La Femme Celte
intégrer plus ou moins dans
le culte, telle la christianisation des fontaines, telle la reconnaissance de
certains saints plus que suspects, telles les dévotions particulières qui sont
encore en usage au XX e siècle.
L’île de Bretagne, qui avait échappé provisoirement à la romanisation,
fut, malgré la résistance héroïque de certains Bretons, dont le célèbre
Caratacos, la proie des Romains en 51 ap. J.-C. Dix ans plus tard, après
l’odieux massacre des Druides de l’île de Môn (Anglerey), la Bretagne tout
entière se souleva, sous la conduite de Bodicea, reine des Iceni, mais ce fut
en pure perte. En 83 les Romains avaient atteint les régions de la Clyde et du
Forth où l’empereur Antonin fit construire le fameux mur qui porte son nom,
afin de protéger la nouvelle provincia contre
les Pictes du nord-est de l’Écosse et les derniers Bretons indépendants de la
côte nord-ouest.
Cependant, à la différence de la Gaule, la Bretagne ne fut jamais
vraiment romanisée. Les Bretons conservèrent leur langue et leur culture,
celles qui se perpétuent encore à l’heure actuelle dans le Pays de Galles et qui n’ont jamais cessé d’exister .
Mais si les Bretons se tirèrent relativement bien de
l’occupation d’ailleurs très sporadique des Romains, il n’en fut pas de même
quant aux invasions germaniques des Angles, des Jutes et des Saxons. Du III e au VI e siècle,
sous la poussée anglo-saxonne, et parce qu’ils étaient incapables de faire
taire leurs querelles intestines, les Bretons durent reculer dans l’ouest de
l’île, et cela malgré des périodes de résistance victorieuse comme celle
attribuée par la légende au roi Arthur. L’île de Bretagne devint aux trois
quarts saxonne et les Bretons qui ne purent pas tous rester au Pays de Galles
et en Cornwall durent passer la mer et s’établir dans l’Armorique gauloise qui
allait prendre ainsi le nom de Bretagne. Le Cornwall tomba d’ailleurs très vite
dans l’orbite saxonne. Seul le Pays de Galles put maintenir son unité et son
ethnie, mais il perdit à son tour son indépendance à la fin du XIII e siècle, où, en 1282, le roi d’Angleterre
Édouard 1 er garda le titre de Prince de Galles pour son fils
héritier [28] .
L’Irlande, elle, avait vécu à l’écart de la romanité, mais
pas plus que la Gaule ou la Bretagne, elle n’avait connu d’unité politique. Au
début de l’ère chrétienne, on y distingue un mélange ethnique assez étonnant :
populations préhistoriques et mégalithiques (les Fomoré et les Tuatha Dé Danann
de la mythologie), Gaëls qui portent encore leur nom générique de Scots , tribus gauloises, bretonnes et belges (Fîr
Galliain, Fîr Domainn et Fîr Bolg) installées depuis le milieu du 1 er siècle
av. J.-C. De nombreuses tribus sont groupées, plus ou moins bien
d’ailleurs, en cinq provinces : l’Ulster, le Connaught, le Leinster-Nord
et le Leinster-Sud, le Munster. Ces provinces sont toujours en guerre les unes
contre les autres, surtout l’Ulster et le Connaught qui se disputent la
prédominance sur l’île. Au milieu du second siècle, le roi de Connaught, Conn
aux Cent Batailles, fonde un nouveau royaume sur les ruines du Leinster-Nord,
le royaume de Mide ou Meath (milieu), établit
à Tara, ancien sanctuaire remontant à la nuit des temps, le siège d’une royauté
suprême ayant pouvoir sur tous les autres rois d’Irlande. Lui-même se fait
élire Ard-Ri , c’est-à-dire Haut-Roi. Cette
institution de la royauté suprême allait durer jusqu’à la perte de
l’indépendance de l’Irlande, mais il faut bien dire que ce fut surtout, la
plupart du temps, un pouvoir parfaitement théorique.
Entre-temps, le christianisme, venu de l’île de Bretagne, et
propagé en particulier par saint Patrick (mort en 461), allait submerger l’île
d’Irlande et mettre fin au culte druidique. Mais à la différence de ce qui se
passait en Gaule, le christianisme ne détruisit ni la langue gaélique, ni les
traditions celtiques. On peut même dire que c’est l’église d’Irlande qui a
sauvé tout ce qui pouvait être sauvé du celtisme : ce sont les moines qui
nous ont transcrit les précieux manuscrits de la littérature en langue gaélique
et d’inspiration typiquement celtique et païenne. D’ailleurs, surtout avec
saint Columcill, le christianisme irlandais prit une coloration très
particulière où nous pouvons retrouver une influence druidique, et
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