permanente entre les filles
d’Ève et les filles de Lilith, lutte qui se situe bien davantage dans le
cerveau de l’homme que dans un quelconque champ de bataille. Mais l’enjeu est
d’importance, puisqu’il s’agit de l’équilibre de la société, incapable de
résoudre ses propres contradictions.
On pourrait encore citer, dans le domaine judéo-chrétien, la
troublante histoire de Salomé qui a inspiré tant de poètes, de peintres et de
musiciens, seuls à s’apercevoir qu’elle recelait les germes profonds de la
révolte de Blodeuwedd-Lilith. Mais là encore, la fonction de censure a joué et
Salomé apparaît comme le type même de la femme pervertie. Il n’y a guère que
l’homosexuel Oscar Wilde [229] qui ait vraiment mis en
valeur l’aspect fondamentalement révolutionnaire de l’érotisme de Salomé :
la fille d’Hérodiade brave en effet tous les interdits pour satisfaire son
désir, c’est-à-dire son instinct ; elle veut posséder Jokanaan, prophète
divin, donc représentant de la parole divine ; celui-ci se dérobant, elle
joue de la passion effrénée d’Hérode vieillissant, c’est-à-dire le Père, pour réclamer
la tête de Jokanaan. Hérode est obligé de lui donner satisfaction, et en
donnant l’ordre de décapiter le prophète, il renonce à son propre pouvoir, ce
pouvoir que vient de lui extorquer Salomé. C’est le triomphe de Salomé et
d’Hérodiade, le triomphe de la femme sur l’homme. Mais Salomé va jusqu’au bout
de son désir : elle baise les lèvres de Jokanaan mort, et ce triomphe-là
est encore plus important pour elle parce qu’il marque sa réintégration dans sa
propre personnalité autrefois diminuée, châtrée ,
par la loi paternelle, celle-ci représentée à la fois par Jokanaan vivant et
par Hérode débile. Alors Hérode comprend qu’il a été joué : dans un
dernier sursaut d’énergie, il fait écraser Salomé sous les boucliers de ses
soldats. La révolte de Lilith est encore une fois éphémère, et son triomphe
n’est finalement qu’un cri d’agonie. Mais ce cri d’agonie, Hérode et tous les Pères l’entendront longtemps encore au fond
d’eux-mêmes.
La pseudo-histoire romaine des origines, c’est-à-dire la compilation
des mythes primitifs du Latium, nous présente un autre cas de révolte féminine,
étouffé lui aussi sous les boucliers des soldats, geste hautement significatif
puisque l’ordre paternaliste repose sur l’armée. Il s’agit de Tarpeia qui,
selon certains, livra Rome aux Sabins, pour l’amour du roi sabin Tatius ;
et c’est Tatius qui fit périr la jeune fille, laquelle, selon Florus (I, I), agit
« moins par trahison que pour une vanité naturelle à son âge ». Ce
curieux commentaire laisse supposer que Tarpeia avait des raisons beaucoup plus
importantes pour commettre cet acte, et comme c’est le vainqueur, donc le
bénéficiaire de la « trahison », qui ordonne son supplice, on est en
droit d’affirmer qu’il s’agissait bien d’une révolte caractérisée contre
l’ordre établi, contre l’ordre paternaliste. D’ailleurs dans le nom du sabin, Tatius,
nous retrouvons le mot indo-européen qui a donné tat ou tad , c’est-à-dire le père . Il est à noter, à propos de Tarpeia, que
d’après Plutarque ( Romulus , 21), c’est aux
Gaulois qu’elle livra Rome, et non aux Sabins.
Car la soi-disant trahison est seulement une révolte. Le domaine
celtique nous propose de nombreuses légendes sur ce thème de la femme qui ouvre
les portes d’une forteresse, ou qui bafoue l’autorité du roi mainteneur de
l’ordre établi.
Blathnait et Cûroi (Irlande) : Lors d’une expédition dans une forteresse mystérieuse, les
Gaëls Conchobar et Cûchulainn, ainsi
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