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La Femme Celte

La Femme Celte

Titel: La Femme Celte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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tous les maux dont est affligée l’humanité.
Or il est bien évident qu’Yseult et Ève ne sont que deux visages (et deux noms)
d’un unique personnage, celui de la Femme-Soleil, l’initiatrice et la
révélatrice, sans laquelle l’humanité, représentée dans le mythe par l’individu
mâle actif, ne peut sortir des ténèbres de l’inconscience, c’est-à-dire en fait
de la non-existence. « Toutes les Grandes Déesses », remarque le
psychanalyste jungien Pierre Solié dans son ouvrage sur la Femme essentielle , « eurent leur heure solaire
fécondant la lune – “stérile” et passive – de leurs rayons. C’est à ce hierogamos inversé – commun à de nombreuses mystiques
– que nous convie la plupart des héros des épopées celtiques. L’amour, au
niveau de l’âme, n’est plus seulement le désir brutal pulsionnel, mais un amour
déjà divinisé. » C’est dire que ce qui est considéré comme la faute , depuis la rédaction tronquée de la Genèse , n’a, en réalité, aucune connotation morale,
mais concerne uniquement un passage d’un niveau de conscience à un autre,
passage que seule la Femme, même la version tronquée et moralisatrice en
convient, était capable de provoquer et de mener jusqu’à son terme.
    Au reste, la femme celte, telle qu’elle apparaît dans le
légendaire, ne fait que refléter un état antérieur qui a vu la prééminence de
la Femme-Soleil en tant que symbole révélateur. « Nos soupçons se
confirment, écrit Michel Cazenave, quand on constate encore plus, dans cette
perspective singulière où la lune, par son humidité, devient la médiation de la
chaleur solaire fécondante et induit précisément la fécondité générale dans la
transformation du brasier en un feu doux et tiède, que les dieux-lunes des plus
vieilles religions gouvernaient en effet la fertilité de la terre, et qu’on
pense aux doublets irlandais de Tristan – l’amant de Deirdré, Noisé, grâce à
qui “toute vache et tout animal qui l’entendait donnait deux tiers de lait en plus”,
ou Diarmaid dont les lits légendaires possédaient une telle vertu que les
femmes stériles s’y rendaient pour être guéries de leur mal [475] . »
De là l’importance du couple mythique Tristan-Yseult, qui, en concrétisant,
dans le cadre d’une histoire , la volonté de
revenir à l’unité primordiale (androgynat primitif d’avant la côte d’Adam) qui
met d’ailleurs l’accent sur la fusion des êtres par rapport à la procréation si chère à la
tradition judéo-chrétienne. Et il n’est pas étonnant de relever, dans une des versions
de la légende de Diarmaid et Grainné, prototype irlandais de celle de Tristan,
ces quelques vers significatifs placés dans la bouche de Grainné, s’adressant à
son amant qu’elle veut endormir : « Mon cœur se briserait de douleur
/ si jamais je manquais à te voir. / Nous séparer serait séparer / l’enfant de
sa mère, / éloigner le corps de l’âme. » Au-delà du chant d’amour
proprement dit, qui est particulièrement émouvant, il y a bien autre
chose : une réalité essentielle. Il ne faut pas oublier que le nom de
Grainné provient du gaélique grian , qui
signifie « soleil ». Dans la symbolique stellaire, il est évident que
séparer la Lune (Diarmaid) de Grainné (le Soleil) serait séparer le corps de l’âme . Tristan ou Diarmaid
n’existe en tant qu’individu que par la présence d’Yseult ou de Grainné, de
même que la Lune est invisible (donc inexistante) sans la lumière qui lui
parvient du Soleil.
    Mais si l’héroïne est Femme-Soleil, il faut lui reconnaître
des qualités ignées , avec tout ce que cela
suppose. Denis de Rougemont parlait de la brûlure des amants, ne faisant ainsi que reprendre de façon logique l’effet des flèches
de Cupidon dans la littérature faussement mythologique des Gréco-Latins. Avant
lui, des poètes de toutes les époques ont voulu exprimer la notion
« d’amour l’ardente flamme », à tel point que cette image est devenue
un des lieux communs les plus fréquents de la littérature universelle,
particulièrement de l’école dite pétrarquisante. À cet égard, c’est peut-être
le calviniste Agrippa d’Aubigné, austère pourfendeur de jésuites et non moins
violent amant de la très catholique Diane de Talcy, qui semble avoir été le
plus loin dans la subtile compréhension du rôle de la Femme-Soleil dans son
union amoureuse avec son

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